Un mois et demi après le début de la contestation et près d’une semaine après l’emploi du 49.3, la rancœur monte dans les rangs des manifestants. Dans le cortège de Châteauroux, ce 28 mars, certains veulent durcir le mouvement.
"Retrait !!", "64 ans c’est NON !"… À Châteauroux, ces slogans pleuvent littéralement sur les manifestants sous la forme de petits confettis. Après dix jours de mobilisation, les syndicats veulent surfer sur le regain de mobilisation de jeudi dernier. "On va rester dans la rue jusqu’à ce que la réforme soit retirée, martèle Coralie Raveau, secrétaire générale de la FSU 36. On est prêt à perdre dix jours de salaires pour gagner deux ans de notre vie."
Une détermination qui peine à masquer la rancœur et la colère qu’ont provoquées le 49.3 et la volonté du gouvernement de maintenir la réforme coûte que coûte. Dans le cortège, le discours s’est radicalisé chez certains manifestants.
"C'est devenu difficile de manifester pacifiquement"
Responsable UNSA dans le département, Hervé Delair ne mâche pas ses mots à l’égard du président de la République : "On pourrait presque apparenter Macron à un dictateur. Il impose et il veut encore imposer avec cette réforme. […] C’est incompréhensible !"
Au sein du cortège, un manifestant souhaite, lui, voir le mouvement se durcir et appelle à bloquer des services publics tel que le ramassage des ordures, comme cela a été le cas à Paris et Marseille. "C’est la dixième manifestation à Châteauroux, mais rien ne se passe… Marcher, marcher… Ça ne sert à rien de marcher. […] On n’en peut plus. Macron et Borne doivent dégager", scande-t-il.
La Cité administrative envahie pacifiquement
Un peu plus loin, un militant du NPA pointe du doigt la radicalité du gouvernement, coupable selon lui d’apporter une réponse répressive à la contestation. "Ce sont les violences d’État qui incitent les gens à devenir violents, défend-t-il. On sent que depuis la loi El Khomri (en 2016, ndlr), le comportement des forces de l’ordre a changé. Les violences policières se sont multipliées et c’est devenu difficile de manifester pacifiquement."
Présent à Sainte-Soline, ce week-end, pour protester contre le projet de mégabassines dans les Deux-Sèvres, il raconte avoir été témoin d’une utilisation disproportionnée de la force par la police : "C’était hyperviolent, j’ai vu des blessés tombés à côté de moi."
Symbole d’un mouvement qui commence à se radicaliser, l’itinéraire déclaré de la manifestation n’a pas été respecté. Un phénomène qui a été observé dans plusieurs autres villes.
À Châteauroux, le cortège a notamment envahi pacifiquement la cour principale de la Cité administrative, après des échanges verbaux tendus avec les policiers. "On est un peu dépassé, admet un responsable CGT. Ce que l’on a dit se prédit. Les Berrichons sont restés sages jusqu’à présent, mais on a abusé de notre patience."
Entre 4 000 et 5 000 personnes ont participé au rassemblement. Un chiffre qui serait en baisse comparé à celui de la mobilisation de jeudi 23 mars.