Fiona a racheté le salon de coiffure dans lequel elle était salariée en 2017. Jusqu'à février dernier son bilan était positif et sa progression constante. Aujourd'hui elle ne peut plus faire face aux lourdes charges qui continuent à peser. Les aides promises ? Elle n'en voit pas la couleur.
Fiona avait 15 ans quand elle a commencé à travailler dans la coiffure avec un objectif bien précis : très vite ouvrir son propre salon.
"J'ai énormément travaillé, mis de l'argent de côté et j'ai pu racheter le salon dans lequel j'étais salariée quand ma patronne a vendu pour partir dans une autre commune" raconte t-elle fièrement.
Elle avait alors 23 ans. Ses clients lui sont restés fidèles. Elle a su en attirer de nouveaux "grâce notamment au bouche à oreille". "La situation de ma société était stable, le bilan positif et en constante progression".
Coup d'arrêt
Dès les premiers jours du mois de mars, le nombre de rendez-vous a commencé à chuter. Et les annulations à se multiplier. "Les clientes entendaient parler de ce coronavirus et elles avaient peur".
Cette première moitié du mois de mars a été financièrement très difficile. Elle n'a pas pu rembourser l'échéance de son crédit.
"C'était mon seul impayé depuis trois ans ! Et à cause de ça, la banque m'a refusé les autres reports. Je me retrouve à devoir payer mon crédit alors que mon activité est réduite à zéro!" dénonce t-elle.
Fiona, qui affirme n'avoir encore reçu aucune des aides promises par l'Etat et les collectivités locales, explique avoir à payer 13 000 euros de charges fixes par mois.
"Il y a le loyer, le prêt, les impôts, la mutuelle, l'expert-comptable ... je n'ai pas de solution. J'ai peur de tout perdre, je n'en dors pas la nuit".
La jeune cheffe d'entreprise devrait finir par recevoir les 1500 euros d'indemnités promises par l'Etat et peut-être les 2000 euros supplémentaires versés par les Régions pour prévenir les faillites. Elle a rempli tous les formulaires et fait les démarches avec son expert-comptable.
Elle devrait aussi obtenir le remboursement des salaires qu'elle a avancé à ses deux employées, placées en chômage partiel.
Mais "ces aides ne suffiront pas par rapport à toutes mes charges" s'inquiète t-elle. D'autant qu'elle ne sait pas quand son activité pourra reprendre à 100%.
Une reprise oui mais à quelles conditions ?
Fiona a hâte de rouvrir mais pas au prix de sa santé et pas au risque de contaminer son compagnon, diabétique et donc à risque, ni sa petite fille de 14 mois.
Hors de question non plus de mettre en danger sa clientèle, constituée de nombreuses personnes âgées.
"On devra certainement réduire drastiquement le nombre de clients, les prendre un par un. Mon salon est tout petit, on ne pourra pas respecter la distanciation nécessaire si on est trop nombreux".
Et impossible de remettre en route son espace barbier où "le travail nécessite un contact physique beaucoup trop proche"..
"Une ouverture en mai impliquera forcément une perte de chiffre, avec toujours l'obligation de payer les charges. Ca va être compliqué".
Fiona plaide pour un gel des charges "pendant trois ou six mois, sinon on pourra pas faire face". Elle redoute plus que tout un dépôt de bilan, "ce serait un désastre" après tout ce qu'elle a "réussi à construire" par elle-même.
Une cagnotte comme une bouteille à la mer
"J'ai décidé d'ouvrir une cagnotte en ligne en me disant que je n'avais rien à perdre".
En quelques jours elle a réussi à collecter près de 1500 euros. Essentiellement versés par ses clientes les plus fidèles.
"Ca me touche énormément" avoue t-elle, "certaines personnes donnent ce qu'elles peuvent, 10 euros, et cela va jusqu'à 100 euros".
Cet après-midi, Fiona a un rendez-vous téléphonique avec la Chambre de Commerce de la Gironde espérant obtenir des réponses sur les aides qu'elle n'a pas perçues.
Sur sa page facebook elle a relayé le coup de gueule de son ancienne patronne, désormais installée à Martignas-sur- Jalles et qui se retrouve, comme elle et comme l'ensemble des propriétaires de salons, dans la même situation très délicate.
Dans une longue tirade, Lysiane Lévy exprime sa très forte colère contre les charges que l'Etat fait peser sur les petites entreprises. "On nous accorde des prêts qu'il faudra rembourser, on reporte des échéances qu'il faudra payer plus tard... et on nous oblige à payer la TVA" dénonce-elle notamment.