À Tours plusieurs associations répondent à l'appel de la campagne internationale pour l'abolition des armes nucléaires et s'installent pour 4 jours d'actions près de la place Anatole-France, en commémoration des bombardements nucléaires d'août 1945.
6 août et 9 août 1945, des dizaines de milliers d'innocents (103 000 à 220 000 morts, selon les sources) périssent sous les bombes atomiques lancées par les États-Unis sur Hiroshima et Nagasaki. Le monde entre dans une nouvelle ère avec cette technologie mortifère, dont disposent aujourd'hui 9 États.
Coalition d'ONG fondée en 2007, l'ICAN (Campagne Internationale pour l'Abolition des Armes Nucléaires) a décroché dix ans plus tard le Prix Nobel de la paix, pour être parvenu à faire voter par 122 pays à l'ONU le traité international d'interdiction des armes nucléaires (TIAN).
Ce traité prévoit l'interdiction d'employer, de fabriquer, de stocker ou de menacer d'utiliser des armes nucléaires. Pour l'ONU, l'usage de la bombe atomique serait un crime contre l'humanité.
Entré en vigueur en 2021, le TIAN ne garde cependant qu'une portée symbolique, puisque les 9 puissances dotées de l'arme nucléaire (USA, Russie, France, Royaume Uni, Chine, Israël, Inde, Pakistan et Corée du Nord) ont refusé de le signer ou de le ratifier.
La Ville de Tours est signataire de l'appel des villes pour le TIAN. Les associations qui y organisent ces 4 jours de commémoration à l'appel de l'ICAN, réclament, elles aussi, la signature du traité par la France :
"La France considère que l'interdiction des armes nucléaires n'est pas une approche réaliste, explique Patrice Coulon, du Mouvement pour une alternative non-violente. Elle estime que le traité d'interdiction est incompatible avec le TNP (traité de non-prolifération des armes nucléaires, signé en 1968, NDLR) et qu'elle fait suffisamment de démarches en faveur du désarmement. Ce qui est absolument faux.
"Oui, on diminue le nombre d'ogives, concède le militant, mais dans le même temps, on miniaturise et on fait des essais souterrains à côté de Bordeaux !" En réallité, les essais d'armes nucléaires grandeur nature ont été remplacés par des expérimentations limitées, à l'aide de lasers.
"C'est en contradiction avec l'article 6 du TNP, estime toutefois Patrice Coulon. Le traité stipule que "les pays doivent faire preuve de bonne foi dans le désarmement !"
Un lien direct entre nucléaire civil et nucléaire militaire
Chez tous ces militants, le nucléaire civil, la production d'électricité, n'a guère plus la cote que le militaire, la production de bombes :
"Cela ne fera pas plaisir à tout le monde, mais il y a bien un lien entre nucléaire militaire et le nucléaire civil", déclare le député écologiste de Tours, Charles Fournier. Venu se joindre à la commémoration ce 6 août au matin, il rappelle en exemple la levée de boucliers dans le monde contre le nucléaire civil en Iran, première étape avant l'arme atomique.
"Nous sommes dans un moment d'état de grâce pour le nucléaire dans notre pays, poursuit Charles Fournier. Parlementaire, il voit "défiler les textes du gouvernement pour faciliter le développement du nucléaire tout en freinant sur les énergies renouvelables. Cette commémoration peut aider à la nécessaire reconquête de l'opinion en France sur ces questions."
Pour établir ce lien entre les deux technologies, civile et militaire, Philippe Gardelle, du groupe Sortir du nucléaire Touraine, reste en Indre-et-Loire :
"À la centrale nucléaire de Chinon, le premier réacteur a servi pour fabriquer les bombes qui ont explosé en Algérie. Je refuse de parler d'essais, pour moi ce sont bien des bombardements. Et puis il y a le CEA, à Monts, voulu par le général de Gaulle pour ne pas être en reste par rapport aux USA et à l'URSS, pour faire de la France une puissance atomique."
Autre exemple, non loin de Tours : dans le département voisin de la Vienne, la centrale de Civaux vient d'être choisie pour produire du tritium, indispensable à la fabrication de nos bombes atomiques de type H.
Pour dénoncer ce lien entre nucléaire civil et militaire, les associations organisent ce mercredi 7 août une randonnée à vélo à travers les sites emblématiques de Touraine : départ prévu à 9h à Port-Boulet, petite gare où transitent les déchets radioactifs, avant un passage au CNPE d'Avoine (la centrale nucléaire de Chinon), puis une étape au CEA de Monts, avant de revenir à Tours, place Anatole-France, sur le site des commémorations.
Musique, stands, spectacles, lecture de textes et poésie, de nombreuses animations seront organisées au fil de ces 4 journées à Tours.