Le communiqué laisse planer la menace d'un retour de la lutte armée, et s'en prend à la majorité nationaliste et à son leader, Gilles Simeoni. On pouvait imaginer qu'en cette rentrée, il agiterait le monde politique insulaire. On imaginait mal.
La prise de parole virulente du FLNC, hier, n'a pas vraiment suscité de réaction chez les élus corses. Qui sont pourtant prompts, habituellement, à tweeter à la moindre occasion. Pas le moindre commentaire n'a été publié sur les réseaux sociaux.
Silence natio
Nous avons sollicité l'ensemble des forces nationalistes de l'île, qui sont au centre du communiqué du mouvement clandestin. Sans succès. Nos messages sont restés lettre morte du côté de Corsica Libera et de Core In Fronte. Jean-Christophe Angelini, quant à lui, s'est dit prêt à donner son opinion, mais a repoussé à plusieurs reprises le moment de le faire. On peut imaginer qu'il consulte ses proches au PNC. C'est le genre de réaction dont on pèse chaque mot.
Quant à Gilles Simeoni, nommément visé, et cela à trois reprises, dans le communiqué du FLNC, il est à Marseille dans le cadre du Congrès mondial de la Nature, et nous n'avons pas réussi à le joindre.
Jean-Félix Acquaviva, le seul autre élu insulaire cité, accompagnait Roselyne Bachelot en Balagne."Ce n'est ni le temps, ni le lieu", nous a-t-il répondu lorsque nous lui avons demandé ce qu'il pensait des propos des militants clandestins.
La droite discrète, la gauche aux abonnés absents
Chez les natios, donc, silence radio.
Les camps d'en face ne sont guère plus loquaces. Du côté de ce qu'il reste de la gauche insulaire, pas de réaction. Et à droite, l'immense majorité des élus se font également discrets.
Laurent Marcangeli, qui, jusqu'au communiqué du Front, était en droit de se considérer comme le principal opposant à Gilles Simeoni, a signé un communiqué de presse à la tonalité plutôt attendue :
« C’est avec gravité et inquiétude que j’ai pris connaissance du communiqué. La Corse ne doit pas revenir en arrière avec une reprise d’actions clandestines que nous avons malheureusement connues dans le passé. Dans un monde secoué par de nombreuses crises, il n’est pas envisageable de concevoir l’avenir de nos enfants en dehors de la paix et d’une vie politique uniquement composée d’acteurs ayant pour objectifs le combat démocratique à visage découvert. »
En quête d'une autre réaction possible, nous avons essayé de nous tourner vers Roselyne Bachelot. Elle est membre du gouvernement, et c'est peu de dire qu'une nouvelle fois, Paris a été menacé par le FLNC. Quand nous lui avons posé la question, la ministre de la Culture, surprise, a botté en touche : "vous me pardonnerez de ne pas intervenir sur les sujets qui relèvent de la politique générale. Moi je suis venu ici pour parler de politique culturelle." On l'aura compris, le sujet est suffisamment épineux pour ne pas s'y aventurer sans parachute. Le silence de la ministre, en tout cas, est bien plus compréhensible que celui de la classe politique insulaire.
Un proche de Gilles Simeoni, hors micros, lâche, un sourire ironique aux lèvres : "pourquoi voulez-vous que les adversaires de Gilles et ses anciens alliés disent quoi que ce soit ? Le communiqué attaque tellement le président de l'Exécutif qu'ils n'ont plus qu'à se taire, et regarder faire !"
On imagine quand même que la question finira tôt ou tard par s'inviter dans les débats de l'assemblée de Corse, qui effectuera sa rentrée fin septembre...