C’est un véritable bras de fer à l’'École Nationale Supérieure d'Architecture et de Paysage de Bordeaux qui se joue depuis mardi entre la direction de l’école et les étudiants. En cause, le vote d’une motion par la majorité des étudiants grévistes pour une reprise aménagée des cours, refusée par la commission de la formation de la vie étudiante.
"Aujourd’hui l’école est totalement bloquée. C’est la manière forte qui va jouer au final et vraiment, on le regrette ", déplore Madeleine (qui a préféré modifier son identité par peur de représailles).
Les élèves demandent une reprise adaptée des cours
Depuis mardi soir, les salles de classes et d’atelier sont condamnées par des chaises et tables empilées, mais les salles de réunion pour accueillir le conseil d’administration sont, elles, accessibles, regrette cette élève, qui indique que les élèves ont toujours cherché à prôner le dialogue.
La raison de cette action est liée au vote par les élèves de l’établissement (63%, soit 510 élèves sur 811), en grève depuis près d’un mois, d’une reprise des cours sous une forme adaptée, ce qui a été refusé par la commission de la formation de la vie étudiante (CFDE) , qui souhaite une reprise des cours classiques.
" Ça fait un mois qu’on n'a pas eu de cours. On a voté pour valider le semestre avec des cours adaptés et pour créer un emploi du temps à l’image des étudiants, mais on a pas été entendus", explique Madeleine. La jeune fille envisageait, en entre autres, des ateliers "visite de chantier" et plus de cours concrets, reliés directement à leur intégration à venir dans le monde du travail.
Dégradation des locaux
Depuis le mois de septembre, le soulèvement des étudiants de l’école d’architecture de Paris, les autres écoles ont peu à peu suivi le mouvement pour demander des moyens supplémentaires. À Bordeaux, les premières mobilisations ont commencé au mois de mars avec un arrêt des cours le 13. Des mobilisations engendrées par les faibles budgets alloués aux écoles d’architecture, dépendantes du ministère de la Culture, et non de l’éducation nationale.
Résultat, si le travail est équivalent à celui d'un élève ingénieur en école supérieur, le budget alloué à un apprenti architecte ou paysagiste est moitié moindre ( 8 000 euros en moyenne pour 16 000 dans une école d’ingénieur).
Il pleut dans les ateliers, il y a des portes qui ne ferment pas. On a des locaux totalement dégradés
Madeleine, élève en école d'architecture à Bordeauxà rédaction web France 3 Aquitaine
" La ministre de la Culture a parlé d’accorder des budgets à Bordeaux, mais on a eu aucune confirmation", poursuit Madeleine.
" Jusqu’à présent, on avait plutôt un mouvement unitaire "
Côté direction, on constate également le manque de dialogue, tandis que la bataille commune avait plutôt bien commencé.
Camille Zvenigorodsky , la directrice de l'école, rappelle la tribune qu’elle a signé et à laquelle elle a participé dans le quotidien Le Monde pour dénoncer les manquements dans les écoles nationales. "On estime qu’il y a un manque d’architectes et de paysagistes formés et on demande à mieux assumer tous les moyens de la transition écologique", insiste-t-elle.
Une évolution dans les programmes qu’elle a voulue depuis un moment et réfléchie avec les élèves depuis deux ans, précise-t-elle.
Retour à l’enseignement
Jeudi 16 avril, se tenait un conseil d’administration à distance pour étudier les modalités de reprise des cours.
" On a pris en compte cette crainte des notations, ils demandaient une sécurisation du cadre, ce qu’on a fait ce matin. 90 % des choses sont réglées ou en cours de l’être. " a pu commenter la directrice à la sortie de celui-ci.
Reste désormais à ce que les élèves et les enseignants tombent d’accord sur les modalités de notation de ces derniers mois avant la fin de l’année.
Par ailleurs, le combat à mener pour augmenter les budgets des lieux d’enseignements de l’architecture se poursuit. Pour cela un RDV avec les directeurs d’école aura lieu au Ministère de la Culture le 14 avril prochain. " On fait un peu des miracles tous les ans" estime Camille Zvenigorodsky qui espère que soit débloqué déjà un budget exceptionnel.
"En même temps, c'est un beau mouvement même si ce n'’est pas facile pour tout le monde", conclue-t-elle.