Le colonel Bruno Maestracci, directeur du service d’incendie et de secours pour la Corse, est l’invité du Corsica Sera samedi. Il revient sur l’accident de canyoning de Soccia de mercredi et insiste sur la prise de conscience de tous et la mise en place d’un vrai système de prévention.
Le colonel Bruno Maestracci, directeur du service d’incendie et de secours pour la Corse, est l’invité du Corsica Sera samedi. Il s’est rendu, comme de nombreux pompiers, à la messe hommage aux cinq victimes de l’accident de canyoning de Soccia survenu mercredi. Il revient sur la crue imprévisible dans le canyon du Zoicu et celle du Fango, vendredi, et insiste sur la nécessaire prise de conscience de tous et de la mise en place d’un système de prévention efficace.
Doit-on repenser la sécurité dans ces massifs très fréquentés ? Doit-on repenser l’accès au massif de la montagne Corse ?
« Nous sommes dans les phases du deuil. Mes premiers mots vont pour les familles des victimes, j’ai beaucoup de compassion pour elles. Ils quitteront la Corse bientôt et j’espère qu’ils pourront revenir. Après cette période de deuil et d’hommage, d’autres problématiques se posent. Il ne m’appartient pas seul de décider quoi que soit, je crois que ça doit être fait de façon collégiale. […] On peut imaginer que l’on puisse faire comme dans un hôpital, où quand des médecins étrangers viennent, les personnes locales vont leur autoriser à exprimer leur art, mais en exprimant aussi les contraintes locales [le guide de canyoning qui est mort lors de l’accident de Soccia était originaire de Nantes]. Il faut qu’il y ait une acclimatation aux conditions d’exercices locales. C’est vrai en montagne, c’est vrai en mer, c’est vrai partout. »
Vendredi 30 baigneurs, quasiment surpris par une nouvelle crue, ont dû être évacués des rives du Fango. Est-ce que les vacanciers sont assez sensibilisés ?
« Napoléon disait : ‘L’expérience, c’est la science des imbéciles.’ On se rend compte que 48 heures après ce drame qui a frappé la Corse-du-Sud, un drame identique aurait pu se jouer en Haute-Corse. Il a pu être évité une nouvelle fois, mais je pense qu’il doit y avoir une prise de conscience, avant peut-être même de changer les choses. Est-ce que les vacances ne devraient pas être aussi prises avec le respect des contraintes ? Et donc parfois ne pas poursuivre des activités qu’on avait commencées ? »
Est-ce que certains professionnels qui décident d’abandonner, par exemple, leur journée de pêche, pour se mettre à l’abri lorsqu’ils entendent l’orage ont raison ?
« Du moment que l’on va vers plus de prévention et de précaution, je donnerai toujours raison à ceux qui pratiquent ce raisonnement. La difficulté, c’est que quand on a une raison, c’est que l’on a des informations. La question qui se pose, c’est : ‘Est-ce que tout le monde avait l’information nécessaire au bon moment ?’ Une fois que l’événement est passé, c’est facile de refaire l’histoire. Par exemple, est-ce que les gens du Fango savaient ce qu’il s’était passé à Soccia ? Est-ce que les gens du Fango savaient qu’il y avait eu de la pluie en amont ? Et est-ce que les gens du Fango ont été alertés ? C’est comme pour la prévention incendie, est-ce qu’on peut mettre un pompier derrière chaque arbre ? La réponse est non.»
Samedi, la préfète de Corse, Josiane Chevalier, a annoncé qu'une réunion sera organisée en septembre afin qu’un retour d’expérience soit fait sur l’accident de Soccia. « Il importe de tirer les enseignements de cette tragédie, afin de déterminer les recommandations susceptibles de renforcer la sécurité de ce type d'activités », indique la préfecture. Cette réunion se tiendra en présence des services ayant participé aux secours ainsi que Gilles Simeoni, président du conseil exécutif de Corse et des parlementaires et élus concernés.