Ce jeudi 28 mars, près de 500 Roms de Roumanie ont été expulsés d’un camp qu’ils occupaient depuis un mois et demi, situé près du stade Matmut Atlantique à Bordeaux. L’évacuation vise à sécuriser la zone, en prévision des Jeux Olympiques.
Ils avaient posé leurs caravanes le 14 février dernier. Près de 500 Roms, originaires de Moldavie roumaine, ont dû quitter le camp de fortune qu’ils occupaient sur un ancien siège de l’assureur Gan.
Nettoyage olympique
Au petit matin, les agents de la ville, aidés d’une pelle mécanique et d’une benne, nettoient le sol, jonchés de débris et de voitures abandonnés. Plus aucun occupant n’est sur place. Ils sont partis vers 5 h 30, informés en avance de cette expulsion.
Certains sont employés par les exploitations viticoles du département depuis dix ans. “Les patrons voudraient trouver des solutions, mais eux n’en ont pas et sans les institutions, c’est impossible de trouver un lieu viable”, concède Léonard Velicu, président de l'association Eurrom. Parmi eux, près de 100 enfants vivaient ici jusqu’à ce matin. “Il y en a qui sont déscolarisés depuis deux ans”, regrette Léonard Velicu.
À 200 m du stade Matmut Atlantique, site des Jeux Olympiques, le bidonville était dans le viseur de la préfecture. “Les Jeux Olympiques demandent un niveau de sécurisation élevé. Il y a un certain nombre de périmètres, principalement autour du stade Matmut où nous devons procéder à des évacuations”, détaille Justin Babilotte, directeur de cabinet de la préfecture de Gironde. Entre le 24 juillet le 2 août, sept matchs de football masculin et féminin sont programmés à Bordeaux, dont un quart de finale hommes.
On veut rendre invisibles ceux qui sont très visibles.
Léonard VelicuPrésident de l'association Eurrom
Outre la sécurisation, il s’agit aussi d’offrir aux touristes, “une bonne image” de la Ville, précise l’association.
Expulsions en chaîne
De son côté, la préfecture assure avoir proposé, en amont, des solutions d’hébergements aux familles. C’est notamment le cas des ETI, ces espaces temporaires d'insertion, créés par la métropole pour sédentariser les habitants des bidonvilles. “Ils doivent passer par deux diagnostics et à la fin, ils ne sont pas pris souvent à cause d’un manque d’autonomie. Alors que justement, ces ETI doivent normalement aider à l’autonomie”, rappelle le président d'Eurrom.
Déménager sans cesse, ces travailleurs de la vigne y sont désormais habitués. Expulsés le 14 février de la rue Dangeard, ils avaient trouvé refuge sur ce terrain, à 200 m du stade Matmut. Auparavant, ils avaient occupé, jusqu’au 17 août, un terrain vague à Villenave d’Ornon. En réalité, leur errance dure depuis 2016. “Les évacuations de plus en plus rapprochées les unes des autres et en parallèle, on sent un désengagement des services de la Ville”, regrette Leonard Velicu.
Une cinquantaine de Bulgares avait déjà déménagé le week-end dernier rue Baour, où un autre squat est mis en place. Si eux ont trouvé une solution, les Moldaves roumains peinent à trouver un nouveau site pour les accueillir.
Stabilité
En France, la majorité des villes fait face aujourd’hui à des situations similaires. “Ce problème a fortement augmenté dans toutes les métropoles, certaines cherchent des solutions pour proposer des terrains pérennes, d’autres, comme Bordeaux, n’ont pas de solution concrète”, avance Léonard Velicu, qui ne comprend pas le choix de l’expulsion.
Ces expulsions coûtent cher à la ville, à la préfecture et tout ça ne mène à rien.
Léonard VelicuPrésident de l'association Eurrom
Au contact des occupants du bidonville, l’association avance pourtant des pistes : une table ronde avec les acteurs clés. “On n’a pas besoin de millions d’euros. Les occupants savent construire leurs cabanes. On a juste besoin d’un terrain, avec un accès à l’eau et à l’électricité et un moyen de scolariser les enfants”, détaille l'association.
L’association assure que ce terrain apporterait une “plus grande stabilité” aux occupants. “Cela donnerait la possibilité de scolariser les enfants et de travailler sur un vrai accompagnement”, confie Léonard Velicu.
En six mois, douze évacuations ont été réalisées dans la région bordelaise. C’est seulement cinq de moins qu’à Paris.