Les professionnels de santé de Gironde, opposés au projet de loi Santé, se mobilisent demain, vendredi. Ils mèneront une opération escargot sur la rocade bordelaise à 15h. Les médecins appellent à un arrêt total des activités de santé. En ligne de mire : la généralisation du tiers-payant.
Plus habitués au calme feutré de leurs cabinets médicaux, les médecins ont prévu de descendre dans la rue demain à l'occasion d'une journée de mobilisation partout en France.
A Bordeaux, ce "Black Friday" prendra la forme d'une opération escargot sur la rocade bordelaise à 15h, une heure avant celle de leurs confrères parisiens sur le périphérique de la capitale.
Les blouses blanches sont mobilisés contre le projet de loi santé de Marisol Touraine qui doit être examiné en deuxième lecture à l'Assemblée nationale (voir encadré plus bas).
La généralisation du tiers-payant est particulièrement critiquée par les médecins comme l'explique Arnaud Gaunelle, médecin généraliste à Lormont, au nom de son syndicat MG France.
Le projet de loi doit encore faire la navette entre le Sénat et l'Assemblée nationale avant son adoption définitive. Les professionnels de santé misent sur ce calendrier retardé et un probable remaniement ministériel après les élections régionales pour obtenir la suppression de la généralisation du tiers-payant.
Les raisons de la mobilisation
Tous les professionnels de santé sont invités à faire grève vendredi contre le projet de loi de Marisol Touraine et le tiers payant généralisé, les syndicats de médecins libéraux jouant la carte de l'unité.
Généralistes, spécialistes et chirurgiens (CSMF, MG France, FMF, SML, Bloc) font front commun avant le retour du projet de loi santé en deuxième lecture à l'Assemblée nationale lundi prochain, rejoints par d'autres professionnels, comme les dentistes ou les infirmiers libéraux.
Des cabinets seront fermés, des opérations programmées dans les établissements privés annulées et les urgences pourront être redirigées vers l'hôpital public.
Le ministère de la Santé a assuré avoir pris toutes les dispositions pour que "chaque patient puisse être pris en charge dans de bonnes conditions".
L'objectif de la grève ? "Montrer clairement à toute la France que le monde des libéraux est réveillé et ne laissera pas passer (le projet de Marisol Touraine) sans rien faire" explique Eric Henry, président du Syndicat des médecins libéraux.
C'est surtout la généralisation du tiers payant à tous les assurés d'ici à 2017 qui est dans le viseur des praticiens depuis plus d'un an.
Concrètement, les patients n'auront plus à avancer les frais d'une consultation, les médecins étant remboursés directement par l'assurance maladie et les mutuelles.
Peser sur les décrets
Mesure de "justice sociale" ou "usine à gaz" ? Les médecins, qui redoutent des retards de paiement et de nouvelles tracasseries administratives, ont tranché depuis longtemps.
S'ils se disent favorables à un "tiers payant social" pour les patients les plus modestes (bénéficiaires de la CMU-C ou de l'aide à la complémentaire santé), ils appellent à refuser son application à tous.
"Nous ne le ferons pas. Nous ne pouvons pas gérer la complexité du système d'assurance maladie", résume Claude Leicher, rappelant qu'il existe plus de 500 complémentaires santé.
Le gouvernement a toujours promis que le dispositif serait "simple". Mais le rapport commandé aux organismes d'assurance maladie, qui avaient jusqu'au 31 octobre pour proposer des pistes de mise en oeuvre, se fait toujours attendre.
A défaut de pouvoir empêcher le vote du texte, les médecins espèrent bien peser sur les décrets d'application.
Il leur faudra d'abord renouer le dialogue avec le gouvernement. Non contents de boycotter la grande conférence de santé voulue par le Premier ministre Manuel Valls le 11 février, les syndicats organiseront le même jour des "Assises de la médecine libérale" afin de présenter un socle commun de propositions en vue de leurs négociations avec l'Assurance maladie en 2016.
"Cela n'est jamais arrivé dans l'histoire du syndicalisme médical", insiste Jean-Paul Hamon (Fédération des médecins de France).
L'unité affichée en mars dernier, quand plus de 20.000 blouses blanches avaient défilé dans Paris, s'était retrouvée fragilisée à l'approche des élections professionnelles en octobre. Reste à voir si les médecins parviendront à surmonter leurs divergences après le vote de la loi.
A.F.P