Coronavirus : la Corse agricole en mal de main d’oeuvre

La fermeture des frontières extra-européennes prive les agriculteurs de  main d’oeuvre. Pour remplacer les 250 saisonniers attendus dans l’île pour planter et récolter, Pôle Emploi a constitué un vivier de volontaires locaux. Mais leur inexpérience freine les embauches. 

« On a réduit la voilure de 10 hectares pour les plantations de melons ».
Ce technicien agronome de la plaine orientale se veut pragmatique.
Certes, les récoltes ne seront pas à la mesure des espérances, mais sur cette vaste exploitation de fruits et légumes de Venzolasca, l’activité se poursuit vaille que vaille.
 
« Grâce à une dérogation du préfet, nous avons pu conserver notre équipe embauchée pour les clémentines qui n’était pas encore repartie, explique Christophe Avenas. « Ils sont moins nombreux que pour planter et récolter les melons, il a fallu s’adapter. Et il nous manque encore une dizaine de personnes ».
 

Pour pallier cette pénurie, cette entreprise agricole a annulé une partie de ses commandes de plants.
«Une petite partie seulement. Nous avions des engagements auprès des pépiniéristes, il fallait les respecter ». 
 

Une centaine de permis de travail prorogés 

Dans la plaine orientale, ces difficultés de recrutement ne laissent pas de répit aux agriculteurs.
Il est temps de planter, mais on manque terriblement de main d’oeuvre pour le faire.

La fermeture des frontières extra-européennes prive l’agriculture corse des travailleurs étrangers.
Or, en cette période, les besoins de main-d’œuvre saisonnière sont estimés à 250 personnes.
Pour plus de la moitié, ils devaient venir travailler chez les maraîchers, concentrés dans ce secteur de l’île. 
 

Sollicitée dès le mois dernier, la préfecture de la Haute Corse a accepté de proroger les permis de travail d’ouvriers agricoles étrangers présents en Corse pour les clémentines et les pomelos.
Cela concerne plus d’une centaine de personnes, selon la Direccte (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi); dans 13 cas, les ouvriers agricoles ont été transférés vers d’autres exploitations qui avaient besoin d’eux.

Mais cela reste insuffisant pour satisfaire les besoins de main-d’œuvre du monde agricole.
Certains agriculteurs estiment même qu’ils vont perdre cette année la moitié de leur chiffre d’affaires faute de pouvoir produire.
 

Une main d’oeuvre locale volontaire...

Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer en ces périodes de chômage technique ou partiel, la main-d’oeuvre n’est pas facile à recruter en local, notamment parce que les plantations comme les récoltes nécessitent des qualifications.

« On avait un besoin urgent de personnel pour la récolte des fraises en champ », explique par exemple Christophe Avenas.
«On a trouvé quatre personnes ici, c’est déjà bien, mais on sait que même formées, elles n’auront pas le rendement de nos saisonniers habituels, qui viennent depuis dix ans, ont l’expérience et le savoir-faire. Maintenant, on préfère avoir une récolte, et qu’ils prennent leur temps, plutôt que de faire vite et d’abimer les fruits et les plants ». 

Depuis la fin mars, Pôle Emploi s’est organisé pour répondre à cette demande, en parallèle de la mise en place de la plateforme Mobilisationemploi par le gouvernement.
 

« On a recensé toutes les personnes qui pourraient faire ces travaux agricoles, nos conseillers le proposent à tous, même lorsque cela ne correspond pas aux qualifications », explique Béatrice Masala, responsable d’équipe de l’agence Pôle Emploi du grand Bastia.
« Nous avons constitué un vivier de volontaires, avec des demandeurs d’emploi, mais pas seulement, et même réussi à faire des embauches ».

Actuellement, cette agence qui couvre un secteur qui s’étend au sud jusqu’à San Giuliano, a recensé 91 postes sur les 29 exploitations agricoles de son bassin, et mis 105 personnes en relation sur les offres d’emploi.
Les postes sont à pourvoir de maintenant jusqu’à juin compris.

« On a des comptables, des agents immobiliers, des maîtres nageurs, des cuisiniers qui se portent volontaire. Parfois même, les conjoints de demandeuses d’emploi se proposent quand on appelle ».
 

... Mais non qualifiée 


Pour autant, la bonne volonté de chacun ne suffira pas forcément à sauver les récoltes.
Former des gens prend du temps, coûte de l’argent, ce n’est pas forcément rentable pour quatre mois de travail.

« Le premier frein, c’est l’inexpérience, souligne encore la responsable de Pôle Emploi. Ouvrier agricole est un vrai métier, en plus de la cueillette, il y a l’entretien, les plantations. Les exploitants considèrent qu’il faut au moins une semaine de formation. Ensuite, même s’il s’agit de volontaires, les exploitants craignent de les voir partir du jour au lendemain quand leur entreprise les reprendra ou qu’une offre qui leur correspond se présentera ».

 
L'actualité "Société" vous intéresse ? Continuez votre exploration et découvrez d'autres thématiques dans notre newsletter quotidienne.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
Corse ViaStella
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité