Docteur Laetitia Mendella : "au CMPP de Bastia, un enfant sur cinq bénéficie d'une mesure de protection de l'enfance"

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Mercredi 3 avril était organisé un colloque sur les violences et psychotrauma chez l'enfant et l'adolescent. Devant une salle comble, une dizaine de spécialistes ont fait le point sur fléau encore trop souvent ignoré du grand public. Nous avons rencontré Laetitia Mendella, qui est à l'origine du colloque.

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Laetitia mendella est psychopsychiatre, directrice du Centre Médico-Psycho-Pédagogique et du Bureau d'Aide Spychologique Universitaire. C'est elle qui a ouvet les débats, avec un exposé sur ce que l'on entend par violences et psychotrauma afin de poser les fondations de la longue série d'interventions qui ont suivi. ...

La salle de l'Alb'Oru affichait complet depuis plus de trois semaines. Plus de 300 personnes, travailleurs sociaux, médico-sociaux, étudiants, médecins, personnel de l'hôpital, mais également des gens qui ne sont pas issus du milieu de la santé, parfois concernés au premier chef par la question.

ENTRETIEN AVEC LAETITIA MENDELLA

Le monde réuni à l'Alb'Oru vient rappeler l'importance du sujet abordé...
Et pourtant, cela reste un tabou. Les gens pensent, ou veulent penser, qu'en Corse cela n'arrive pas. Mais aucun territoire, aucun milieu social n'est épargné.

Dans quelle mesure ? 
En france, il y a 160 000 enfants qui sont vicitmes de violence sexuelle chaque année. Et ce n'est qu'un aspect des psychotrauma. Au CMPP de Bastia, par exemple, un enfant sur cinq bénéficie d'une mesure de protection de l'enfance. C'est énorme. C'est un enjeu sociétal et de sécurité publique très important. Alors cela valait le coup de mettre un coup de projecteur sur ces enfants-là.  

De quoi on parle, lorsque l'on parle de psychotrauma ? 
Ce sont des violences répétées, de la maltraitance à la maison, des violences sexuelles, à la maison ou ailleurs. Cela peut-être également du harcèlement scolaire. Mais il y a d'autres choses, comme la négligence, qui n'est pas vraiment une violence, puisqu'on parle d'un manque. Pourtant, elle entraîne énormément de troubles chez les enfants.

C'est beaucoup plus divers que ce que l'on pense parfois...
Vous savez, quand on parle de maltraitance, cela ne veut pas forcément dire que les parents sont de méchantes personnes, qui se livrent à des actes méchants, voire pervers, sur leur enfant. Cela peut également être des gens qui sont dans une situation psychique fragile, dans un contexte social fragile, et qui en arrivent à être débordés par leur quotidien. Ils contrôlent moins bien ce qui leur arrive, moins bien leurs pulsions, et ils peuvnet être violents avec leurs enfants. Notre rôle, ce n'est pas de stigmatiser les personnes.  

Quel est votre rôle ? 
Il y a l'information, la prévention, et puis le dépistage. Avant de soigner ces enfants, il faut les repérer. Et une fois qu'ils le sont, il faut savoi comment on peut les accompagner, et à qui on peut les adresser.

Dans quelle mesure les réseaux sociaux ont changé la donne ? 
Cela a eu un côté positif. #Metoo n'aurait pas eu un tem impact sans les réseaux sociaux. Mais ça a également aggravé la situation, en matière de harcèlement, et plus encore de cyberharcèlement. Avant, on rentrait chez soi, et on retrouvait son cocon, sa famille, son voisin, avec qui on jouait... Aujourd'hui, c'est fini. Il y a, avec les réseaux, une impossiblité de dire "j'éteins". Je les regarde, encore et encore. Et ça a des effets... L'année dernière, j'ai vu deux ados qui étaient harcelés, et qui ont essayé de se suicider. 

Souvent, ils ne se confient à personne. Ca aggrave encore les choses ? 
Au primaire, les enfants sont quasiment 80 % à parler de leur situation. Ils rentrent à la maison, et ils racontent ce qui leur arrive à leurs parents. Quand on est un enfant, on parle plus facilement, on a moins de pudeur. Et puis notre référent, ce sont nos parents. Quand on devient adolescent, notre référent, c'est notre groupe de pairs. On est en opposition avec ses parents. Il est plus difficile de trouver à qui se confier. 

On ne guérit pas, mais on apprend à vivre avec

Quand on est parent, à quel signe doit-on être attentif ? 
Le signe qu'on adolescent va mal, qu'il est harcelé, c'est souvent le changement de notes. Une baisse significative de sa moyenne. Et puis le repli sur soi. Que les ados s'enferment dans leur chambre, rien de plus normal. Mais s'ils ne veulent plus en sortir, c'est très inquiétant. S'ils refusent d'aller au foot, à la danse, au ciné avec leurs copains, ce n'est pas bon signe du tout. 

Peut-on guérir de ces psychotrauma ?
Il y a des facteurs de résilience. Pour faire simple, si vous avez eu une maman qui vous a bien couvé quand vous étiez petit, entre 0 et 3 ans, qui s'est bien occupée de vous, et que vous vous faites violer à 6 ans, vous avez plus de chance de vous en sortir que si vous avez eu une maman qui était très fragile et qui ne vous a pas donné les bonnes bases au départ. Heureusement, il y en a qui s'en sortent. 

Mais ils guérissent, ou ils apprennent à vivre avec ? 
J'ai plutôt tendance à penser que l'on apprend à vivre avec. On ne guérit jamais totalement de ce qui nous arrive, selon moi. En revanche, on apprend à vivre avec, et parfois, ça nous fait grandir...  

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