La Ligue de Protection des Oiseaux a installé trois caméras sur des nids de cigognes blanches pour suivre le quotidien des grands échassiers, de la reproduction à l'envol des jeunes, fin juin.
C'est une téléréalité très particulière que propose la Ligue de Protection des Oiseaux. Parades à coups de gorges déployées et de caquètements, envols majestueux, mais aussi la couvade scrupuleusement respectée par les couples. Depuis la mi-mars, trois caméras sont braquées en permanence sur les nids de trois couples de cigognes blanches et épient leurs moindres faits et gestes. Deux des nids sont situés en Charente-Maritime, à Saint-Jean-d'Angle et à Saint-Nazaire-sur-Charente, et le dernier se trouve en Alsace à Hunawihr.
"Grâce à ces directs, on peut entrer dans l'intimité des oiseaux sans les déranger, explique Nicolas Gendre, le référent cigogne blanche de la LPO Charente-Maritime. Et ça marche du tonnerre !" Ces directs, diffusés avec une grande chaîne d'information en continu, connaissent un véritable engouement. Ils sont des milliers à suivre la vie de ces grands oiseaux, parfois même en permanence ! "Nous avons des personnes qui ont installé des raccourcis pour mettre le direct sur leur fond d'écran en permanence", se réjouit Nicolas Gendre. La dernière fois, des téléspectateurs nous ont appelés pour nous prévenir qu'ils avaient vu un détritus plastique traîner dans l'un des nids."
L'expert cigogne de la LPO est ravi : l'objectif semble atteint, les gens se sentent concernés. Car, pas de volonté voyeuriste ici, la LPO souhaitait avant toute chose sensibiliser le grand public aux menaces et problématiques que peuvent vivre ces grands échassiers.
La cigogne avait complètement disparu du département pendant dix ans
Il faut dire que la vie n'a pas été que simple pour ces oiseaux protégés au niveau national. En 1974, il ne restait plus que 11 couples de cigognes blanches dans toute la France, dont neuf en Alsace. Les oiseaux migrateurs avaient été touchés de plein fouet par les sécheresses à répétition que subissait le bassin sahélien, et ne trouvaient plus de nourriture. En Charente-Maritime, l'oiseau a complètement disparu entre 1968 et 1978.
Aujourd'hui, les cigognes blanches sont revenues en nombre dans notre région, jusqu'à ce que la Charente-Maritime devienne le deuxième département préféré de ces oiseaux à long bec. On y dénombre entre 650 et 700 couples de cigognes blanches sur les 6 500 couples présents en France.
"La cigogne blanche se plaît en Charente-Maritime, car elle raffole des écrevisses américaines, précise Nicolas Gendre de la LPO. Ici, il y a de nombreuses vallées alluviales et nous avons des marais importants, d'autant que les conditions climatiques sont favorables aux cigognes blanches."
Attention aux lignes électriques
De quoi se nourrir, mais aussi de quoi fabriquer leurs nids. Les trois quarts des cigognes blanches de la Charente-Maritime ont élu domicile dans les peupliers, frênes et autres arbres, mais pas seulement. Certaines d'entre elles fabriquent leurs nids sur les lignes à haute et basse tension. Des locations qui posent plusieurs problèmes, à la fois pour le réseau électrique, mais aussi pour les oiseaux qui risquent de se faire électrocuter ou que leur nid prenne feu.
La LPO travaille main dans la main avec RTE (Réseau de Transport d'Electricité) et Enedis qui s'occupent respectivement du réseau haute et basse tension pour concilier protection des cigognes et approvisionnement du réseau. "Lorsque les nids sont trop proches des lignes, on les déplace soit directement sur le pylône pour les lignes à haute tension, développe Nicolas Gendre. Soit, pour le réseau basse tension, on installe des plateformes artificielles à proximité immédiate et on déplace les nids hors période de reproduction." À l'image des cigognes stars de Saint-Jean-d'Angle, plus de cent vingt couples de cigognes ont fait le choix de s'installer sur ces plateformes artificielles en Charente-Maritime.
Éclosion des oeufs puis envol des jeunes
Durant ce "Printemps des Cigognes", la LPO veut aussi sensibiliser le grand public sur une autre cigogne : la cigogne noire. Plus discrète, elle vit en milieu forestier et est beaucoup plus rare que sa cousine. L'année dernière, on ne comptait que 88 nids de cigognes noires en France.
Pour le moment, pour les cigognes blanches, c'est encore le moment où le couple se relaie pour couver ses œufs. Le prochain rendez-vous à ne pas manquer arrivera d'ici à quelques jours : l'éclosion des œufs. Une fois éclos, les petits oisillons seront toujours accompagnés d'un adulte quand l'autre parent s'occupera d'aller chercher de la nourriture. Le direct prendra fin, à la fin juin, début juillet, lors de l'envol des jeunes.
>> Pour voir le direct de la LPO sur les nids de cigognes blanches