En mars 2018, 124 professionnels de santé signaient une tribune contre l'homéopathie, un texte qui a relancé le débat de son remboursement. En attendant le verdict de la Haute Autorité de Santé le 28 juin, inquiétude du site de Boiron dans le Loir-et-Cher.
"Si on est déremboursés, on aura une chute, qui sera sans doute considérable. Il y aura des personnes qui, en allant à la pharmacie, diront : "Non, c'est pas remboursé, j'en veux pas", anticipe Carine Jaubertie, directrice du site des laboratoires Boiron à MontRichard, dans le Loir-et-Cher.Ici, Boiron emploie 80 personnes, sans compter sa collaboration - occasionnelle ou régulière - avec 30 entreprises locales. Mais depuis un peu plus d'un an, "on observe une décroissance entre 10 et 15%. On est en crise médiatique, suite à la tribune parue dans la presse."
La tribune assassine
Dans cette tribune, 124 professionnels de santé s'insurgent contre l'homéopathie et autres médecines alternatives. "En septembre 2017, le Conseil scientifique des Académies des sciences européennes a publié un rapport confirmant l’absence de preuves de l’efficacité de l’homéopathie", écrivent les signataires.
Virulent, le texte a relancé le débat sur le remboursement de l'homéopathie, une forme de médecine qui joue sur l'effet placebo, par la Sécurité sociale. La Haute Autorité de Santé se voit sommer de statuer. Elle rendra sa décision le 28 juin après avoir auditionné les 3 ténors du marché : Boiron, Lehning et Weleda.
Rien n'est encore fait, mais la menace se fait sentir dans le Loir-et-Cher, où 80% des produits du site sont jusqu'à présent remboursés. Pour ne rien arranger, malgré la position de leader mondial de Boiron dans le secteur, 90% de la production loir-et-cherienne est à destination de la France.
Les employés mobilisés
Pour se défendre, Boiron oppose le rapport EPI3, issu d'une étude réalisée entre 2005 et 2012 sur plus de 8500 patients et 3 grands types de pathologies. Principale conclusion de l'étude : les patients également soumis à un traitement homéopathique consomment selon les pathologies 2 à 3 fois moins de médicaments, ce qui réduit leur exposition aux effets secondaires et les risques de mésusage pour une évolution clinique jugée "comparable".
"Les salariés de Montrichard croient à l'homéopathie. Pour eux, dérembourser, c'est un non-sens. Ils se posent des questions [sur l'avenir]. On n'a pas été habitués à vivre une tension comme celle-ci, reconnaît Carine Jaubertie. Tout le monde est mobilisé sur la campagne "Mon homéo, mon choix". Ils sont sur les marchés, sur les lieux touristiques, sur les manifestations culturelles..."
La pétition a atteint aujourd'hui plus de 880 000 signatures.