Ce mercredi, des policiers de toute la France vont manifester à Paris à l'appel d'une vingtaine de syndicats. Un grand rassemblement national pour exprimer une colère latente, alors que plus d'une cinquantaine de policiers se sont suicidés depuis le 1er janvier.
Le problème est latent. Depuis le début de l'année, cinquante-et-un policiers se sont donnés la mort. Un mal-être qui, estiment les policiers, ne peut pas être dissocié de leurs conditions de travail. Ce mercredi, une immense marche des forces de l'ordre en colère est organisée à Paris.
Les policiers aquitains à Paris
Une délégation d'environ 500 personnes partira depuis la Nouvelle-Aquitaine, dont près de la moitié depuis Bordeaux, assure Eric Marrocq, secrétaire régional du syndicat Alliance, qui rappelle que dans la grande région, cinq policiers se sont suicidés depuis le début de l'année.
Les manifestants défileront entre les places de la Bastille et celle de la République et veulent, en plus d'interpeller le gouvernement sur la vague de suicides, revoir le fonctionnement police justice, demander une hausse des moyens… La liste est longue.
Avec cette manifestation, les policiers entendent mettre la pression sur le gouvernement, avant le début des négociations autour du projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi). "Il faut un Grenelle de la police nationale, pour tout repenser", estime Eric Marrocq.
2019, une année douloureuse
L'année a été marquée par les nombreuses manifestations des gilets jaunes, et la dénonciation des répressions policières dans les médias. "Beaucoup de monde a stigmatisé l'emploi de la force lors de ces manifestations, qui étaient en réalité des rassemblements illégaux puisque non autorisés, souligne Eric Marrocq.Les policiers ont subi des jets de pierre, de peinture, d'urine, de matière fécale… Et la réponse a été de remettre en cause l'emploi de la force par les policiers."
Pour Philippe Roland, délégué syndical de l'unité SGP Police en Aquitaine, qui sera également présent à la marche parisienne, le mal-être remonte à 2015. "Ça a commencé avec la surcharge de travail liées aux attentats, on nous a demandé d'être sur tous les fronts, et effectivement, avec les gilets jaunes, certains travaillaient presque tous les week-ends.
Ce rythme de travail, ça a forcément des répercussions sur le quotidien, la vie de famille".
"Les petits jeunes, on va leur dire d'aller travailler à Paris, d'être payés 1 500 euros pour se faire casser la gueule ? "
Philippe Roland, délégué SGP Police
Le délégué syndical évoque la nécessité de recruter 1 000 CRS sur le territoire national, "des spécialistes du maintien de l'ordre, qui puissent assurer les manifestations", mais assure que la fonction n'attire plus. "Les petits jeunes, on va leur dire d'aller travailler à Paris, d'être payés 1 500 euros pour se faire casser la gueule ? Parce que c'est ça ce qui se passe ! Aujourd'hui, on n'hésite plus à lever la main contre les policiers. Et derrière, les sanctions ne suivent pas toujours."
Réforme des retraites
Les troupes ont pourtant pu compter sur le soutien du ministre de l'Intérieur Christophe Castaner qui a conclu avec les syndicats un accord de revalorisation salariale fin décembre, et demandé le paiement des heures supplémentaires dues depuis plusieurs années.
Le ministre a également défendu la spécificité du statut des forces de l'ordre, qui bénéficient d'un régime spécial de retraite, sur lequel le Haut-commissaire à la réforme des retraites Jean-Paul Delevoye recommande de revenir.
"C'est bien, mais nous en plus des paroles, on attend des actes désormais. Cette marche, ce n'est qu'un premier acte, si rien ne se passe, ça va péter", prévient Eric Marrocq.