L’observatoire-conservatoire des insectes de Corse a dressé deux listes rouges pour les papillons et libellules. Cet état des lieux permettra à l’institution de mettre en place des mesures de prévention. Parmi les espèces répertoriées, certaines sont en danger d’extinction.
Une extinction de masse. La sixième. Selon certains scientifiques, les insectes pourraient disparaître.
La Corse n’échappe pas à la menace. Afin de permettre la mise en place de mesures de prévention adaptées, l’observatoire-conservatoire des insectes de Corse (OCIC) de l’Office de l’Environnement a établi, pour la première fois, deux listes rouges ciblant les papillons et les libellules.
Le constat est préoccupant. Sur les 64 espèces de papillons répertoriées dans la région, quatre sont en « danger d’extinction » dont la Zygène de Corse, un spécimen endémique à l’île et à la Sardaigne. Leur disparition est principalement due « à la destruction et la dégradation des habitats liées aux incendies. Même si ces dernières années, ils sont mieux maîtrisés et détruisent des surfaces moins importantes », tempère Cyril Berquier, en charge des listes rouges à l’OCIC.
Chaîne alimentaire
Pour les libellules, le danger réside dans l’altération des zones humides naturelles. « Cela passe par l’urbanisation ou l’utilisation de certains insecticides. Mais il y a un autre problème que l’on juge sérieux qui est l’introduction des poissons et des écrevisses exotiques. Ces espèces engendrent des modifications sur les écosystèmes », précise Cyril Berquier. Résultats : sur les 45 espèces de libellules étudiées dans l’île, quatre sont en « danger critique d’extinction » ou en « danger d’extinction ».
Un déclin inquiétant pour les entomologistes qui insistent sur l’importance des libellules dans la chaîne alimentaire. « Toute atteinte portée à ce groupe a un impact important sur les maillons connectés par cette chaîne, soit au niveau des proies ou au niveau des prédateurs », alerte Marie-Cécile Andrei-Ruiz, entomologiste et responsable de l’OCIC.
Progression des espèces afro-tropicales
La hausse des températures a aussi ses conséquences. « Nous sommes dans une période d’évolution de la faune insulaire. Aujourd’hui de nouvelles espèces, favorisées par les évolutions climatiques que connaît l’île, s’implantent et progressent, car de nouveaux habitats sont disponibles », indique Marie-Cécile Andrei-Ruiz.
Et elles progressent vite. Ces dernières années, la faune corse a augmenté de 10 %, suite notamment à l’arrivée de cinq nouvelles espèces d’insectes afro-tropicales. Entre 2012 et 2015, trois d’entre elles se sont implantées à un an d’intervalle. Une première.
La situation pourrait encore évoluer. Certains spécimens, installés en Sardaigne, pourraient atteindre la Corse dans les prochaines années. « À l’inverse, des espèces anciennement présentes, mais moins bien adaptées à ces nouveaux changements vont certainement régresser en même temps que leurs habitats », complète-t-elle.
Quelques gestes simples permettent de favoriser le maintien de certaines espèces comme le développement de l’agriculture biologique et extensive. L’OCIC appelle également à la protection des milieux fleuris dans les villes, les villages et les jardins. « Pour donner un petit coup de pouce à la biodiversité dite ‘ordinaire’ si précieuse pour les écosystèmes », soutient Marie-Cécile Andrei-Ruiz.
L’institution a créé plusieurs pages Facebook dédiées à ces listes rouges. Elles permettent d’une part de sensibiliser à la problématique, mais également d’échanger des informations sur les papillons et les libellules de Corse et aider à leur identification.