Lundi 26 février, l’économiste Sauveur Giannoni a tenu une conférence, à Ajaccio, sur l’impact d’Airbnb sur les prix de l’immobilier en Corse. Ainsi, il est en moyenne plus fort dans l’île qu'à Barcelone ou au Portugal, mais avec des nuances importantes sur le territoire.
Entre 2014 et 2019, en Corse, l'impact des locations saisonnières sur les prix de l'immobilier est enfin mesurable et mesuré. Pour cela, il a fallu une batterie de calculs, explique l'universitaire Sauveur Giannoni : 10 % de logements Airbnb en plus, c'est en moyenne 1,5 % d'augmentation des prix. Cela semble peu, mais c'est beaucoup plus qu'à Barcelone ou au Portugal, des villes et pays étudiés par d'autres équipes internationales.
L'hyperspécialisation touristique de l'île explique ce super impact. Partout, c'est dans les centres-villes anciens que la demande est forte et que l'offre des biens en locations saisonnières explose. « Ces biens, qui étaient peu chers avant Airbnb, deviennent très rentables avec Airbnb. On peut les rénover à moindre coût et les louer très cher. Dans ces endroits-là, on observe une véritable gentrification du centre-ville. C’est vrai à Ajaccio et c’est vrai également dans le centre-ville bastiais », souligne l’universitaire.
Mais depuis l'étude, alerte un hôtelier dans la salle, le nombre de logements en location saisonnière a encore gonflé de 50 % à Ajaccio. Professionnels, étudiants, habitants, quelques élus... Le public apprend, surpris, que l'impact des prix est plus fort dans les communes de l'intérieur.
Des outils de régulation existent
C'est qu'Airbnb a créé le marché de la location meublée dans ces villages. Un type de location qui n’existait pas avant. « J’exerce principalement sur Ajaccio. Je pense qu'Airbnb assèche l’offre sur le marché et avec une analyse comme ça, on s’aperçoit que ce n’est pas aussi net. On se rend compte que c’est dans des secteurs où il y a moins de demandes qu'Airbnb a le plus d’effets sur les prix », explique Luc-Vincent Rochetti, agent immobilier qui a suivi la conférence.
Un impact différencié selon les territoires, voilà de quoi poser la question des outils de régulation. Ils existent dans la main du bloc communal et peuvent justement s'adapter quartier par quartier. À Ajaccio, les élus de l'opposition les demandent, en vain pour l'instant. « J’aurais préféré que cette conférence ait lieu la semaine dernière puisque nous avons eu notre débat à la mairie sur les meublés de tourisme. Ce que je retiens, c’est que c’est une problématique qui est vraiment très complexe », déclare Danielle Antonini, élue Fà Populu Inseme à l’Assemblée de Corse.
Quant à l'abaissement de la niche fiscale pour les revenus locatifs des meublés de tourisme, décidée il y a quelques semaines à Paris, l'universitaire n'y croit pas beaucoup. L'avantage pour les propriétaires serait, pour lui, encore trop important.
Le reportage de Florence Antomarchi et Mathias Landry :