Règles douloureuses, endométriose : la proposition de loi sur le congé menstruel examinée à l'Assemblée nationale

Ce mercredi, la commission des affaires sociales de l'Assemblée Nationale examinait la proposition de loi visant à reconnaître et protéger la santé menstruelle et gynécologique dans le monde du travail. Un texte déposé par les députés écologistes de Dordogne Sébastien Peytavie et la députée de Lyon Marie-Charlotte Garin

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Ce 27 mars, le groupe Nupes et les Écologistes ont obtenu l'examen d'une proposition de loi visant à reconnaître et protéger la santé menstruelle et gynécologique dans le monde du travail. Une proposition portée par le rapporteur, le député écologiste de Dordogne Sébastien Peytavie et la députée écologiste de Lyon Marie-Charlotte Garin.

Il n'est plus admissible que des femmes quittent le monde du travail ou perdent en pouvoir d'achat parce que ni la puissance publique ni le monde du travail ne sont capables de les soutenir !

Sébastien Peytavie

Député de la Dordogne

Sept millions de Françaises potentiellement concernées

Le mois de mars est celui de la prévention et de l’information sur l’endométriose. Cette maladie chronique, qui concerne dont près d'une femme sur dix en France, se traduit par des règles douloureuses et des problèmes d'infertilité. Plus largement, près d'une Française sur deux souffrirait de dysménorrhée, des règles douloureuses. La proposition de loi vise à faire reconnaître et protéger les femmes souffrant de ces affections.
"Plus de 15,5 millions de femmes entre 13 et 50 ans sont menstruées en France, rappelle Sébastien Peytavie, les menstruations peuvent entraîner une variété de symptômes allant jusqu'à des douleurs incapacitantes. Ces symptômes, mal diagnostiqués, sont extrêmement répandus, c'est un enjeu majeur de santé publique et d'égalité", rappelle-t-il.

Un simulateur de douleurs menstruelles pour faire comprendre leur douleur aux hommes

C'est une démonstration qui a fait grand bruit, et bien au-delà de l'hémicycle. La semaine dernière, le groupe écologiste a fait tester un simulateur douleurs de règles sur des députés, toutes tendances politiques confondues. Une séance de sensibilisation par l'exemple visiblement convaincante,  "un exercice d'empathie intéressant, utile et effectivement douloureux", reconnaît devant la commission Laurent Panifous, député du groupe Liot, avant d'annoncer que son groupe soutiendra le texte du député écologiste.

Arrêt de travail ou congé menstruel ?

Jusqu'à aujourd'hui, une seule alternative est possible pour les femmes souffrant des formes aigües de ces douleurs. Partir au travail malgré la souffrance, ou bien poser un arrêt maladie. Le problème, c'est qu'un arrêt de travail classique génère une perte de salaire nette en raison du délai de carence. De plus, comme ce sont des arrêts de travail courts et récurrents, cet arrêt de travail peut faire perdre à ces femmes jusqu'à 10 % de leur salaire.
Le député écologiste propose donc que les femmes médicalement reconnues, souffrant de douleurs incapacitantes, puissent bénéficier d'un arrêt de travail de 13 jours annuels,  l'équivalent d'un jour d'arrêt par cycle, posés librement et sans délai de carence. L'arrêt de travail étant plus anonyme qu'un "congé" menstruel qui pourrait être stigmatisant ou discriminant.

Une proposition votée, mais non adoptée

L'Espagne est le premier pays européen, et l'un des rares dans le monde à avoir voté en février 2023 le congé menstruel. La durée n'est pas précisée par la loi, et le congé pris est en charge par la Sécurité sociale. L'initiative a aussi été prise par des entreprises françaises qui, sous différentes formes, ont intégré des possibilités d'absence ou de travail adapté dans leurs modes de fonctionnement. 

Lors des débats en France, tous les groupes se sont montrés d'accord sur la nécessaire prise en compte du problème. Un véritable enjeu de société, qui a déjà fait l'objet de plusieurs tentatives de reconnaissance. Un projet de loi pour un congé menstruel avait déjà été déposé dans ce sens par le groupe socialiste en mai 2023. Mais pour l'heure, le tabou et les difficultés d'application ont eu le dernier mot sur les bonnes résolutions. La proposition de résolution sur la reconnaissance de l'endométriose en tant qu'affection de longue durée avait été votée l'an dernier par la commission, rappelle Clémentine Autain, mais non adoptée par le Gouvernement, "ce qui est quand même hallucinant !", s'indigne la députée LFI.  "C'est un mépris du Parlement, d'autant plus que nous l'avions adopté à l'unanimité".

Supprimer le délai de carence, c'est fondamental, c'est pourquoi je voterai des deux pieds, des deux mains cette proposition !

Clémentine Autain

Députée LFI

Entre secret médical et risque de discrimination

Parmi les réticents au texte, sous sa forme actuelle du moins, plusieurs groupes soulignent les limites du congé menstruel ou de l'arrêt menstruel. Ils pointent un enjeu d'égalité professionnelle tout d'abord, qui risque d'induire une différence de traitement entre un homme et une femme sur une même activité. Et soulignent le risque de discrimination des employeurs ensuite, susceptibles de privilégier des hommes plus "disponibles".
Se pose aussi le problème de la divulgation du secret médical. Sans oublier les difficultés à objectiver les critères cliniques de la dysménorrhée, son degré de gravité, et les moyens de contrôle que pourraient exercer la médecine du travail, inadaptée pour l'instant à cette reconnaissance.

Difficultés d'application

Autant d'obstacles auxquels sont confrontés les parlementaires, comme à celui de l'accompagnement des employeurs, à la graduation du congé menstruel selon les cas, à l'adaptation des postes de travail ou encore à l'obligation de mettre en place, par exemple, le télétravail. Le risque d'imposer des contraintes trop lourdes aux employeurs fait hésiter les parlementaires.
L'adoption de cette loi, estime Sébastien Peytavie pourrait coûter entre 44 et 223 millions d'euros selon l'estimation la plus haute. Une goutte d'eau face au coût de l'endométriose, à lui seul estimé à 10,6 milliards d'euros par an.

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