Libération de la Corse : l'histoire dramatique de trois résistants à Scolca

Les Corses, au front au côté de l'armée de Libération pour combattre les soldats allemands, ont payé un lourd tribut lors de la Seconde guerre mondiale. Certains, faits prisonniers par l'ennemi, ont été abattus sans autre forme de procès. Récit.

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Dès le débarquement des troupes italiennes en Corse, le 11 novembre 1942, un mouvement de résistance se développe dans toute l’île.

Moins d’un an plus tard, à partir du 9 septembre 1943, comme partout ailleurs, en Corse les hommes reçoivent l’ordre d’insurrection. À quelques kilomètres de Barchetta, les habitants de la pieve de la Custera s’organisent.

Ceux du village de Scolca sont particulièrement actifs. Le 15 septembre 1943, une dizaine d’hommes sont en embuscade sur la route qui surplombe Barchetta.

Parmi eux, quatre sont arrêtés et faits prisonniers par les Allemands, les armes à la main. Ils sont amenés à Barchetta où les ennemis occupent l’ancienne usine. Les résistants subissent alors un interrogatoire musclé. Les Allemands sont ivres, peut-être pour se donner du courage, en raison de ce qui va suivre...

Une course contre la mort

Paul Graziani, conseiller municipal de Scolca, a travaillé pendant des années sur ce sujet : " Une dizaine de personnes ont voulu faire acte de résistance et parmi eux, quatre ont été amenés à Barchetta pour y être exécutés..."

Trois d’entre eux sont abattus : "L'un d'eux, un jeune garçon, Pierre-Paul Battistini, âgé à l'époque de 17 ans et demi à peine, a pu s'échapper… Un acte héroïque" , raconte avec émotion Paul Graziani. 

Pour le jeune homme, une course contre la mort débute dans le maquis : "Il court et emprunte un sentier en contrebas de la route. Il saute dans le ravin de la rivière Agumizza et tombe dans un trou recouvert par une végétation dense ; puis il bondit vers la rivière. Lors de sa fuite il essuie plusieurs tirs de mitraillette et de grenade. Il reçoit même une balle dans la main droite", détaille le Scolcais Paul Graziani.

Pierre-Paul Battistini réussit à échapper aux Allemands et à rejoindre le village de Prunelli-di-Casaconi, où il sera recueilli, soigné, caché pendant plusieurs semaines… Il survit, miraculeusement, grâce à la solidarité de la pieve.

Si cette histoire peut être racontée aujourd'hui, c'est grâce à une passion de famille : "Le gros du travail historique, c'est mon père qui l'a réalisé, le docteur Graziani. Il était anesthésiste mais il a passé sa vie à faire des recherches sur son temps libre. Il a aussi été maire du village pendant 18 ans. J'ai pris la suite, naturellement", témoigne Paul Graziani

Crime de guerre

L'exécution de Scolca est l'une de ces exécutions sommaires, c’est-à-dire sans jugement, qui se déroulent durant la libération de la Corse. Des événements "qu’on ne peut pas qualifier de rares mais qui ne sont pas du tout anodins : ce sont des crimes de guerre, selon le droit international", martèle Sylvain Gregori, directeur du musée de Bastia, spécialiste de la résistance en Corse et originaire de Scolca.

Une tragédie de ce type a également eu lieu au défilé de l’Inzecca, d’autres cas ont été recensés dans l’Alta Rocca.

En temps de guerre, la vallée du Golu a une importance capitale : elle permet de contrôler l’accès à Ajaccio. Barchetta constitue un avant-poste stratégique nécessaire pour tenir Casamozza, au confluent des routes de Bastia, Ajaccio et Bonifacio.

Le 8 septembre, l’armistice entre la France et l’Italie est signé. Toutes les communes de l’île célèbrent un rapprochement officiel entre les Italiens et les Corses, déjà engagé depuis plusieurs mois. Les Allemands en revanche multiplient les assauts contre leurs anciens alliés ; en particulier le 12 septembre, lors de la bataille de Casamozza. 75 Italiens y trouvent la mort.

Des Italiens, probablement repliés lors de cette bataille trouvent alors refuge à Scolca, dans l’église transformée en hôpital de campagne : "Le village a vraisemblablement même accueilli des médecins et infirmiers italiens en renfort", avance Sylvain Gregori.

Tempu di u ricordu

Aujourd’hui, cette histoire est peu à peu oubliée, faute de traces écrites. Sylvain Gregori le souligne : "Les témoins directs ont disparu. Il y a un fort enjeu à  faire vivre cette mémoire". 

Chaque année, depuis, la commune rend hommage à ce pan d'histoire.

(Cet article a été initialement publié le 24/09/2023, à l'occasion des 80 ans de la libération de la Corse)

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