Alors que les tarifs du gaz ont bondi depuis le 1er octobre, les habitants de La Réole et de plusieurs communes environnantes n’ont pas vu leur facture augmenter grâce à leur régie autonome.
Dans leur cuisine, Monique et Jean-Denis Aubert épluchent leurs factures… Sans mauvaise surprise ce mois-ci, contrairement à une grande partie des Français. Malgré la hausse brutale de 12,6% des prix du gaz mise en place par Engie au 1er octobre, le tarif n’augmentera pas pour ce couple de retraités vivant à La Réole. Il restera plafonné à 0,058€, et pourra même descendre à 0,048€ du kilowatt-heure, au moins jusqu’en 2023.
“On a de la chance d’avoir cette régie, reconnaissent-ils. Sans cela, on serait obligé de condamner des pièces, de ne chauffer que là où on vit vraiment. Cela nous rassure, car nous avons des petites retraites.”
Cette régie, c’est celle de La Réole. Depuis bientôt 130 ans, elle s’approvisionne et redistribue elle-même l’énergie de façon autonome. Sans être soumise à l’autorité de l’Etat, et donc aux tarifs réglementés.
Un pari gagnant
Mais comment assurer un tarif fixe sur deux ans, quand les prix augmentent partout ailleurs ? “Nous avons une veille régulière sur les prix, et notre directeur négocie avec notre partenaire le meilleur prix quand il est au plus bas, explique Ludovic Ossedat, directeur commercial des régies de La Réole, Bazas et Sud-Réole. Plus on a de la quantité, plus le prix est compétitif.”
En réalité, le gaz distribué aujourd’hui a été acheté bien avant l’augmentation de début octobre. C’est au début de la crise du Covid, lorsque l’économie mondiale s’est quasiment retrouvée à l’arrêt, que la régie a fait ce pari. Les besoins en énergie étant moindres, leur prix avait considérablement diminué. “Nous avions anticipé que le prix du gaz allait exploser. La tendance était plutôt à la baisse, mais notre choix a été d’assurer un prix fixe pendant au moins deux hivers, détaille Bruno Marty, maire (PS) de La Réole et membre du conseil d’administration de la régie. Aujourd’hui, c’est opportun, car nous avons un prix à proposer qui est largement en-dessous de nos concurrents.”
Au-delà du calcul économique, “c’est un vrai choix politique”, assume Bruno Marty. “Maîtriser son énergie, c’est l’avenir des collectivités pour ne pas dépendre des multinationales qui sont cotées en bourse, et qui sont là surtout pour faire du profit. Nous, c’est pour accompagner nos concitoyens.”
Face aux augmentations, l'appel du biogaz
La suite ? “Pour le moment, on n’est pas entré de nouveau en négociation. Il en est hors de question, étant donnée la dimension totalement ubuesque qu’a pris le gaz depuis 15 jours, explique Ludovic Ossedat. On va peut-être attendre début 2022, pour voir comment cela se passe. De toute façon, les prévisionnistes n’envisagent pas une baisse avant le printemps.”
En attendant, la régie, dont le modèle est salué voire envié par d’autres communes, ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. La mairie a commandé une étude pour la création d’un méthaniseur, qui permettrait de récupérer les boues issues de la station d’épuration afin de les transformer en biogaz. “On deviendrait autonome au niveau du gaz, et une fois qu’on est autonome, on maîtrise le prix”, espère le maire socialiste de La Réole.
Les habitants, eux, ont encore deux ans au minimum pour profiter de ces tarifs avantageux. “Grâce aux régies, nous arrivons à maîtriser nos dépenses, apprécient Monique et Jean-Denis Aubert. A partir du moment où on est bénéficiaire, on ne peut qu’approuver.”