Européennes 2024. Ils refusent de distribuer des tracts de campagne dans les boîtes aux lettres : deux postiers mis à pied

Dans le quartier de Bordeaux Caudéran, les postiers ont entamé leur deuxième semaine de grève. Ils dénoncent la suppression de cinq emplois et la suspension, selon eux abusive, de plusieurs d'entre eux, dans un contexte électoral. De son côté, la direction de La Poste assure qu'aucun licenciement n'est prévu.

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"100% des titulaires sont en grève" depuis une semaine à l'agence postale de Bordeaux Caudéran, explique Willy Dhellemmes, le représentant SUD PTT de Gironde. Un piquet de grève est organisé tous les jours devant le bureau de poste de Bordeaux-Caudéran, avenue Louis Barthou. "Ils veulent supprimer 20 % des effectifs, soit un peu plus de cinq emplois sur 25", dénonce le syndicaliste. Quatre emplois concernent les tournées et un autre le guichet

"La Poste veut supprimer aussi tous les "Carré Entreprises" ou "Carrés Pro" dans les agences", poursuit Willy Dhellemmes. Ainsi, les professionnels qui disposaient d'un guichet dédié viendront s'ajouter aux clients usagers des services postaux ou bancaires. Une réorganisation prévue "sans augmentation d'effectifs du guichet qui va accueillir tout le monde", précise-t-il.

Si on met ça en place, on va droit dans le mur !

Willy Dhellemmes

Représentant SUD PTT de Gironde.

Et le syndicaliste d'expliquer que, déjà, les tournées fonctionnent mal, faute d'effectifs. "Par exemple, une semaine avant la grève, il y a trois tournées qui n'ont pas été distribuées. Tout le courrier est resté au bureau !"

"Il n'y a pas de licenciement à La Poste"

À la direction de La Poste Bordeaux-Caudéran service courrier, on insiste sur le fait que la grève "n'a pas impacté la distribution des plis électoraux la semaine dernière". Elle précise que depuis 2021, "on a une baisse du courrier de 30 % sur ce centre. Donc quand on perd autant, on réaménage les tournées". Et la Direction de préciser quand on explique que cette réorganisation implique la disparition de cinq emplois, il ne s'agit pas de licenciements mais des départs à la retraite et le fait de solliciter "moins de gens pour distribuer le courrier". "Il n'y a jamais de licenciements à La Poste ! "

Mises à pied

Onze employés sont grévistes. "Deux autres auraient dû faire grève, mais ont été mis à pied", précise Willy Dhellemmes. Ces deux postiers sont sanctionnés pour avoir refusé "de distribuer de la propagande électorale propre à certains partis politiques, qui n'était pas présentée sous plis opaques", comme l'exige la neutralité du service public (

"Juste avant les élections européennes, des partis politiques ont décidé de souscrire un contrat avec La poste pour distribuer leur propre propagande électorale, en plus de l'enveloppe qu'on a tous reçue", dénonce Willy Dhellemmes, soucieux de défendre "la neutralité du service public".

Neutralité du service public

Selon le syndicaliste, des problèmes similaires avaient occasionné des questions au Sénat, en 1998. La réponse du ministère avait précisé que "les documents à caractère politique remis à La Poste, qu'ils soient ou non adressés, doivent être obligatoirement placés pour la distribution sous enveloppe close ou sous film plastique opaque, ceux-ci ne devant comporter aucune mention apparente de l'origine, qu'il s'agisse d'intitulé de formation politique, de sigle ou de logo". Une précaution qui répond à l'obligation faite au service public de La Poste "d'observer une stricte et totale neutralité dans ses relations avec les citoyens".

De la même façon, cette distribution ne doit pas se faire durant la campagne électorale, ce qui était le cas.

Tournées et insécurité

Au-delà de cette distribution non-conforme, les postiers dénoncent des conditions de travail dégradées à cause de cet état de fait. "Il y a eu des altercations avec des usagers qui estiment que ce n’est pas normal. C’est tendu à chaque fois…" C'est justement parce que des postiers avaient été agressés que le ministère de l'Industrie avait pris ces dispositions préservant la neutralité des services publics (en 1998), rappelle Willy Dhellemmes.

Les postiers auraient souhaité des aménagements. Par exemple, à La Poste Mériadeck, des dispositions avaient été prises telles que si les agents se sentaient en insécurité, ils ne distribuaient pas. Pas à Caudéran : "vous ne distribuez pas, on vous sanctionne". Ainsi, deux postiers ont été mis à pied depuis deux semaines pour avoir marqué leur désaccord. "Quand vous êtes mis à pied, c’est que vous êtes dangereux pour l’entreprise : vous avez insulté des clients, tapé quelqu‘un, cassé du matériel ou voulu nuire à l'entreprise… C’est très grave !" insiste le délégué syndical qui estime cette sanction abusive.

C’est pourquoi les postiers réclament la réintégration de leurs deux collègues "et qu’il y ait une discussion sur la distribution de la propagande électorale". Ensuite, concernant la restructuration, "que La Poste revoit sa copie. Il faudra des renforts pour être sûr que tout le courrier soit correctement distribué… »

"Pas de procédure disciplinaire"

La Direction réagit en indiquant qu'on "ne fait pas à la Poste de choses qui ne soient pas dans la légalité". Quant aux personnes mises à pied, "il n'y a pas de procédure disciplinaire en cours". Les deux postiers en question vont être entendus pour savoir pourquoi ils n'ont pas distribué ces imprimés-là. On va les entendre et il y aura ensuite ou non une procédure disciplinaire en fonction des suites de l'entretien". Aucune décision n'a été prise.

Quant à la suite du mouvement, elle indique qu'il "y a des discussions tous les jours avec les syndicats" et qu'en attendant la suite du mouvement, avec huit grévistes ce lundi, "une grosse partie de la distribution a quand même été effectuée" même si tout n'a pas pu être fait. 

Elle assure que les discussions sont en cours.

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