Manuel Valls effectue aujourd'hui sa première visite en tant que Premier ministre en Corse, où les dirigeants nationalistes de l'exécutif de l'île comptent mettre sur la table les points sensibles, de l'amnistie des "prisonniers politiques" au statut de la langue corse.
Première visite depuis la victoire nationaliste
S'il s'était rendu à plusieurs reprises dans l'île en tant que ministre de l'Intérieur, c'est le premier déplacement de Manuel Valls, qui entretient des rapports parfois tendus avec les nationalistes, depuis qu'il est à Matignon.
C'est aussi la première visite de très haut niveau --président ou Premier ministre-- depuis la victoire de Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni aux élections régionales de décembre 2015.
Cette victoire électorale inédite avait débouché sur un entretien des deux hommes avec Manuel Valls à Matignon, dont le fruit avait été la création de trois groupes de travail, consacrés respectivement à "l'avenir et au développement de la langue corse", à la "lutte contre la spéculation foncière et la fiscalité" et à la mise en place de la "collectivité unique" prévue au 1er janvier 2018, qui doit entraîner la fusion des deux départements avec l'organe régional.
"Ce déplacement est l'occasion de présenter les principales propositions du gouvernement issues des trois groupes de travail", a fait savoir Matignon.
Point d'orgue du déplacement, le discours du Premier ministre, après ceux des leaders nationalistes Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni, devant l'Assemblée de Corse, retransmis en direct dès 10h30 sur ViaStella.
Les questions qui fâchent
Alors que les nationalistes réclament une "amnistie" pour les "prisonniers politiques" corses, Manuel Valls a répliqué en assurant que les règles de rapprochement "s'appliquent". A l'exception du "commando Erignac" ayant tué le préfet de Corse en 1998, qu'il assume de garder en prison sur le continent.
Sur la langue corse, la revendication d'une "co-officialité" avec le français n'a pas de chance d'aboutir, l'exécutif ayant été très clair dans son refus. Mais les nationalistes pensent obtenir gain de cause a minima sur la création d'une agrégation de corse.
La "Nation corse"
Au surlendemain du décès de Michel Rocard, la visite devrait être l'occasion de nouveaux hommages à l'ancien Premier ministre, salué comme un "ami de la Corse" dès samedi soir par Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni.
Lorsqu'il était à Matignon, Michel Rocard avait chapeauté avec son ministre Pierre Joxe une nouvelle loi sur le statut de la Corse en 1991, qui créait la "collectivité territoriale de Corse". Le Conseil constitutionnel avait d'ailleurs censuré à l'époque l'usage dans la loi du terme "peuple corse" au motif que la Constitution "ne connaît que le peuple français".
Ce point suscite encore la controverse: "il n'y a qu'une seule nation, la nation française. Il est hors de question de revenir là-dessus", avait affirmé fin décembre M. Valls, ancien conseiller de M. Rocard. Au même moment, M. Talamoni avait fait polémique en qualifiant la France de "pays ami".
Manuel Valls est accompagné de plusieurs ministres, notamment Jean-Michel Baylet (Collectivités territoriales), Audrey Azoulay (Culture), Stéphane Le Foll (Agriculture), Christian Eckert (Budget), Emmanuelle Cosse (Logement) et Najat Valaud-Belkacem (Education).
Après son discours devant l'Assemblée de Corse à Ajaccio, il doit se rendre dans l'après-midi à Bastia, puis dans le cap Corse.