Le petit village de Yèvre-le-Châtel va fêter Noël dans la joie. La commune vient de se voir attribuer près de 150 000 euros de la quatrième édition du loto du Patrimoine. La mission du Patrimoine, pilotée par Stéphane Bern, a choisi le dossier de rénovation de l’église Saint-Gault.
Les résultats ont été publiés en début de semaine, et comme de coutume, 100 sites ont été retenus sur toute la France. L’église Saint-Gault de Yèvre-la-Ville, village situé non loin de Pithiviers, est un des lauréats du loto du Patrimoine. L’église a bien besoin d’une rénovation complète. Il faut dire qu’elle date du XIe siècle. Mais cette commune de moins de mille habitants a un "handicap" de taille en plus de son petit budget : son patrimoine architectural, très important, qui lui a fait obtenir son classement dans le club fermé des plus beaux villages de France.
De lourds investissements
On parle là d’un budget de 800 000 euros. Autant dire que toute initiative pour alléger une facture de ce montant est bonne à prendre. Alain Di Stéfano, le maire délégué de Yèvre-le-Château, et Patricia Pailloux, la maire de la commune associée de Yèvre-la-Ville, sont évidemment très heureux de cette annonce. "Cet argent va nous permettre d’avancer dans nos projets de rénovation de l’église".
Les deux communes se sont associées en 1973, grâce à la loi Marcellin. C’est une fusion-association : il y a un seul budget. Elles totalisent quatre monuments historiques à entretenir et à faire découvrir aux quelques 100 000 visiteurs annuels. L’église comme le château sont ouverts sept mois par an (du 1er avril au 1er novembre) et il est de plus en plus urgent de mettre le lieu de culte à niveau. C’est en fait le dernier monument à restaurer. C’est pourquoi Alain Di Stefano a rempli un dossier de candidature auprès de la mission patrimoine, sans savoir à l’origine, quelle somme pourrait leur être allouée.
300 000 euros de travaux... pour la première tranche
"Le chantier va se dérouler en plusieurs tranches", explique Alain Di Stefano, "et là, la première tranche doit permettre de restaurer le clos et le couvert, c’est-à-dire la couverture et toutes les façades extérieures de l’église. La deuxième tranche, qui se fera ultérieurement visera à remettre en état l’intérieur, profondément dégradé, tout comme l’extérieur".
La première tranche de travaux s’élèvera à 333 289 euros hors taxes, à laquelle il faudra ajouter des fouilles archéologiques, qui n’étaient pas prévues initialement mais demandées par la DRAC. Pour ce premier chantier elle a d’ailleurs été sollicitée, tout comme le département, sans que pour l’instant de réponse soit parvenue à la commune. Les fouilles devant se situer principalement au niveau des murs pour retrouver toute la structure archéologique de l’édifice, remanié au cours des siècles, "les travaux ne commenceront certainement pas avant la fin de l’année 2022", estime-t-il.
Que peut-on voir dans ce plus joli village de France ?
L’église est ouverte sept mois par an, tous comme les autres monuments visités. "La forteresse médiévale se visite du 1er avril au 1er novembre, tous les jours de 14h à 18h. En même temps que nous ouvrons le château, nous ouvrons l’église, c’est une des très, très rares églises du Loiret à être ainsi ouverte tous les jours".L'édifice accueille aussi des expositions et des concerts, comme le concert baroque du 15 août qui existe depuis un quart de siècle et a fidélisé une clientèle de mélomanes. Parmi les monuments qui ont fait la réputation du lieu, la nef de Saint-Lubin. "C’est une église qui n’a pas de toit, qui est inachevée, mais qui a fait l’admiration de Victor Hugo. C’est un lieu absolument extraordinaire, un lieu magique, accessible en permanence même l’hiver". Seule la visite du Château est payante et permet d’aider à l’entretien et à la décoration du village de Yèvre-le-Châtel, au fleurissement remarquable, puisqu’il a obtenu la plus haute récompense des quatre fleurs, à l’instar des grandes villes, se félicite son maire. "Dans la cour haute du château, il y a des carrés médiévaux avec 150 espèces de plantes médicinales, aromatiques et destinées à la teinture, qui sont présentées aux visiteurs". Site remarquable de la route de la Rose du Loiret, tout l’entretien du village, le fleurissement, la végétalisation et l’aménagement d’une roseraie sont financés grâce aux entrées payantes de la forteresse. Ce qui représente 7 à 8000 visiteurs par an sur les 100 000 comptabilisés chaque année.
Victor Hugo et Yèvre-le-Châtel
Comment le géant de la poésie française s’est retrouvé dans ce petit village ? Alain Di Stéfano nous raconte : "Victor Hugo est venu en août 1834, il avait l’habitude de se déplacer à travers la France avec Juliette Drouet. Il écrivait régulièrement à sa femme Adèle et avait dans sa poche un petit carnet où il faisait des dessins. Il écrit une lettre où il raconte être allé de Pithiviers à Yèvre-le-Châtel, à deux lieues de là. Il y a trouvé un château et un couvent ruiné "mais c’est magnifique, je dessine tout ce que je vois, tu en jugeras dit-il". Il a fait plusieurs dessins du lieu, qui sont conservés à la maison Victor Hugo à Paris, et nous avons une reproduction d’un de ses dessins qui se trouve devant l’église Saint Lubin. Il avait un excellent coup de crayon ajoute-t-il". Avec cet apport financier, la commune va pouvoir continuer la valorisation d’un site rural, vivant, et remarquable, afin de le partager avec ceux qui viennent le découvrir et repartent étonnés d’avoir trouvé en Beauce, un tel lieu.