"On nous appelle pour des panaris ! " : les pompiers exaspérés par le recours excessif aux services d'urgence

Entre l'urgence vitale et la permanence de soins, les pompiers sont de plus en plus sollicités pour des interventions non urgentes, parfois très éloignées de leur cœur de métier. Un syndicat déplore une situation jugée intenable.

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Un appel de trop, une nuit dans le quartier des discothèques. Des personnes sont alcoolisées. Le 13 janvier 2025 à 2 h 17, un véhicule d’assistance est demandé par le SAMU pour un malaise dans le quartier des bassins à flots à Bordeaux. Une femme, a semble-t-il, trop bu. Les informations complémentaires mentionnent qu’un chauffeur Uber a refusé de la ramener à son domicile.

Une intervention jugée injustifiée qui suscite la colère des professionnels de secours. Sébastien Dephot est pompier depuis treize ans. Il estime que la situation ne s’améliore pas. "Ça n’est pas nouveau. Cela fait maintenant plusieurs années. On fait un peu de tout et on s’éloigne de notre cœur de métier qui est la détresse vitale. On peut nous appeler pour un panaris, des ongles arrachés ou pour prendre des constantes", insiste celui qui est aussi le président de la fédération autonome SPP-PATS de Gironde.

On nous demande de le faire, on le fait, mais ça n’est pas normal

Sébastien Dephot

Président de la fédération autonome SPP-PATS de Gironde

Sébastien Dephot parle de mission dévoyée. Il déplore l'utilisation excessive des services d'urgence, notamment des véhicules de secours (VSAV), pour des cas non urgents, ce qui réduit la disponibilité des pompiers pour des situations réellement critiques. La situation est dit-il "intenable depuis plusieurs années".

Des interventions en hausse

" Pour vous donner un ordre d'idée, il y a 15 ans, on faisait un tout petit peu moins de 100 000 interventions par an. C'est déjà énorme, on fait partie des plus gros départements de France. Aujourd'hui, on est entre 135 000 et 140 000", illustre-t-il.
L’explosion démographique de la métropole de Bordeaux explique l’augmentation d’activité des pompiers. Le manque de médecins de garde également, ce qui conduit à appeler le 15 plus souvent.

Le SDIS 33 ne conteste pas l'importance de l'activité et rappelle avoir réalisé " pas moins de 134 117 interventions, dont 108 406 pour du secours à la personne en 2024 " . L'organisation explique "veiller à maîtriser le nombre d'interventions". 

Sébastien Dephot ne dispose pas d’études pour quantifier le nombre d’interventions injustifiées. "Ce que je peux vous dire, c'est que bien trop souvent, on est envoyé sur une intervention et que cela se termine aussi souvent par une absence de transport. C'est-à-dire que la personne n'avait pas besoin d'aller à l'hôpital", soupire-t-il.

© Candice Olivari France 3 Aquitaine

"Des personnes ayant réellement besoin de nous vont devoir patienter"

Ces déplacements jugés inutiles ont des conséquences sur toute la chaîne de secours." Pendant ce temps-là, des personnes ayant réellement besoin de nous, vont devoir patienter, déplore le pompier. Un enfant qui fait une mauvaise chute, qui a un traumatisme du rachis par exemple, va rester allongé par terre durant 10-15 minutes de plus avant qu'une autre ambulance d'un autre secteur arrive. Ça va être notre papa, notre maman qui fait un arrêt cardiaque à la maison."

Dix à quinze minutes à attendre une ambulance, c'est du temps précieux perdu pour le patient !

Sébastien Dephot

Président de la fédération autonome SPP-PATS de Gironde

 

Une réglementation à revoir

Pour le président de la fédération autonome SPP-PATS de Gironde, la société est trop dépendante du Samu. Il demande une meilleure régulation. Et de rappeler un rapport d’activité de la chambre régionale des comptes. L’institution, a mis en relief les activités des services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) de même catégorie.
"C’est très parlant, analyse Sébastien Dephot. Aujourd’hui, pour 1 000 habitants, la Gironde effectue 140 % d'interventions en plus que la Haute-Garonne. Pour 1 000 habitants, la Gironde fait 91 interventions. Quant à la Haute-Garonne, en fait 32 !"

Le syndicaliste réclame la formation d’un groupe de travail pour revoir le cahier des charges. "On a une note de service qui identifie les natures de nos missions. Aujourd'hui, il y a trop de disparités, trop d'écarts entre l’arrêté national et notre note de service départementale."

À l’heure actuelle,sa demande ne semble pas avoir trouvé un écho favorable. Le SDIS 33 souligne que des rencontres sont organisées chaque mois entre leur service et le Samu "pour échanger sur les pratiques et procédures mises en place afin d’optimiser la réponse opérationnelle".
En attendant, Sébastien Dephot doit repartir en intervention. Il vient d’accompagner un homme à l’hôpital, victime d'un arrêt cardiaque. Cette fois, sa mission avait un caractère vital. Son cœur de métier.

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