"Il fallait casser l'image des librairies trop sérieuses." Avec ses livres et ses pâtisseries, Aïda redonne "une âme" à son village

Après avoir quitté son emploi dans les télécoms dans le nord de la France, Aïda Fernandes s'est définitivement implantée dans la commune de Galgon, en Gironde. Avec sa librairie-café, elle souhaite proposer un lieu réconfortant où les habitants aiment passer du temps.

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"Alors Paul, qu'est-ce qu'on lit aujourd'hui ?" Chaque mercredi après-midi, les enfants s'installent confortablement dans la petite cabane d'Aïda Fernandes. Comme les plus grands, qui prennent part, eux aussi, à ce rendez-vous devenu hebdomadaire, avec un plaisir non dissimulé. "Il vous reste le cookie caramel beurre salé ? C'est mon préféré."
Toutes les semaines, semaine, Sylvie accompagne son petit-fils de quatre ans et demi à l'heure de lecture, organisée dans la librairie café de Galgon, située à une quinzaine de minutes de Libourne. "Les lieux comme celui-là sont très rares, c'est très convivial, sourit-elle. Puis en tant que mamie, ça permet de connaître un peu plus ce qui plaît aux enfants." 

Un lieu d'échange

La petite Cabane a ouvert ses portes dans la commune de Gironde, d'à peine 3 000 habitants, un an auparavant. Un véritable défi pour Aïda Fernandes qui oscillait entre Lille et Bruxelles comme ingénieure télécoms. "Je voulais quitter la ville et me rapprocher de la frontière espagnole où j'ai toute ma famille."

Un burn-out décide finalement l'entrepreneuse à se lancer dans un nouveau projet "qui a du sens". La création d'une librairie "réconfortante", en plein cœur de village, "où les gens pourraient se détendre avec un livre et des pâtisseries". "Le mélange de deux univers pour que ce soit vraiment un lieu de vie et non pas une librairie de passage", insiste la gérante.
Toutes les semaines, Aïda propose de nouvelles recettes gourmandes de cookies sucrés et muffins en tout genre. L'idée séduit rapidement les habitants de la commune, conquis par l'engouement et la bonne humeur "communicative" d'Aïda.

Ce n'était pas notre coin, on ne connaissait pas du tout, mais on voulait retrouver la proximité avec les gens, ici j'habite à 100 mètres, l'école de ma fille est juste à côté, c'est idéal.

Aïda Fernandes

gérante de la petite Cabane

"Ça redonne vraiment de l'âme au village, le passage y est devenu obligatoire", confie Jean-Baptiste, venu enrichir la bibliothèque de sa fille, Léana, âgée de dix ans. Car la littérature jeunesse est le point d'orgue de la librairie de 95 mètres carrés. Le rez-de-chaussée est intégralement dédié aux livres pour enfants où tous les genres se mêlent. Des romans, aux mangas, en passant par des livres pédagogiques. "Ils peuvent parfois être un secours aux parents démunis qui n'osent pas aborder certains sujets comme le consentement, pointe Aïda. Cela peut faire passer des messages."

Apporter la culture dans des zones rurales

Plus de 4 500 références et 1 200 livres d'occasions habitent les étagères de la librairie. "Moins que ce que pourrait disposer une librairie classique, mais ça permet aussi aux gens de s'approprier le lieu et de commander aussi les livres qu'ils souhaitent." Justement, régulièrement, les habitués viennent déposer des ouvrages pour les insérer dans l'espace dédié à l'occasion. "Je t'ai apporté ce livre, tu me diras ce que tu en penses. Tu sais à quel point je tiens à mon espace développement personnel", rigole une habituée, de passage.

La librairie n'est pas sacrée et pas réservé aux connaisseurs, tout le monde peut y trouver son compte

Aïda Fernandes

gérante de la petite Cabane

Dans la commune de Galgon, les lieux dédiés à la promotion de la culture ne sont pas nombreux. Pourtant, s'installer ici, loin de l'émulation des grandes villes, a été une évidence pour Aïda. "Je viens d'Espagne et là-bas, les librairies sont des lieux de vie tout à fait normaux, comme une boulangerie, ce n'est pas plus impressionnant qu'un autre commerce." Au début, elle remarque que certains habitants, qu'elle croise quotidiennement, ne franchissent pas la porte de sa petite Cabane. "Une fois, des clients m'ont dit qu'ils n'osaient pas venir, s'étonne-t-elle. Quand j'ai monté le commerce, on m'a dit qu'il fallait casser l'image des librairies trop sérieuses qui font peur aux gens, moi, je ne comprenais pas, nous, on n'a pas cette relation avec la littérature avec un grand L." 

Lien avec les artisans locaux

Finalement, un an après l'ouverture de son commerce, Aïda s'est véritablement implantée dans la commune où elle poursuit sa volonté de créer du lien entre les habitants. Pour ce faire, la gérante met à l'honneur des artistes et commerçants locaux, avec qui elle développe des collaborations. "Il y a énormément de talents dans le coin, il faut juste les mettre en lumière." Dans l'escalier sont, par exemple, exposées des peintures de l'école de dessin avoisinante. Elle organise également de nombreux événements dans ses locaux comme des cours de cuisine ou des rencontres avec la ferme pédagogique située à quelques kilomètres de là.

Devant ses locaux, Aïda accueille des commerçants du coin. Tous les mercredis, Nathalie et son camion "Le marchand des frip'ouilles" investissent la devanture de la petite Cabane pour proposer des vêtements de seconde main destinés aux enfants. "Aïda a vraiment à cœur de développer un réseau d'entrepreneuses et de le mettre en valeur, c'est précieux", indique-t-elle, reconnaissante. 

Podcast et prix des Marmottes

Si la petite Cabane vient à peine de souffler sa première bougie, la liste des projets futurs ne désemplit pas. Aïda n'est jamais à court d'idées, déborde d'ambition. À court terme, la gérante souhaiterait créer un podcast, court, "où on discuterait spontanément de nos coups de cœur littéraires". Le lancement d'un "prix des Marmottes" est, lui aussi, dans les rouages. "L'idée serait de produire un prix avec les écoles alentour pour que les élèvent votent pour leurs livres préférés", détaille-t-elle.

Plus tard, Aïda envisage même d'agrandir la petite Cabane pour investir le local accolé et développer une nouvelle spécialité, toujours dans une démarche d'alimenter "un lieu de vie où les gens ont envie de rester". 

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