En 2022, 771 affaires pour des faits de violences intra-familiales ont été enregistrées en Corse. Des plaintes de plus en plus nombreuses, découlant notamment d'une plus grande sensibilisation de la population, et des violences contre lesquelles les deux parquets insulaires assurent mener une politique pénale "réactive et volontariste".
Les violences intra-familiales, ou VIF, se définissent par des violences psychologiques, physiques et/ou sexuelles qui surviennent au sein d'un foyer. En Corse, on enregistre 771 plaintes déposées auprès des services de gendarmerie et de police en 2022 pour de pareils faits.
315 plaintes déposées en Haute-Corse
Dans le détail, on recense 315 affaires en Haute-Corse, dont 213 qui ont donné lieu à des poursuites. "Soit 67,62% du total des plaintes", souligne le procureur de la République de Bastia, Arnaud Viornery. Une large progression par rapport aux années précédentes : en 2021, seulement 40,88% du total des plaintes avait ainsi donné lieu à des poursuites, et 36% en 2020.
Sur ces 213 poursuites issues, 32,1% des affaires ont abouti à un classement sans suite, "dans 80% des cas du fait d'une absence de charges suffisantes", précise le procureur. À cela s'ajoutent 79 comparutions immédiates, soit 37,09% des affaires, et 9 affaires en comparution de reconnaissance préalable de culpabilité sur déferrement, soit 4,22% des affaires. "Ce qui fait plus de 41% de déferrement sur ces affaires", souligne Arnaud Viornery.
Sur ces 213 mêmes affaires, 180 peines ont été prononcées : 75 sursis probatoires à titre de peine principale ; 45 sursis simples à titre de peine principale ; 23 peines mixtes avec ferme et sursis probatoire ; 18 peines fermes non-aménagées ; 10 peines mixtes avec surveillance électronique et sursis ; et 9 peines de détentions à domicile sous surveillance électronique.
"Généralement, les peines que nous proposons sont suivies", détaille le représentant du ministère public. "Il est assez rare que nous ayons à faire appel d'une décision."
En parallèle de ces peines, toujours en 2022, 87 obligations de soins ont été prononcées ; 76 interdictions de contact avec la victime ; 59 interdictions de paraître au domicile ou sur le lieu de travail de cette dernière ; et 36 interdiction de port d'arme.
456 plaintes déposées en Corse-du-Sud
En Corse-du-Sud, on comptabilise 456 plaintes VIF en 2022. Ce sont 76 plaintes de plus qu'en 2021 dans le département, glisse le procureur de la République d'Ajaccio, Nicolas Septe.
Sur ces affaires, 394 procès-verbaux ont été reçus, parmi lesquels 130 classements sans suite, soit 33% des affaires, - là encore pour cause d'infraction insuffisamment caractérisée ou des motifs juridique, indique le procureur d'Ajaccio - ; 26 mesures alternatives aux poursuites ; 10 compositions pénales ; et 114 poursuites, dont 14 comparutions immédiates.
"Les poursuites devant le tribunal correctionnel restent donc majoritaires et prioritaires, abonde Nicolas Septe. Et les comparutions immédiates sont en augmentation par rapport à l’année précédente. L’objectif restant de donner une réponse la plus rapide possible aux victimes."
Des auteurs qui sont souvent des hommes sous addictions
Le profil type des auteurs des faits est similaire dans les deux départements : dans la grosse majeure partie des cas, ce sont des hommes - en Haute-Corse, on enregistre ainsi 196 hommes auteurs contre 30 femmes, ces dernières étant pour la moitié poursuivies pour des faits de violences réciproques -.
Une partie conséquente d'entre eux reconnaissent des addictions à l'alcool et/ou aux stupéfiants. Un point sur lequel le parquet d'Ajaccio indique travailler de concert avec l'association AEM, avec l'installation prévue en février 2023 d'un nouveau dispositif de prise en charge des auteurs de violences conjugales. Un modèle de "justice thérapeutique", qui visera à "prévenir et réduire la récidive causée et motivée par des problèmes de toxicomanie et d'addiction, en prenant en compte le caractère sanitaire et social dans la décision de justice."
Autre détail souligné par les parquets judiciaires insulaires : si toutes les catégories sociales sont comptabilisées parmi les auteurs de VIF, on constate une surreprésentation des personnes en inactivité (35,4% de personnes sans emplois parmi les auteurs des faits poursuivis en Haute-Corse).
Les victimes sont elles pour l'immense majorité des femmes, "souvent isolées, sans famille proche, sans activité professionnelle", précise le procureur de la République d'Ajaccio.
Des outils de protection à disposition des victimes
Si la situation l'impose, et si la victime l'accepte des dispositifs de protection à l'usage des plaignants peuvent être distribués, et mis à disposition parfois avant même la tenue d'un procès.
"Dans ce cadre, nous disposons de deux principaux outils : les bracelets anti-rapprochement, et les téléphones grave danger." L'utilisation du premier, plus contraignante - car instaurant un périmètre de distance de 2km minimum entre la victime et l'auteur, difficile à tenir dans un territoire où les populations se concentrent sur des pôles précis -, reste rarissime : un unique bracelet est aujourd'hui actif en Haute-Corse, et deux cas sont actuellement à l'étude.
Le téléphone grave danger, plus pratique pour les victimes, est lui plus commun : on en compte 15 actifs en Haute-Corse, et 18 en Corse-du-Sud. L'an passé, deux interventions des forces de l'ordre ont été réalisées en Haute-Corse suite à l'activation du TGV.