L'association de défense des animaux L214 révèle des images choquantes, tournées à l'intérieur d’un des plus gros élevages laitiers de Gironde, le GAEC La Cabanne, situé sur la commune Les Peintures. L214 et l'association "Ne Crin plus rien" ont porté plainte et interpellent la préfecture.
Des vaches amaigries, couchées dans des stalles jonchées de déjections, semblant laissées sans soin. D'après les témoignages recueillis sur place par les deux associations, la situation ne date pas d'hier. La vidéo a été tournée au GAEC La Cabanne situé sur la commune Les Peintures, près de Libourne.
Les images partagées ce 22 novembre parlent d'elles-mêmes. L'état physique de ces vaches laitières, l'environnement insalubre et la couche de lisier apparente pourraient laisser penser que cet établissement est simplement à l'abandon. Il n'en est rien.
"Ce n'est pas du tout une exploitation à l'abandon. C'est une des plus grosses fermes de Gironde", explique Sébastien Arsac, membre de L214. Les gérants ont des responsabilités, notamment "au sein du groupement des producteurs de lait de la vallée du Dropt ,qui fait partie de Sunlait et qui livre le lait pour SAVENCIA, 2è groupe après Lactalis".
Regardez la vidéo tournée mi-novembre et diffusée par l'association L214, ce 22 novembre.
Des vaches à l'agonie dans leur lisier
Selon Sébastien Arsac, les images ont été tournées clandestinement, mi-novembre, à l'intérieur de plusieurs bâtiments. La situation de saleté et d'insalubrité est globale, mais des animaux "plus ou moins abrités" souffrent plus que d'autres. Le GAEC compte près de 300 bêtes. Une partie sont des laitières élevées pour leur lait et puis... il y a les autres.
Quand les vaches laitières "arrivent en fin de carrière", elles sont normalement réformées et partent à l'abattoir. "Mais là, visiblement, elles sont juste mises de côté dans un bâtiment, abandonnées". C'est essentiellement là que sont tournées ces scènes de vaches amaigries, en souffrance, dormant dans leurs déjections.
Des vaches "en autogestion"
Mais même les vaches laitières ne sont pas épargnées, toujours selon Sébastien Arsac. "Il y a les vaches laitières et puis il y a les suites : les veaux qui naissent, les génisses qui vont venir les remplacer etc. Dans la partie avec stabulation (en étable NDLR) (...) on trouve deux-trois centimètres de lisier... Les animaux se couchent là-dedans, bien sales. On voit aussi l'hygiène déplorable sur le robot de traite !"
Personne, sur les images, n'apparait pour encadrer la traite, qui se fait automatiquement. Sébastien Arsac explique : "elles ont une espèce de collier avec une puce. Elles se présentent devant le robot de traite, elles vont dedans et ont une distribution de nourriture qui les encourage (...) Donc, en fait, elles sont en autogestion !"
Juge et partie
Des signalements sur place avaient été faits, notamment auprès de l'association "Ne Crin Plus Rien". Ce qui choque également cette association ainsi que L214, c'est que l'un des gérants est "adjoint au maire de la commune et président du syndicat départemental du contrôle laitier", assure Sébastien Arsac.
De plus, le militant précise que l'élevage a fait l'objet de signalements auprès de la Direction Départementale de la Protection des Populations (DDPP) Gironde, mais ne semble pas avoir été inquiété.
Une plainte déposée
L214 et l’association girondine Ne Crin plus Rien demandent à la préfète de Gironde la fermeture immédiate de l’établissement. Une pétition adressée à la Préfète, Fabienne Buccio, a été mise en ligne.
Les associations ont porté plainte auprès du tribunal de Libourne pour "mauvais traitements à animaux". Ce qui, Sébastien Arsac le précise, est un délit quand il s'agit de professionnels. "C'est l'article L215-11 du code rural. Les peines encourues sont un an de prison et 15 000 euros d'amende".
Elles portent également plainte pour "délit d'abandon", et pour "sévices graves et cruauté". Dans le cas de mort des animaux suite à cela, les responsables encourent cinq ans de prison et 75 000 euros d'amende.
► Reportage de Joe Saccal et Ludovic Cagnato
Pas de saisie
La préfecture de la Gironde, alertée par les vidéos, précise avoir demandé l'intervention sur site des services vétérinaires de la direction départementale de la protection des populations. "Cet élevage n'est pas défavorablement connu des services vétérinaire. L'exploitation, située en zone de prophylaxie renforcée fait par ailleurs l'objet d'un suivi sanitaire régulier", précise la préfecture dans un communiqué.
Les contrôles menés dans la journée iraient donc en ce sens. "Ils ne mettent pas en évidence d'actes de maltraitance", détaille la préfecture.
Cependant, treize animaux, sur les 464 que compte l'exploitation, présenteraient un état de santé qui "pose question". Une expertise vétérinaire a été ordonnée pour en déterminer les causes exactes. Si pour l'heure aucune saisie n'a été réalisée, la préfecture assure qu'elle prendra des mesures administratives si des dysfonctionnements étaient constatés dans l'exploitation.
L214 est une association de défense des animaux qui, depuis sa création en 2008, a rendu publiques plus d'une centaine d'enquêtes révélant les conditions d'élevage, de transport et d'abattage des animaux. Des vidéos le plus souvent qui ont permis de dénoncer des pratiques et dysfonctionnements dans l'industrie agro-alimentaire maltraitants des animaux.