Dordogne : les menuiseries Grégoire placées en liquidation judiciaire, 236 salariés licenciés

Le tribunal de commerce de Périgueux a prononcé ce jeudi après-midi le placement en liquidation judiciaire des menuiseries Grégoire, licenciant de fait ses 236 salariés.

C'est la mine grave et la gorge serrée que Xavier Palle, président directeur général des menuiseries Grégoire, est venu prendre la parole. Devant une quarantaine de salariés présents devant à Périgueux (Dordogne), le chef d’entreprise a annoncé ce qui semblait déjà acté. Le tribunal de commerce l’a confirmé : les menuiseries Grégoire n’ayant pas trouvé de repreneur, elles sont placées en liquidation judiciaire. « Je suis très triste, je n’étais pas venu pour cela, admet celui qui avait pris ses fonctions il y a un peu plus d’un an. J’ai tout fait pour sauver cette entreprise, en tout cas le maximum d’emplois, mais cela n’a pas fonctionné. »

Pour les 236 salariés, cette décision est tout sauf une surprise, mais reste difficile à avaler. « On n’attend plus rien, on sait que l’entreprise va mourir aujourd’hui. Cela fait plusieurs semaines que ça dure, il est temps que ça se termine », avouait Cyril Saint Gérard, secrétaire du comité social et économique des menuiseries Grégoire, avant même le verdict. « On nous a tenu des discours d’espoir en disant qu’il y aurait peut-être des repreneurs et qu’il resterait des commandes, mais tout était déjà tracé », regrette de son côté Jérôme Legrand, salarié depuis 21 ans.

Les actionnaires dans le viseur des salariés

Un naufrage dû en grande partie, selon certains salariés, à une mauvaise gestion des actionnaires. « On avait des clients, on avait de l’argent, on avait un carnet de commandes bien rempli, et on a été très mal gérés, assène l'un d'eux. Certaines décisions n’auraient jamais dû être prises, on n’a pas fait confiance aux ouvriers. Pour moi, c’est de la faute de la direction. » Un avis partagé par Paolo Triglia, délégué syndical UNSA et salarié depuis 40 ans, à travers un communiqué lu à haute voix devant ses collègues : « La date d'état de cessation des paiements est bien antérieure au 1er mars, et un recours à une procédure de redressement judiciaire en septembre ou octobre aurait pu changer la donne. En nous abandonnant du jour au lendemain, et avec une trésorerie permettant à peine une période de deux mois d'observation, Prudencia signe en âme et conscience notre arrêt de mort. Aujourd'hui, ils refusent même de nous accompagner en finançant le PSE (plan de sauvegarde de l'emploi, ndlr). »

Cela fait 21 ans que je suis chez Grégoire, je n'ai jamais été au chômage. A quatre ans de la retraite, qu’est-ce que je vais faire ?

Eric Jaujou, chauffeur-livreur

Xavier Palle, le PDG des menuiseries Grégoire, avance de son côté d’autres explications. « Le contexte économique actuel a repoussé toutes les offres et tous les repreneurs possibles. Quand vous avez des hausses de 70 à 80% des matières premières et que les clients n’acceptent aucune augmentation, c’est compliqué, détaille-t-il. Une entreprise extérieure qui a fait un audit m’a dit que cela contribuait à 2,5 millions d’euros de pertes et de trésorerie. Avec ça, on peut faire plein de choses, en tout cas sauver pas mal d’emplois. Malheureusement, cela s’ajoute aux difficultés 2018, où le carnet de commandes annoncé autour de 20 millions n’a été que de 3,8. Avec 250 salariés, c’était pratiquement impossible de redémarrer. »

Inquiétudes face à l'avenir

Aujourd’hui, les 236 personnes licenciées craignent pour leur avenir. « Je travaille depuis l’âge de 16 ans, cela fait 21 ans que je suis chez Grégoire, je n'ai jamais été au chômage. A quatre ans de la retraite, qu’est-ce que je vais faire ? », se demande Eric Jaujou, chauffeur-livreur. « Dans ma branche, il n’y a pas grand-chose dans la région, voire rien du tout, remarque Jérôme Legrand, extrudeur. Mon épouse travaille ici, j’ai ma famille, c'est très compliqué. Soit je déménage, soit il va falloir que je refasse des formations pour carrément changer de métier. On est un peu perdu, l’avenir fait peur, on ne sait pas de quoi demain sera fait. On repart à zéro. »

« Cette entreprise est un fleuron pour notre territoire, et 236 emplois qui disparaissent c’est une catastrophe économique, sociale et humaine, ajoute enfin Jean-Paul Lotterie, président de la communauté de communes Isle Double Landais. Il y a un savoir-faire industriel, c’est un bassin d'emplois intéressant. C’était une magnifique entreprise, on était fier de travailler chez Grégoire, et là c’est quelque chose qui s'effondre. C'est du gâchis. »

De nombreux salariés ont quant à eux refusé d’assister à ce spectacle, et ont préféré rester chez eux. Ce vendredi, ils prendront le chemin de l’usine une dernière fois, et tenteront de passer un dernier moment de convivialité sur leur lieu de travail, autour d’un grand repas ou d’une partie de pétanque. Pendant ce temps, un commissaire priseur viendra effectuer des saisies avant de mettre la clé sous la porte des menuiseries Grégoire, symbole industriel de la vallée de Montpon-Ménestrol depuis 1907.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité