Un médecin du Centre hospitalier d'Angoulême est visé par une enquête pour homicide volontaire sur un patient atteint de trisomie 21. Selon le rapport d'expertise médicale, le décès du patient est dû à "un acte volontaire de provoquer à brève échéance le décès par une sédation profonde et continue".
Joël, âgé de 66 ans et atteint de trisomie 21, avait été admis aux urgences du Cente hospitalier d'Angoulême le 6 janvier 2023 pour des examens dus à une simple détresse respiratoire.
Le lendemain matin, aux alentours de 2 h 30, le sexagénaire décède à l'Unité d'Hospitalisation de courte durée (UHCD) du centre hospitalier d'Angoulême, après avoir reçu de la morphine associée à un puissant sédatif. Une plainte a été déposée par la famille de l'homme de 66 ans à l'encontre du médecin, le 6 juin dernier.
Un décès lié "à un acte volontaire"
Le rapport d'expertise médicale, commandité par la Commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI), que nous avons pu lire, confirme que le décès de Joël est "consécutif à un acte volontaire d'entraîner à brève échéance le décès [...] par une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès."
Plusieurs points du rapport mettent en cause le médecin : le patient arrive conscient et assis dans une ambulance au centre hospitalier d'Angoulême. "Il n'est pas fébrile et présente une dyspnée (essoufflement, NDLR) sans grande détresse avec une saturation restant assez proche des valeurs observées dans les semaines qui précèdent. Compte tenu de son état, Monsieur Joël n'est pas en défaillance majeure", selon le rapport.
Autre point, celui du sédatif et de l'utilisation de morphine : "Il a été prescrit par sédation par une benzodiazépine (hypnovel, utilisé comme anesthésique général pour endormir ou maintenir endormi) et de la morphine qui ont majoré la détresse respiratoire. Cette prescription ne figure pas sur l'observation des urgences. Les posologies ont été augmentées au cours de l'hospitalisation, entraînant la défaillance respiratoire jusqu'à obtention d'un coma puis du décès de Monsieur Joël qui était l'objectif recherché."
L'usage du sédatif profond en question
Toujours selon le rapport d'expertise médicale, l'étude de ses antécédents montre que son état respiratoire à l'arrivée aux urgences d'Angoulême était "très proche des jours précédents". Au vu de l'état de conscience à l'arrivée du patient, Joël "n'était pas atteint d'une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme, et il ne présentait pas de souffrance réfractaire aux traitements."
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La loi stipule que l'administration d'un sédatif profond doit être réalisée à la demande du patient ou de sa personne de confiance. Or, cette dernière "a décliné la proposition de sédation profonde. Aucun document n'a été signé dans ce sens. [...] Il n'y a pas eu de traitement simple, mais d'emblée, le médecin des urgences a passé outre la volonté de la personne de confiance" de Joël "et initié une sédation."
Le décès de ce patient âgé de 66 ans est "d'origine iatrogène"
À la fin, le rapport d'expertise médicale précise que le décès de Joël, atteint de trisomie 21 et âgé de 66 ans, est "d'origine iatrogène", qui désigne un trouble ou une maladie provoquée par un acte médical ou par les médicaments, même en l'absence d'erreur du médecin. "Le décès du patient est donc consécutif à un acte volontaire d'entraîner de provoquer à brève échéance le décès par une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès avant même toute évaluation de l'évolution sous traitement ôtant à Monsieur Joël toute chance d'amélioration de son état."
L'Ordre des Médecins précise que le médecin mis en cause dans cette affaire peut, malgré ce rapport d'expertise médicale, demander une contre-expertise.
Selon nos confrères de France Info, l'hôpital d'Angoulême conteste ces accusations et nie qu'il y a eu sédation profonde. De son côté, le conseil départemental de l'Ordre des médecins de la Charente s'est saisi de la plainte de la fratrie. Fin novembre, il décidera, toujours selon nos confrères, de la suspension ou non de ce médecin.
L'enquête se poursuit : à ce stade, le médecin du centre hospitalier d'Angoulême impliqué dans cette affaire est toujours présumé innocent.