A l'âge de 93 ans, il laisse derrière lui une œuvre imposante, connue de tous. Il aura marqué de son empreinte le milieu artistique insulaire de la deuxième partie du XXe siècle.
« J’avais eu des professeurs de dessin, mais c’étaient des pédagogues. José Lorenzi, lui, est un artiste. Le voir faire, créer, cela nous décomplexait, c’était du vécu par l’exemple : outre son charisme, son humanité, c’est quelqu’un qui nous obligeait à nous surpasser. Avec José Lorenzi, on ne peut pas être moyen. Ou on est bon, ou on n’est rien du tout ».
Il y a quelques années, dans la monographie Insulaire, consacrée à José Lorenzi, le plasticien et cinéaste Ange Leccia racontait à quel point sa rencontre avec José Lorenzi avait été déterminante dans sa vie.
Mais la liste est longue de celles et ceux qui n'ont plus jamais abordé l'art de la même manière après avoir croisé la route du peintre, ou découvert son œuvre.
Passeur
José Lorenzi est né en 1929, à Bastia. Et il a consacré sa vie, longue de près d'un siècle, à la création, sous toutes ses formes. Après avoir, selon la légende, fait la découverte de la peinture à l'aquarelle, à l'âge de 6 ans, dans le Cap Corse, d'où il était originaire.
A 20 ans, il entre aux Beaux-Arts de Marseille, avant d'intégrer l'école des Beaux-Arts de Paris, un an plus tard. En parallèle, il est élève de l'Ecole Normale.
En 1958, il donne vie à la section artistique du lycée de Bastia, où il éveille une génération de Corses à l'art. Dans la foulée, il crée le groupe des "Centurions", un collectif expérimental de réflexion artistique.
Dans les années 60 bouillonnantes, il arpente les chemins de l'avant-garde, au côté de Daniel Buren, et multiplie les expositions de ses œuvres, nourries d'art conceptuel et d'installations. En Corse, mais également à Paris, à Berlin, à Florence...
José est allé jusqu'au bout d'une certaine recherche.
Ange Leccia
En parallèle, José Lorenzi s'engage en politique. En 1967, à 38 ans, il est adjoint de Jean Zuccarelli, et devient délégué aux affaires culturelles à la mairie de Bastia. Il est à l'origine du centre culturel, et de la MJC, qui deviendra, des années plus tard, le centre Una Volta.
L'année 1970 marque une rupture dans la carrière de José Lorenzi. Il est nommé proviseur au lycée de Strasbourg. La même année, il décide de poser les pinceaux. Durant 7 ans, "en surchauffe", selon ses propres mots, il ne va plus peindre.
En 1977, il revient en Corse, et renoue avec son art.
Essence primaire
Durant les années 80, José Lorenzi va s'investir sans compter dans le milieu artistique insulaire, avec la création de l'association Arte, l'installation du FRAC Corse, mais également l'organisation d'une exposition/colloque sur l'art contemporain, à Bastia, qui marquera les mémoires des amateurs d'art insulaires.
A la même époque, la peinture de José Lorenzi évolue vers une sorte de simplicité, d'évidence.
"José est allé jusqu'au bout d'une certaine recherche, et après, il s'est dit qu'il avait tout fait, dans un sens philosophique et artistique, que la boucle était bouclée, et qu'il allait retrouver une essence primaire, presqu'instinctive, du peintre. De la définition tranquille du peintre", raconte Ange Leccia dans Policr'omu, le documentaire que lui a consacré Jean-Charles Marsily.
Depuis, José Lorenzi, inlassable passeur d'idées, libre-penseur, érudit et audacieux, n'a jamais cessé de créer, et d'exposer. Ses tableaux, baignés de lumière et de Méditerranée, immédiatement reconnaissables, sont connus de toutes et de tous en Corse, et célébrés bien au-delà de l'île.
José Lorenzi s'est éteint, à l'âge de 93 ans, à Bastia. Il aura été l'un des artistes les plus importants du XXe siècle insulaire.