Huit mois après leur élection, les trois députés nationalistes ont entamé leur travail de « lobbying » à l’Assemblée nationale, pour faire avancer le dossier corse. Des revendications pourtant loin des débats parlementaires quotidiens.
Ils sont trois : Jean-Félix Acquaviva, Michel Castellani et Paul-André Colombani. Trois nationalistes entrés à l’Assemblée nationale en juin dernier. Ils ont été élus pour mettre en avant la spécificité de la Corse.
Mais leurs revendications portent peu au sein du Palais Bourbon. Aux yeux des autres députés et des médias, ils apparaissent comme les représentants d’un exécutif territorial, bien loin donc, des préoccupations quotidiennes des parlementaires.
Se montrer et se faire entendre
Perdus dans la masse des 577 députés, les nationalistes viennent dans l’hémicycle avec une stratégie claire : dès que possible intervenir pour démontrer « la particularité » de la Corse.
#PLF2018 #DirectAN Le Président Macron nous a parlé de « pacte girondin », nous avons pu y croire, un temps, mais ce n’est au final qu’un écran de fumée #DirectAN #corse #corsica #collectivites @Regionsdefrance @l_amf pic.twitter.com/J7qx3MPfp7
— Jean Felix Acquaviva (@JF_Acquaviva) 15 décembre 2017
Lors d’une session consacrée au cadre géographique des prochaines élections européennes, Jean-Félix Acquaviva en profite pour rappeler la position nationaliste : la corse circonscription à part entière. Ce n'était pas du tout au menu, cela n'aura aucun impact législatif mais qu'importe. « On a défendu le fait que la Corse était dans une situation particulière. Ensuite, comme notre amendement n’a pas été retenu on a laissé passer la loi » se satisfait, Michel Castellani.
Faire progresser les revendications nationalistes corses à l'Assemblée nationale française : le paradoxe est assumé. Jusqu'à présent les « natios » n'ont d'ailleurs même pas cherché à coopérer avec celui qui est devenu « l'autre député corse », Jean Jacques Ferrara membre des Républicains.
Objectif : réviser la Constitution
Quand ils ne sont pas à l’Assemblée, les députés passent leur temps dans leurs bureaux situés dans la rue adjacente. Avec quatre de leurs collaborateurs ils peaufinent textes et rendez-vous, et découvrent pas à pas l’institution. André Colombani détaille :
Le système est complexe. Même si on a un accueil très favorable individuellement au niveau des députés, ils fonctionnent dans des grands groupes avec des disciplines de groupes. Donc c’est très difficile de faire changer les positions mais on ne désespère pas.
Il y a deux mois, Gilles Simeoni, le président de l'exécutif corse territorial, interviewé par Jean-Jacques Bourdin, affichait un objectif ambitieux : obtenir la majorité des 3/5 de parlementaires (députés et sénateurs) pour réviser la Constitution et y inscrire la spécificité de la Corse.
« Lobbying » pour trouver des alliés
Depuis, le débat s'est précisé autour des articles de la constitution pour la Corse : 72 coté gouvernement contre 74 coté nationalistes. La France insoumise prône l’article 74 mais moins par ralliement aux députés nationalistes que par opposition à Emmanuel Macron et par pur jacobinisme disent-ils.
Quid des autres députés ? L’infatigable Michel Castellani n’oublie pas, en toute occasion de faire son « lobbying » selon ses mots. Il entame des discussions avec ses confrères pour tenter de les convaincre, mais les résultats sont peu probants.
Rencontre avec des députés de différents groupes. Sensibilisation à notre analyse de la question corse. Ci vole a suminà ! #PèACorsica pic.twitter.com/ZCpW1iqsFH
— Michel Castellani (@Castellani_) 8 novembre 2017
« On peut parfaitement augmenter les compétences de nos collègues de l’Assemblée territoriale corse sans modifier la Constitution », indique Charles de Courson député de la Marne (UDI). Jean-Paul Dufrègne, député de l'Allier (Gauche Démocrate et républicaine) concède un peu gêné qu’il penche pour l’article 72. Voilà nos députés assez loin du but fixé des 3/5e du Congrès…
Les représentants de l’exécutif corse
Le dossier corse ne se joue pas vraiment à l'Assemblée et la presse perçoit les trois députés nationalistes comme les représentants d'un exécutif régional, bien loin des questions qui animent, au quotidien, le débat parlementaire.
Arnaud Ardouin, journaliste à La Chaine Parlementaire décrypte leur image :
Eux ce qu’ils nous renvoient c’est des revendications qui sont liées intimement à leurs débats insulaires : l’écologie, la fiscalité... Mais qui sont propres à des votes qui ont déjà eu lieu à l’Assemblée territoriale. Donc on ne peut pas se permettre d’inviter des députés corses sur des thématiques très générales. Et d’ailleurs ils ne viendraient pas !
Un hiatus que tentent de combler ces députés très particuliers, même si ce décalage est inhérent à leur projet politique.