Anne-Marie Natali et Laurent Marcangeli avaient assigné Air Corsica en raison du nouveau processus d'obtention du tarif résident. En ce qui concerne la légalité de ce processus, basé sur la présentation d'un avis d'imposition, le tribunal judiciaire de Bastia s'est déclaré incompétent.
En mars dernier, Luc Bereni, le président du directoire d'Air Corsica, se montrait confiant, qualifiant la démarche des maires de Borgo et d'Ajaccio de simple "péripétie".
Une péripétie qui, malgré la décision de justice rendue aujourd'hui, pourrait en amener d'autres...
Anne-Marie Natali et Laurent Marcangeli venaient d'assigner la compagnie, mais également Air France, partenaire sur les vols concernés par le tarif résident, devant la chambre civile du tribunal de Bastia.
La cause de la colère des deux édiles : le nouveau système mis en place pour bénéficier de ce tarif, et donc d'une réduction considérable sur les prix pratiqués sur les lignes entre Paris et la Corse.
Jusqu'au 25 mars 2020, il suffisait de présenter sa carte d'identité, l'adresse qui y figurait faisant foi. Depuis cette date, il faut se prévaloir d'un avis d'imposition prouvant une domiciliation fiscale en Corse.
Violation ?
Selon Laurent Marcangeli et Anne-Marie Natali, cette mesure est "hors de proportions", et représenterait de surcroît une violation du droit à la protection des données personnelles, qui contrevient aux articles 4 et 104 de la loi du 6 janvier 1978.
Les deux maires soulèvent deux motifs d'annualtion :
- Le premier vise l’organisation des modalités de la mise en œuvre du service public.
- Le deuxième évoque une supposée atteinte aux libertés individuelles.
Le tribunal judiciaire estime pour sa part que "les compagnies défenderesses ont mis en place un système de contrôle fondé sur les avis d'imposition qui est critiqué mais il faut bien constater que l'attribution d'un numéro d'identification et un contrôle en coopération avec l'administration fiscale font partie des données incontournables des CDSP" [commission de délégation des services publics - NDLR].
De surcroît, toujours selon la cour, "la démonstration n'est pas faite de l'existence d'une irrégularité grossière, laquelle est indispensable à l'existence d'une voie de fait".
Jugement rendu par le tribunal de Bastia
La cour rejette donc les demandes fondées les supposées atteintes aux libertés individuelles. Il condamne le maire d'Ajaccio et la maire de Borgo à verser 1.500 euros à leurs adversaires.
De la compétence du tribunal administratif
Malgré cela le juge judiciaire se garde bien de se prononcer sur le coeur du dossier, la légalité des décisions prises par les compagnies d'aviation, dans le cadre d'un service public :
"Le tribunal ne peut que constater que le fait de demander des avis d'imposition des résidents corses (alors qu'auparavant une pièce d'identité suffisait) et de mettre en place un système de contrôle de ces avis d'imposition a eu pour effet de modifier l'organisation du service public et d'affecter la situation des usagers concernés et que dès lors c'est la juridiction administrative qui a compétence pour apprécier la légalité de ces décision".
En clair, si Anne-Marie Natali et Laurent Marcangeli veulent espérer obtenir gain de cause, il leur faudra, comme les y invite le juge, faire appel au tribunal administratif.