L'espadon de Méditerranée bientôt protégé par des quotas de pêche

Après le thon rouge, l'espadon méditerranéen : une cinquantaine de pays ont décidé lundi d'instaurer à partir de 2017 des quotas pour ce poisson victime de surpêche qui n'avait jamais jusqu'à présent bénéficié d'une telle mesure de protection.

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Un population en baisse de 70% en 30 ans

Au terme d'une réunion d'une semaine à Vilamoura, au Portugal, la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (Cicta) a fixé le quota pour 2017 à 10.500 tonnes, soit à peu près le volume actuellement prélevé. 

Dans le cadre d'un plan de reconstitution sur 15 ans (2017-2031) de la population d'espadon, ce quota sera réduit de 3% par an, de 2018 à 2022. Il sera ensuite réexaminé à la lumière d'une évaluation scientifique du stock reproducteur, prévue pour 2019.

C'est "un pas décisif vers la préservation du stock", a estimé l'Union européenne, à l'origine de ce plan. Les pêcheurs de l'UE réalisent près de 80% des prises. Selon les ONG, il était temps d'agir: en 30 ans, la population de ce poisson très prisé a chuté de 70%. Et 70% des poissons capturés ont moins de trois ans, ce qui signifie qu'ils ne sont pas arrivés à maturité pour se reproduire.

Elles ne cachent pas cependant une certaine déception du fait que le quota pour 2017 est sensiblement égal aux volumes pêchés chacune de ces quatre dernières années (environ 10.000 tonnes). "C'est un peu bizarre" et une baisse de 3% par an à partir de 2018, "c'est très faible", admet Alessandro Buzzi, du WWF. "A l'évidence, c'est un compromis pour parvenir au consensus, sinon la proposition était trop difficile à faire adopter par tous les membres".

"Très faible"

Un premier texte de l'Union européenne proposait d'abaisser les quotas de 25% en cinq ans, précise M. Buzzi. Malgré tout, ajoute-t-il, "nous sommes plutôt contents". "C'est un premier pas vers la reconstitution du stock", se félicite aussi Ilaria Vielmini, de l'ONG Oceana. "Nous espérons que c'est un tournant dans la manière dont la Méditerranée a été traitée jusque-là", dit-elle. 

Ce plan "arrive une décennie trop tard", déplore cependant Lasse Gustavsson, directeur exécutif de cette ONG pour l'Europe, dans un communiqué. "A l'occasion de la Journée Mondiale des Pêches, nous aurions espéré un plan de crise plus ambitieux, (il) est trop limité, trop loin des avis scientifiques et met encore le stock en péril".

Pour Bertand Wendling, de l'organisation de pêcheurs française Sa.Tho.an, "il fallait faire en sorte que les captures ne s'emballent pas, avec les filets dérivants utilisés notamment par le Maroc et la Tunisie". Il "prend acte" de ce "cadre réglementaire" mais se dit "extrêmement inquiet" de la répartition à venir entre les différents membres de la Cicta.

Si un consensus a été atteint sur le quota, sa répartition pourrait en effet donner lieu à de vives discussions. L'Italie réalise près de la moitié des prises (45%), suivie du Maroc (14%), de l'Espagne (13%), de la Grèce (10%) et de la Tunisie (7%). La France, dans une moindre mesure, est elle aussi concernée. Présent en Corse, on le rencontre en profondeur, à 100 ou 150 mètres. 

La France moins concernée

Un groupe de travail doit être constitué début 2017. Outre les quotas, le plan reconduit ou améliore des mesures déjà en vigueur comme une interdiction de pêche trois mois par an et une taille minimale pour les poissons pêchés, qui avaient contribué à limiter les volumes capturés ces dernières années.

Rien de neuf en revanche pour les quotas de thon rouge de Méditerranée et de l'Atlantique est, fixés pour trois ans par la Cicta en 2014, si ce n'est une petite rallonge accordée à l'Algérie.

"Le plan de reconstitution est toujours en place, en attentant l'évaluation des stocks" en 2017, indique M. Buzzi. En 2014, les quotas avaient été fixés à 16.142 tonnes pour 2015, 19.296 tonnes en 2016 et 23.155 tonnes en 2017. Concernant le thon obèse, autre espèce surexploitée, "il n'y a eu aucune nouvelle décision de gestion pour améliorer" son stock, a déploré l'ONG Pew, "très déçue".

Elle déplore aussi que pour les requins bleus, la Cicta se soit contentée de fixer un niveau de captures à partir duquel elle pourrait décider de nouvelles mesures.
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