La magistrate était soupçonnée d’avoir révélé par SMS les détails d’une perquisition menée au domicile de Liliane Bettencourt.
La juge Isabelle Prévost-Desprez, relaxée en première instance à Bordeaux pour "violation du secret professionnel" durant l'enquête sur l'affaire Bettencourt, sera rejugée en appel les 8 et 9 février.
La magistrate, qui présidait alors la 15e chambre correctionnelle de Nanterre chargée des affaires financières, était notamment soupçonnée d'avoir révélé, dans des SMS, les détails d'une perquisition menée au domicile de Liliane Bettencourt, héritière du groupe de cosmétiques L'Oréal, le 1er septembre 2010.
L'opération avait été relatée le jour même dans Le Monde par le journaliste Jacques Follorou, avec qui Mme Prévost-Desprez avait cosigné un livre quelques mois plus tôt.
La juge, aujourd'hui âgée de 57 ans et vice-présidente du TGI de Nanterre, s'en est toujours défendue, soutenant n'avoir eu que des "discussions personnelles" avec son "ami" Jacques Follorou.
Le 2 juillet 2015, le tribunal correctionnel de Bordeaux l'avait relaxée, soulignant l'existence de "coïncidences troublantes" dans le dossier, mais estimant que cela ne constituait "pas des preuves suffisantes" de la culpabilité de la magistrate.
Le parquet de Bordeaux avait peu après fait appel de ce jugement.
Un nombre de SMS échangés "considérable"
A l'audience, début juin 2015, le procureur Gérard Aldigé avait affirmé que "les explications d'Isabelle Prévost-Desprez ne résistaient pas au nombre considérable des SMS adressés à M. Follorou". Pour cette "faute déontologique", il avait requis une peine légère de 5.000 euros d'amende.
L'enquête a bien identifié des SMS échangés avec le journaliste du Monde au début de la perquisition, mais n'a jamais pu en établir la teneur.
Selon l'avocat d'Isabelle Prévost-Desprez, Me François Saint-Pierre, la plainte déposée contre la magistrate de Nanterre n'était qu'une tentative de "déstabilisation" visant à l'empêcher d'enquêter dans un dossier politiquement sensible.
Isabelle Prévost-Desprez s'intéressait en effet aux liens éventuels entre la femme la plus riche de France et le financement de l'UMP (devenu depuis Les Républicains), parti du président alors en exercice, Nicolas Sarkozy. L'ex-chef de l'État, soupçonné d'abus de faiblesse dans un autre volet du dossier, a bénéficié d'un non-lieu en 2013.
Un autre volet de la tentaculaire "affaire Bettencourt" doit par ailleurs être rejugé en appel à Bordeaux du 28 au 30 juin: celui de l'ex-majordome de la milliardaire, Pascal Bonnefoy, qui avait enregistré à son insu sa patronne, et de cinq journalistes accusés d'avoir diffusé des extraits de ces "écoutes" clandestines.
Pascal Bonnefoy, de même que Fabrice Lhomme et Fabrice Arfi de Mediapart, Hervé Gattegno du Point, ainsi que les directeurs de publication des deux médias, Edwy Plenel et Franz-Olivier Giesbert, avaient tous bénéficié d'une relaxe le 12 janvier 2016.
Le parquet de Bordeaux avait là encore fait appel du jugement.
Des peines "de principe" d'au moins 1.500 euros d'amende avaient été requises durant l'audience.