118 postes supprimés, trois agences menacées : un nouveau plan social au journal "Sud Ouest" déclenche une grève des salariés

Après l'annonce d'un nouveau plan social, la rédaction de "Sud Ouest" a voté la grève à la majorité ce mercredi 6 mars. Le syndicat national des journalistes dénonce "une logique mortifère". Une assemblée générale est prévue dans la foulée.

"C'est le quatrième plan social en onze ans", fustige le Syndicat national des journalistes (SNJ). Alors que le journal faisait peau neuve il y a quelques semaines, allégeant sa maquette et réduisant son format pour répondre à la problématique de "l'envolée du prix des papiers", le groupe Sud Ouest se trouve aujourd'hui secoué par un mouvement de grève.

Aujourd'hui plus de la moitié des effectifs au travail étaient en grève. 78 journalistes se sont déclarés grévistes pour 70 réfractaires, au sein d'une rédaction qui comptabilise 237 personnes. 

"Retrouver une rentabilité pérenne"

Mardi 5 mars, le groupe de médias Sud Ouest (GSO) a annoncé un nouveau plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) portant sur 118 postes du quotidien régional. "En 2022 et en 2023, le groupe a souffert de l'accélération de la baisse des revenus liés à la vente de journaux papier, ainsi que de la hausse historique des coûts des matières premières et de l'énergie", justifie GSO dans un communiqué. "Cette réorganisation a pour objectif de permettre à la Sapeso de retrouver une rentabilité pérenne, malgré la décroissance de la vente de journaux." 

Des motifs repris par Nicolas Sterckx, Directeur de la société d'édition du journal, la SEPASO. "On a obligation d'alléger nos coûts alors que les métiers que l'on développe, l'audiovisuel, le néo-digital et l'événementiel, sont en forte croissance, mais insuffisamment pour compenser la baisse du métier du journal" dit-il. 

Pour Julie Lancelot, délégué syndicale SNJ Sud Ouest et élue au CSE, ce plan "n'a aucun sens"

"L'éditorial porte toute l'entreprise" 

Présenté mardi 5 mars lors d'une réunion extraordinaire du Comité social et économique, il prévoit la suppression de 25 postes à la rédaction, dont 22 journalistes, les 3 autres étant des postes administratifs. "Supprimer des postes de journalistes et donc réduire la capacité d'informer n'est pas une stratégie viable, tance Julie Lancelot, déléguée syndicale. L'éditorial porte toute l'entreprise, ça n'a aucun sens." 

"C'est inacceptable, car c'est par l'éditorial que Sud Ouest peut s'en sortir", abonde David Patsouris, élu au CSE et membre du SNJ, interrogé par l'AFP. "Ce n'est pas la rédaction qui a une activité qui baisse, c'est la direction qui, par ces suppressions de postes, va réduire l'activité de la rédaction, ce qui est problématique, car ça n'ouvre pas d'issue pour notre journal."

Abandon territorial

S'il s'agit, pour l'heure, d'un plan de départs volontaires concernant tous les services de l'entreprise, trois agences sont menacées de fermeture à Oloron-Sainte-Marie, Orthez (Pyrénées-Atlantiques) et à Sarlat (Dordogne).

Ce plan est inacceptable. On voit depuis onze ans que les plans sociaux se succèdent. Taper sur la rédaction n'a jamais permis une stratégie économique viable.

Julie Lancelot

élue CSE et déléguée syndicale SNJ Sud Ouest

"Supprimer le journaliste seul en poste revient à supprimer l'agence et à se retirer de territoire, on retire notre ancrage local", regrette Julie Lancelot. Les ventes de journaux print et numérique représentent plus de 60% du chiffre d'affaires de "Sud Ouest" pointe la SNJ dans son communiqué.

Les salariés s'inquiètent par ailleurs "d'une robotisation" et d'une "dévalorisation du travail des journalistes éditeurs" par la volonté de la direction d'un regroupement du desk en trois zones, ce qui conduirait à la suppression de 11 postes.

Journée de grève assez suivie dans la rédaction 

Une assemblée générale était prévue dans l'après-midi du 6 mars et devrait permettre de formaliser la suite du mouvement de grève. Pour l'instant, celle-ci n'est pas reconduite demain par la rédaction, mais devrait reconduite au moment des négociations fin mars, début avril.

En ce jour, seule la rédaction était en grève : 78 journalistes se sont déclarés grévistes pour 70 réfractaires, au sein d'une rédaction qui comptabilise 237 personnes. Le principe d'une journée de grève ce jour avait été acté à la majorité (53,2%). En juin 2023, les salariés avaient déjà fait une journée de grève, bloquant la diffusion du quotidien, à la suite de mesures d'économie annoncées par la direction.

Diffusé dans sept départements en Nouvelle Aquitaine, avec environ 212.000 exemplaires par jour, Sud Ouest emploie 720 salariés dont 250 journalistes, selon son site internet. Le groupe, qui fête cette année les 80 ans de plusieurs de ses titres (Sud Ouest, La République des Pyrénées, Charente Libre...), a enregistré un résultat net consolidé de 907.000 euros en 2022, contre 2,8 millions d'euros en 2021, tandis que la Sapeso essuyait une perte de 2,35 M EUR. 

"On a tous conscience du contexte économique, appuie Julie Lancelot. On sait que l'entreprise va mal, personne ne fait la grève de gaieté de cœur. Mais c'est un coup dur pour l'entreprise et c'est important pour les salariés de montrer qu'on est déterminés à ne pas supprimer ces postes."

Mobilisation du reste des effectifs 

Le 7 mars, une seule édition "monorégionale" devrait sortir à la place des 10 éditions locales. Cependant, l'avenir de cette version spéciale dépend du fait que les ouvriers de l'imprimerie se mettent en grève ou pas. À cette heure, il est encore impossible de le dire. 

Un timing devrait être discuté dans les jours prochains avec les syndicats, précise Nicolas Sterckx. 

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