Tatiana est installée en Dordogne depuis 20 ans . Elle est née en Russie. Elle nous confie sa colère et sa tristesse qui ne la quittent pas depuis qu'effarée, elle a assisté aux assauts de l'armée de son pays sur l'Ukraine. "Cette opération spéciale ne s'est pas arrêtée aux portes de l'Ukraine" dit-elle dans un sanglot étouffé.
« J ’ai pleuré pendant trois jours sans pouvoir m’arrêter ». Quand les troupes russes ont lancé leur offensives sur l’Ukraine, Tatiana a plongé dans le désespoir et la tristesse. Ceux-ci ne l’ont pas quitté, mais elle a arrêté de pleurer.
Désormais, son quotidien reste rythmé par les journaux d’informations à la télévision, l’avancée des fronts et les prises de position des dirigeants.
« Je regarde en espérant qu’on va nous annoncer que la guerre est terminée », dit-elle, car voilà son seul souhait.
Elle qui considère cette guerre comme une une lutte fratricide ne peut s’empêcher d’avoir le cœur brisé en deux, déchiré.
L’Ukraine, jeune république de 1991, sortie du giron de l’Union soviétique, était dès le moyen âge le berceau de l’état slave. Les deux pays voisins ont ainsi toujours grandit en partageant une culture extrêmement proche.
« Tout le monde a laissé cette situation s’embraser »
Derrière la peine de Tatiana, il y a aussi la colère, celle qui n’a fait que monter tandis que le monde tournait la tête pour ne pas voir la guerre au Donbas.
Entamée en 2014 et malgré deux accords de cessez le feu signés en quelques mois à Minsk avec l’Ukraine, la Russie, mais aussi la France (François Hollande) et l’Allemagne (Angela Merkel), le gouvernement ukrainien et les séparatistes pro-russes n’ont eu de cesse de se combattre. 13000 morts en 8 ans, ça ne s’oublie pas, comme le rappelle Tatiana. On est bien loin de l’anecdote.
« J’étais mal pour les Ukrainiens qui ont été bombardés par Kiev… C’est étonnant qu’on n’ait pas réagit » dit avec amertume celle qui considère que l’actuel président ukrainien, est aussi responsable de la situation « je pensais qu’il allait être jugé pour le crime qu’il a commis », dit-elle affligée.
« Je crois que ça devient difficile d’être russe aujourd’hui »
Tatiana vit depuis 20 ans en Dordogne, mais toute sa famille est toujours en Russie, son frère militaire, du côtés de Volgograd. Et depuis son petit coin du Bergeracois, elle résume assez bien l’engouement persistant pour Poutine arrivé en ère Post-Pérestroïka juste après le début de la misère et des taux de chômage record, que n’avait jamais connu la Russie.
« Quand Poutine est arrivé au pouvoir, on pensait beaucoup qu’un jeune dirigeant allait nous sauver la vie ». Aujourd’hui, elle confirme encore qu’il reçoit un grand soutien et notamment de sa famille. Mais très vite elle revient sur l’importance de décrocher de la chose politique: « il y a des morts des deux côtés, des soldats russes jeunes qui ont été obligés d’aller tuer et les Ukrainiens qui subissent l’enfer ».
Je pense aux familles qui ont une situation, un travail, et qui au lieu de ça, doivent prendre leur sac à dos et quitter le pays dans des conditions très dures, très compliquées.
Tatiana, Russe installée en DordogneFrance 3 Aquitaine
C’est pourquoi elle espère pouvoir se rendre utile en proposant l’hébergement à des familles ukrainiennes réfugiées. « Moi, comme Russe et orthodoxe, c’est mon devoir de les aider » dit-elle, mais elle sait déjà que cela se présente mal « on peut les comprendre aussi » conclue-t-elle.