Le Bocognanais Philippe Antonetti a eu mille parcours. Peintre, bédéiste, illustrateur, dessinateur d'audience, cet artiste reconnu touche à tout. Avec toujours la même obsession d'un trait juste, accessible et vivant.
À 59 ans, Philippe Antonetti a eu mille parcours. Peintre, bédéiste, illustrateur, il a depuis longtemps abandonné chevalets et prestigieuses galeries internationales pour des formes d'expressions plus accessibles, plus vivantes, mais tout aussi exigeantes.
Armé « d’une simple feuille de papier, un crayon et trois couleurs », il retrace ainsi depuis plusieurs années en images les grands procès qui ont marqué la Corse au cours des deux dernières décennies. Il est ce qu'on appelle un dessinateur d'audience.
« Dans le dessin d'audience il y a cet aspect social, sociétal, et humain… Cette souffrance, ces histoires qu'on raconte, ces trucs qui n'arrivent pas qu'aux autres en fin de compte, raconte-t-il. On est témoin privilégié de tout ça, et on doit le restituer de façon juste.»
Discret, Philippe Antonetti parle peu, mais se définit pourtant comme narrateur. Son métier, c’est l’expression dessinée.
Il n’y a qu’une seule info par image, mais il faut qu’elle soit forte et pertinente
Le principe est de raconter simplement les choses, tout en restant complet et crédible. Un exercice qui, il l’assure, nécessite la plus grande rigueur : « Il n’y a qu’une seule info par image, mais il faut qu’elle soit forte et pertinente. »
Ancré dans le quotidien des gens
L’artiste Bocognanais considère qu'il faut vivre pour avoir des choses à dire. Ce qu'il aime, c'est inscrire son travail dans le quotidien des gens. Comme au travers de peintures murales, par exemple : son chef d’œuvre, dans le registre, c’est celle réalisée en 2004 dans le bar de son ami Joseph Bisgambiglia.
La fresque, qui s’étend d’un pan à l’autre d'un mur, aligne une ribambelle de personnages, aux histoires et horizons très différents. Staline, Mao, et Arafat côtoient ainsi des habitants de la commune.
La peinture est devenue une institution. Et ceux qui y sont représentés le prennent, la plupart du temps, comme un honneur. Certains ont même demandé à y être rajouté. « Un jour, l’ancien maire de Bastia, Emile Zuccarelli, a demandé s’il pouvait être sur la fresque, se souvient Joseph Bisgambiglia. Alors on l’a rajouté.»
Récemment, un nouveau personnage y a fait son apparition. C’est le premier en douze ans : Gilles Simeoni, président de l’exécutif de Corse. Mais plutôt qu’en costume-cravate, c’est sous forme de diablotin que Philippe Antonetti a choisi de le représenter.
« Il a sa place sur la peinture murale, mais avec les diablotins, plaisante l’artiste. Maintenant, s’il veut redescendre sur terre, libre à lui.»
Rêve de grand écran
Lorsqu'il ne traîne pas ses pinceaux dans les bars et les tribunaux, Philippe Antonetti cherche de nouvelles formes d'expressions. Dernier projet en date: un objet situé entre le story board et la bande dessinée, un western corse que l'artiste rêve de voir porter à l'écran.
Baptisé Corsica 1919, le livre raconte l'histoire de deux hommes qui traversent une Corse dévastée au lendemain de la Grande guerre. Pour l'instant, l'adaptation au cinéma est encore loin, mais qui sait ?
En attendant le grand écran, Philippe Antonetti travaille sur ses planches, et cherche, c'est au final tout ce qui compte, le trait le plus juste.