Augmentation du prix de l'essence, de l'alimentation, de l'énergie, l'inflation touche tout le territoire national. En Corse, où la vie est déjà chère, les habitants essayent tant bien que mal de s'adapter. Reportage.
Le rayon se nomme "anti-gaspi". Sur les cinq étagères qui le composent, des dizaines de sandwichs, salades composées, desserts dont la date de péremption arrive à échéance. Déposés grossièrement, tous les produits ont été réétiquetés d'un autocollant orange vif affichant des prix réduits. Parfois -50 %.
Mattea repose délicatement une pâtisserie et se saisit d'un paquet de quatre tranches de jambon blanc. "Je m'arrête à chaque fois que je fais les courses et je trouve toujours quelque chose, c'est très intéressant." Mais aucune démarche écologique pour la retraitée. "C'est pour faire des économies, lance-t-elle. Là, je sais que je vais manger le jambon rapidement, donc si je peux le payer moins cher, c'est mieux. J'ai une petite retraite, je suis obligée de tout regarder", sourit-elle en déposant le paquet de charcuterie dans son chariot.
Et le rayon attire. En quelques minutes, une dizaine de clients s'y arrêtent. Jérôme, trentenaire, choisit un sandwich. "Franchement, je n'ai pas à me plaindre, mais on va dire que vu la situation économique, il n'y a pas de petites économies."
"Vous avez vu le prix des clémentines corses ?"
Marie-France et Louis, eux, ont totalement changé leur mode de consommation depuis leur passage à la retraite. "On gagne 2.000 euros par mois à deux, c'était le double quand on travaillait", explique Marie-France. Dans leur quotidien, tout est revu à la baisse. "On compare les prix des supermarchés et on achète ce dont on a besoin dans différentes enseignes, là où le produit est le moins cher."
Une technique qu'ont également adoptée Annie et Bernard, couple de retraités. "Tout augmente un petit peu chaque année. Donc on finit par regarder les prix. On change nos habitudes, par exemple, on ne fait plus de stock, on achète seulement ce dont on a besoin. Pour certains produits, on compare. J'aime un certain type de yaourts, je sais que dans ce supermarché, ils sont plus chers, j'irai les acheter la semaine prochaine dans un autre magasin", confie Annie.
Malgré cette vigilance, parfois, Marie-France et Louis n'ont d'autre choix que de "se priver." "On voudrait acheter des fruits locaux, mais ce n'est pas possible. Vous avez-vous vu le prix des clémentines corses ?! Elles sont à 4 ou 5 euros le kilo alors que celles d'Espagne sont deux fois moins chères. Il n'y a pas de transport, pourquoi on les paye autant ?", s'interroge Marie-France.
"On a pris une hybride"
Pour les deux couples de retraités, un élément pèse plus que les autres sur leur budget : l'essence. Et là aussi, tous ont adapté leur consommation. "On utilise la voiture le moins possible, on fait plus de choses à pied", indique Annie. "Surtout, on a changé de voiture, on a pris une hybride. Je peux vous dire que ça fait de sacrées économies", renchérit Bernard.
Marie-France et Louis appliquent, eux, la même stratégie que pour les supermarchés. "On fait le tour des pompes, et on fait le plein là où paye le moins." Une manœuvre qui laisse encore Marie-France sceptique. "On peut faire deux kilomètres de plus pour gagner trois euros… L'un dans l'autre, je ne sais pas vraiment ce que l'on gagne…"
Une chose est sûre, les deux retraités ne feront pas le plein à la station-service la plus proche. Le litre de SP95 y frôle les 1.80 euros le litre et 1.71 euros pour le gasoil.