La Rochelle : les studios de répétition de La Sirène aussi fêtent leur dixième anniversaire

Troisième volet de notre "story" (comme y disent) sur les dix ans de La Sirène. Pour le grand public, c'est bien sûr une magnifique salle de concerts. Mais pour plus de 500 musiciens amateurs, c'est aussi devenu une deuxième maison pour jouer et répéter.

Pendant que ça se trémousse avec les têtes d'affiche sur la grande scène de la passerelle et, qu'un étage en dessous, dans l'entrepont, ça boit des coups entre gens de bonne compagnie, plus bas, dans les soutes du paquebot, ça trime. Alors certes, tout ça a malheureusement été mis entre parenthèses depuis une trop longue année, mais La Sirène, c'est aussi et surtout un refuge précieux pour ceux qui n'ont d'autres ambitions que de jouer entre potes ou, pour certains, de se préparer à un avenir meilleur à l'ombre d'un mur de Marshall. Plaisanterie mise à part, les cinq studios de répétition ouverts en avril 2011 étaient et sont encore aujourd'hui au coeur du projet de la salle de musiques actuelles. 

"Un accueil humain et chaleureux".

"On ne pensait pas que ça aurait un tel succès", constate une décennie plus tard Benoît Zubryski, le capitaine du "Quai", le cocon de béton en sous-sol où les musiciens amateurs ont pris leurs habitudes depuis dix ans. 6.500 heures de répétition par an, 500 zicos et 250 groupes, voilà pour les chiffres. C'est un doux euphémisme de dire que La Sirène était attendu aussi pour ça et les principaux intéressés n'ont pas été déçus. "Au début, les gens venaient uniquement parce qu’il y avait des locaux de répèt’", explique Benoît, "mais maintenant  ils voient aussi qu’il y a des ressources humaines. Quel que soit le projet, amateur ou plus abouti, ils peuvent être accompagnés. Ils ont donc un super outil de travail et un accueil humain et chaleureux qui est finalement la signature de la Sirène. C’est la force de notre projet".

"Ils sont passés par là".

Ugo, chanteur guitariste de Double Cheese, très prometteur combo punk garage rochelais, a connu l'époque du Slipway, les premiers locaux de répétition de l'encan sur le vieux port. Après un détour chez la perfide Albion, c'est tout naturellement à La Pallice qu'ils ont commencé à jouer avec ses camarades lyonnais et parisien pour ce nouveau projet. La crise sanitaire a annulé une tournée en Espagne et la sortie de leur troisième album (concocté par Jim Diamond, producteur des White Stripes). Mais tout ça, c'est dans les soutes du paquebot qu'ils y travaillent depuis six ans.

"La Sirène, c’est parfait. C’est des supers studios, même les gars de Lyon ou de Paris le disent. C’est tranquille, le cadre est cool, personne pour te prendre la tête et, on ne va pas se leurrer, c’est pas cher du tout comparé aux autres studios !", rigole Ugo, "moi, j’ai habité à Londres où c’est 25 livres de l’heure, là, c’est trois euros chacun et tu sens que les gars sont là pour t’aider. En janvier, ils nous ont débloqué une semaine entière pour une résidence. Ils connaissent les galères d’un groupe qui tourne et qui sort des trucs en indépendant parce qu’ils sont passés par là".

"Ils se sentent à la maison".

"Ils", ce sont les trois régisseurs du "Quai". Thibaut Carter, bassiste de Walnutt Grove DC, Dimitri et Steve de Robot Orchestra. On l'aura compris, très intelligemment, ce sont trois musiciens qui sont en charge des studios et ça, forcément, ça fait la différence. "Il y a un accompagnement « plus plus » par rapport à d’autres structures", avoue humblement Dimit', "autant de présence avec autant de régisseurs, ce n’est pas commun". Parce que bien sûr, il ne s'agit pas uniquement de gérer le planning pourtant bien chargé des studios. 

Le "plus plus", c'est aussi l'organisation d'atelier pour les guitaristes ou les batteurs, des sessions d'enregistrement pour s'habituer à travailler avec un ingénieur du son, du prêt de matériel et des conseils à gogo pour un confort maximum pour les répétitions. "Pour une petite ville comme La Rochelle, c’est énorme. Il y a une émulation qui s’est créé", poursuit Dimit', "on fait tous les trimestres un showcase qui permet à certains groupes de faire leur première scène. On fait venir un intervenant pour les préparer au concert, ils apprennent à travailler avec un preneur de son. L’idée, à l’avenir, ça serait d’avoir une scène permanente pour le faire plus souvent". "Quand on fait des événements, les gens sont fiers de dire que c’est là qu’ils répètent", confirme Benoît, "ils se sentent à la maison".

Le carnet d'adresses du patron.

Et puis, forcément, comme les Double Cheese, à force d'enfiler les heures de boulot en soute, on a naturellement envie d'aller jouer en haut, avec les grands, sur la passerelle. Plus sérieusement, pour certains, les studios, c'est l'antichambre d'un avenir plus radieux sous les spotlights. Et la mission de La Sirène, c'est aussi d'encourager les talents en devenir. "On avait fait un premier concert et ils nous avaient proposé un accompagnement", nous explique Max de Lysistrata, "du coup, on a déménagé à La Rochelle parce qu’on avait un accès permanent aux locaux".  

"Réussissant comme peu l'union des différents courants de la discipline, Théo, Max et Ben, vingtaine en poche, ont déjà érigé leur bâtisse à une hauteur vertigineuse. Murs du son et mélodies vicieuses, labyrinthes noise et émotion frontale, c'est marqués que vous ressortirez de leurs griffes innocentes ; marqués et heureux" ; certes c'est faire preuve d'un peu de fainéantise de faire ainsi un simple copier-coller du site internet de Vicious Circle, leur label. En même temps, on partage l'expertise.

Il n'est pourtant pas inutile de rappeler ici que c'est bien à La Pallice que tout à commencer. "C’est grâce à David  (Fourrier, directeur de La Sirène, ndlr) qu’on a signé chez Vicious Circle", nous explique Max, "on avait préparé notre concert des Transmusicales ici avec toute l’équipe de La Sirène. Et c’est lui qui a appelé Philippe Couderc en lui conseillant d’aller nous voir pour notre concert à Rennes. Ils sont de la même génération, ils se font tous confiance et pour la première rencontre, c’est même David qui est venu avec nous". C'est vrai que le carnet d'adresses du patron, des fois, ça aide.

Wilfried Hildebrant aussi doit beaucoup aux gars de La Pallice. La pop française classieuse du Rochelais  commence à trouver sa place dans le paysage musical hexagonal. Ne lui demandez pas combien d'heures de répétition il a au compteur au sous-sol du paquebot. Hildebrant, c'est de la belle ouvrage, c'est délicat, ça se peaufine au quotidien et c'est bien plus qu'un accueil bienveillant que lui ont offert d'emblée les hôtes des lieux. "Ils m'ont simplifié la vie c'est sûr, et rassurer beaucoup" nous confie Wilfried, "j'en ai besoin. D'avoir tous ces gens qui m'accompagnent et qui me conseillent régulièrement avec autant de bienveillance, vraiment ça me rassure parce que je ne me sens pas tout seul. Benoît et David, ce sont des personnes qui ont du crédit. Moi, j'ai toujours eu une démarche indépendante, mais ils m'ont aidé à m'entourer parce qu'à la Rochelle, on est un peu loin de tout".

On aurait pu aussi vous parler de la section "musiques actuelles" du Conservatoire de La Rochelle qui envoie ses élèves s'encanailler chez les rockeurs de La Pallice, des ateliers de composition animées par Dimitri avec les étudiants de l'université et de ces scènes improbables où les Shaka Ponk en résidence se retrouvent au catering voisin à causer avec des musiciens locaux qui sortaient de répétition. Il s'en passe dans les soutes du paquebot même si, en ce moment, la mécanique s'est un peu grippée. Pour positiver, on se dit que dans dix ans, on aura tout oublié.

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