Marcel Amont est décédé à l'âge de 93 ans, Né à Bordeaux, l'artiste, qui a fait chanter et danser plusieurs générations, aimait aussi tout particulièrement le Béarn où se trouvaient ses racines en vallée d'Aspe.
" J'ai mes pieds à Paris, mais ma tête dans les montagnes."
Ce 6 février 2020, Marcel Amont est de retour sur sa terre familiale. L’artiste qui a toujours sa maison dans le village d’Urdos en Vallée d’Aspe, une vieille grange familiale retapée, devenue un cocon familial douillet, est alors intronisé comme membre d'honneur de l'Académie du Béarn. La cérémonie se passe à Pau et le chanteur, qui est le premier à rejoindre la confrérie, n’est pas peu fier :
Si Papa et Maman étaient encore là, eux les enfants du peuple, ils seraient fiers de voir que je suis devenu académicien. Bien sûr pas comme à l'Académie française, mais de toute façon la plupart de ceux-là chantent faux.
Marcel Amont
" Ici, au moins, on parle la même langue même si en vieillissant, je bafouille un peu !" poursuit-il avec ce ton facétieux qui le caractérise, à ses fans venus le saluer.
Celui qui aime tant faire le clown depuis soixante-dix ans est toujours aussi infatigable. La silhouette toujours aussi mince, les cheveux toujours aussi blancs et le sourire toujours aux lèvres. Avec lui, le public a redécouvert le music-hall dans les années 60-70.
Des bals de province à la capitale
L'amuseur est né, ça ne s'invente pas, un 1er avril. Marcel Jean-Pierre Baltazar Miramon, de son vrai nom, se destinait à être prof de gym, mais son amour pour le théâtre et la chanson l’a finalement emporté. Avec son saxophone, le jeune homme égrène les scènes des bals de la région.
En 1951, il décide de tenter sa chance à Paris. Il quitte alors son quartier ouvrier de Bordeaux, sa ville natale et se fait rapidement remarquer en assurant les premières parties de la chanteuse Edith Piaf dans la mythique salle de l'Olympia. Son premier disque y est enregistré, puis récompensé. Il reçoit le Grand Prix de l'académie Charles-Cros, avec Gréco et Gainsbourg. Il a 25 ans.
Sa carrière est lancée. Le cinéma lui fait les yeux doux. Il tourne avec Brigitte Bardot dans La mariée est trop belle en 1956. En 1962, le chanteur, réputé pour sa bonne humeur, se produit à Bobino à guichets fermés. Marcel Amont est alors partout. Sur la scène, à la télévision, chez Maritie et Gilbert Carpentier, dans des émissions de variété... Il animera même son propre show, Toutankhamont. Sa route croise celle des plus grands : Charles Aznavour lui écrit l'immense succès Le Mexicain, Claude Nougaro lui offre Le jazz et la java et Le tango des jumeaux.
Touche-à-tout, l’artiste se définit d’abord comme un amuseur public. Il danse et virevolte. N’en déplaise à son meilleur ami Georges Brassens qui lui avait offert la chanson Le chapeau de Mireille, pour le consoler d'un chagrin d'amour et qui ne s’était pas privé de le lui faire remarquer. La réponse de Marcel Amont ne s'était alors pas fait attendre.
Attention Georges, on ne fait pas le même métier ! Moi, je suis un saltimbanque, un danseur sur la corde !
Marcel Amont, en réponse à Georges Brassens
Une carrière faite de hauts et de bas
Et puis un jour, le chanteur béarnais va connaître ce que tout artiste redoute : une longue traversée du désert. C’est le début des années 80. L'industrie de la musique change, les auteurs se détournent. Marcel Amont fait trop de scènes, pas assez de tubes et n’est plus à la mode. Ce passage à vide, qui a duré vingt ans, il l'évoque dans son autobiographie "Il a neigé..., "(Éditions Didier Carpentier)
" Une carrière arrivée tout en haut ne tombe pas au 36e dessous comme un fer à repasser, une poire blette ou une bouse de vache. Ça tiendrait plutôt du planeur. " C’est le début d'une descente aux enfers" pour celui qui redevient malgré lui "un inconnu".
"Ça me fait plaisir de voir qu'il y a plein de gens qui m'aiment bien"
Et puis arrivent les années 2000, celles du come-back et de la renaissance. Les producteurs sont de retour. En 2006, Marcel Amont enregistre un nouvel album, Décalage horaire. A 77 ans, il retrouve, contre toute attente, la salle qui l'a fait connaître cinquante ans plus tôt : l'Olympia. Emu de voir des artistes comme Gérard Darmon, Didier Lockwood ou Agnès Jaoui accepter de chanter avec lui. "Ça me fait plaisir de voir qu'il y a : " plein de gens qui m'aiment bien", confie-t-il.
En 2010, il participe à l'album pour enfants Les larmes de crocodile, mis en musique par son fils, Mathias. Son public le retrouve aussi dans la tournée "Âge tendre et Têtes de bois". Au Parisien, qui l'interviewait en 2016, il confiait au sujet de lui et ses camarades de tournée : "On n'est pas des ringards comme certains disent, mais des has been.
Certains de mes compagnons de route ne s'en remettent pas. Moi, je me dis qu'on a déjà beaucoup de chance d'avoir été.
Marcel Amont
La tournée l'emmène alors sur la scène du Zénith de Pau. L'artiste en profite pour aller au contact du public dans les allées du marché. Sa popularité est intacte.
Une longévité exceptionnelle
Chez Anne Roumanoff sur Europe 1, il explique le secret de sa longévité "J'ai surveillé ma santé, c'est tout", et reconnaît "que c'est plus difficile de rester simple quand on est Paul McCartney, que quand on est pharmacien à Villeneuve-sur-Lot." Une hygiène de vie qui lui permet en 2018, de se retracer son histoire dans un spectacle intitulé " Marcel raconte et chante Amont" et de signer un nouvel opus, accompagné de Francis Cabrel, Alain Souchon ou Maxime Le Forestier.
Pour ses 90 ans, le chanteur avait réussi à faire salle comble à l’Alhambra à Paris. Comme l’avait prédit son père, Marcel Amont n’a jamais pris sa retraite. Lui qui affirmait dans son autobiographie être " Bavard comme une pie " ne donnera plus de la voix.
Il s’est éteint à l’âge de 93 ans.