Parution de livres programmatiques, passages dans les médias, comme mardi soir au JT de TF1, quête de fonds auprès de donateurs potentiels: Alain Juppé a lancé en cette rentrée son match contre son principal rival à la primaire de 2016, Nicolas Sarkozy.
Une équipe resserrée, huit à dix personnes réunies chaque mercredi autour de l'ex-ministre Hervé Gaymard, chargée du projet du candidat, plus une quarantaine de parlementaires réunis deux fois par mois le mardi, un programme qui s'étoffe au gré de rencontres "sur le terrain", et surtout l'affichage d'une volonté de fer : le désormais favori des sondages à droite joue son va-tout pour tenter de gagner la première manche, en novembre 2016, avant l'élection présidentielle l'année suivante.
Récolter des fonds
L'argent étant le nerf de la guerre, M. Juppé et son équipe se démènent pour trouver des fonds. "Près d'un million d'euros" avaient déjà été récoltés au début de l'été, a indiqué le député Benoist Apparu. Il peut aussi compter sur 400 comités locaux."La route sera longue mais la volonté, je l'ai", lançait l'ancien Premier ministre à des étudiants le 2 juin dernier, lors d'une réunion à Saint-Denis.
"Votre enthousiasme me fait chaud au coeur, je ne veux pas décevoir vos attentes, nous allons transformer ma TPE en multinationale", ajoutait avec une émotion visible un Juppé pas réputé pour fendre facilement l'armure.
Sa "multinationale" va se nourrir des multiples propositions supposées sortir le pays de l'impasse dans laquelle, juge-t-il, l'ont placé les socialistes. "La politique de ce gouvernement est un plantage", assène-t-il.
Ces propositions vont être déclinées en quatre livres d'ici la primaire. Le premier opus sort mercredi et s'intitule "Mes chemins pour l'école" (JC Lattès), la réforme de l'éducation étant à ses yeux "la mère" de toutes les autres.
M. Juppé y affirme vouloir "mettre le paquet" sur l' école primaire et promet aux professeurs des écoles d'augmenter leurs salaires de 10%.
Vives réactions au PS et FN
"Promesse de Gascon", tonne Najat Vallaud Belkacem, ministre de l'Education nationale.C'est "un zéro pointé" pour "une copie de rentrée vide et racoleuse", assure Marine Le Pen, présidente du Front national.
Viendront ensuite un livre sur les questions régaliennes (sortie prévue en janvier 2016), puis en mai suivant un autre sur l'économie, l'entreprise et l'emploi. Le dernier livre (octobre 2016) reprendra les principales idées des trois premiers, auquel M. Juppé, européen convaincu, adjoindra sa vision de l'Europe et de la politique internationale.
Une rentrée médiatique
Relativement discret dans la presse ces derniers mois - "Juppé est habile, il attend pour réagir d'avoir vu comment tourne l'opinion", dit uneélue PS, le maire de Bordeaux a démarré une campagne médiatique tous azimuts pour la sortie de son premier ouvrage.
Apres des interviews dans la presse écrite (Le Parisien Magazine, le JDD), il est mardi soir l'invité du JT de TF1. Il ira sur France Inter le 2 septembre au matin, puis sera l'invité de C à Vous sur France 5.
Plusieurs déplacements sont également inscrits à son agenda : le 3 septembre à Chalons-en-Champagne pour une conférence économique, les 9 et 10 septembre à Hyères puis le 13 à Agen pour des "rencontres sur le terrain".
Le 5 septembre, il participera à La Baule à un congrès de médecins, une profession qui lui avait tourné le dos quand il était à Matignon (1995-97). Nicolas Sarkozy et François Fillon seront là également. Une occasion pour les rivaux de la droite d'apparaître unis, à quatre mois des régionales.
Mais derrière la photo de famille et les sourires de circonstance, les couteaux s'affutent. "Qu'est ce qu'il cherche, Juppé, avec son +identité
heureuse+ ? Un électorat ?", ironise-t-on chez les sarkozystes, à propos du credo du maire de Bordeaux pour une "société apaisée".
"Avec Sarkozy, nous avons des différences. Je crois moins aux ruptures brutales et davantage à l'esprit de rassemblement", rétorque l'intéressé, tout en sachant que l'ex-chef de l'Etat, qu'il connaît depuis plusieurs décennies, n'est jamais aussi tonique que dans les rapports de force.
Le match a bel et bien commencé.