Le bastiais Philippe Alessandri, l'auteur de Monsieur Anatole, est l'invité du festival littéraire de Lumio au côté d'un prix Goncourt, d'un prix Femina et d'un académicien. Une belle reconnaissance pour le quinquagénaire, et son roman sur un serial killer pas comme les autres.
Toujours tiré à quatre épingles, Philippe Alessandri n'est jamais passé inaperçu dans les rues de Bastia.
Mais depuis quelques semaines, ce n'est pas uniquement son allure de personnage tiré d'un roman d'Evelyn Waugh qui suscite l'intérêt.
Il y a quelques mois, alors que l'épidémie de Covid-19 s'étendait sur le monde, celui qui, dans une autre vie, était voyant professionnel, publiait son premier roman, Monsieur Anatole.
Il serait dommage de raconter l'histoire, et de dévoiler ainsi les multiples chausse-trappes laissées par l'auteur.
Qu'il nous suffise de dire que l'on suit le parcours d'un modeste employé de banque, à la vie sociale désertique, qui ne rechigne pas à se livrer, de temps en temps, au meurtre.
Un serial-killer dans les rues d'une ville de Bastia, jamais citée mais très reconnaissable ?
De quoi donner envie d'en savoir plus sur Philippe Alessandri, qui sera ce soir l'invité du festival E Statinate, à Lumio.
Six mois après la sortie de Monsieur Anatole, quel regard portez-vous sur cette première expérience d'écrivain ?
j'ai été extraordinairement surpris par le retour des lecteurs. C'est le plus important. Les gens mettent 20 euros dans un livre, ce n'est pas rien. Ca a été une belle surprise. C'était un saut dans le vide, ce premier livre. L'histoire est assez particulière, en plus, mais c'est ce qui a plu aux gens, semble-t-il.
Le personnage est sombre, mais les gens l'ont pris en sympathie, surtout les femmes, ce qui m'a vraiment surpris. Je pensais qu'elles allaient le détester.
Je ne suis personne, je suis novice, alors voir un tel retour, c'est une très belle reconnaissance.
Comment le présenteriez-vous, ce monsieur Anatole ?Mon personnage est un Nolife, mais nous ne sommes tous des Nolife
C'est un être étrange, venu non pas d'un autre monde, mais de son propre monde.
Il regarde la société qui l'entoure avec une certaine curiosité, et une vraie distance.
Beaucoup de gens se sont reconnus dans ce personnage, et partagent son regard sur le monde.
C'est un Nolife, mais nous ne sommes tous des Nolife.
C'est un peu vous, monsieur Anatole ?
Pour éviter d'avoir des ennuis avec la police, je vous répondrai que non ! (Rires)
C'est une créature assez singulière, que j'ai créée en additionnant les traits de caractère de gens que j'ai connus, qui m'entourent... Mais il a sa cohérence, et je me suis beaucoup amusé à lui donner vie.
J'imagine qu'il y a un peu de moi, quand même...
C'est le premier qui est édité, mais cela fait 23 ans que j'écris. Je crois que ma vocation est venue à la lecture de Céline, Le Voyage... ou Mort à Crédit.
J'ai eu de longues périodes d'arrêt, mais j'ai écrit plusieurs autres livres, que je reprends, que je retouche, tout en gardant l'ambiance, et la trame. C'est ce qui s'est passé avec Monsieur Anatole. Lorsque je l'ai écrit, Jean Baggioni était président de l'exécutif. Imaginez, un peu !
Et pourtant, trouve un écho dans notre époque, des nationalistes au pouvoir en passant par votre personnage qui entasse du papier toilette chez lui de manière compulsive, comme beaucoup de nos concitoyens au début du confinement !
Il y a beaucoup de détails de ce genre qui ont interpellé les gens, c'est vrai !
Le fait que j'ai été médium professionnel a peut-être joué.
23 ans d'écriture avant d'être publié
Vous êtes ce week-end invité des Statinate, au côté de Jérôme Ferrari ou François-Henri Désérable...C'est très gratifiant, vraiment, de côtoyer des auteurs si prestigieux. Imaginez, il y a un an je n'avais même pas d'éditeur ! Alors si une voyante m'avait prédit une chose pareille...
Je vois ça comme une reconnaissance pour Monsieur Anatole, mais aussi pour ses lecteurs. Ils ont tellement fait pour le succès du livre, pendant une période difficile. C'est très important pour moi de les remercier.