Orthopédie : comment soigner un hallux valgus ou oignon de pied ?

Pour le traitement de l’hallux valgus (classique «oignon de nos grand-mères»), selon l’étendue des déformations articulaires du patient, le chirurgien peut employer différentes techniques : la chirurgie classique, la chirurgie mini-invasive, la chirurgie percutanée.

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Invitée plateau : Pr Thierry Fabre, chef du service d’orthopédie et traumatologie périphérique, pôle chirurgie - CHU de Bordeaux
Date de diffusion : lundi 29 mai 2017

Mini-invasive, percutanée, endoscopique … les nouvelles chirurgies du pied

Dans le cas de la chirurgie orthopédique, les différentes techniques existantes ne sont que des outils pour mener à bien une opération. Le choix d’une approche plutôt que d’une autre dépend surtout des indications médicales, de l’état du patient et de la pratique du chirurgien. C’est la prise en compte de tous ces facteurs qui fait qu’une chirurgie pourra être réussie. Les nouvelles chirurgies, qui se différencient de l’opération chirurgicale classique à ciel ouvert, c'est-à-dire avec un champ opératoire étendu, ne sont pas des techniques aisées à réaliser.

Au-delà de l’apprentissage des techniques spécifiques des chirurgies mini-invasives, il faut surtout au chirurgien orthopédiste une bonne plasticité intellectuelle pour se figurer une représentation en trois dimensions à partir d’une vision très réduite de l’anatomie. Même si ces nouvelles chirurgies restent en plein essor et offrent de nouvelles possibilités, elles ne signent pas la fin de la chirurgie classique. En effet, certaines formes de déformations nécessiteront toujours une chirurgie classique, ne pouvant pas être prise en charge en percutané.

Un exemple : l’hallux valgus

Pour le traitement de l’hallux valgus (classique « oignon de nos grand-mères »), selon l’étendue des déformations articulaires du patient, le chirurgien peut employer différentes techniques :
  • La chirurgie classique : ostéotomie de type Scarf, pratiquée depuis plus de 20 ans, cette technique est la plus pratiquée et la seule à pouvoir prendre en charge les cas très avancés de déformation.
  • La chirurgie mini-invasive : ostéotomie de type mini-chevron. L’ostéotomie du métatarse, l’os le plus long, est réalisée classiquement par un mini-abord, c'est-à-dire une incision très petite, de l’ordre de 2 ou 3 cm. Les autres gestes, arthrolyse et ostéotomie phalangienne, sont réalisés par voies percutanées.
  • La chirurgie percutanée : ostéotomie d’Isham-Reverdin. Le cas de l’hallux valgus permet de mettre en lumière la spécificité des soins postopératoires de la chirurgie percutanée. Le pansement est alors réalisé par le chirurgien, au bloc opératoire. Il est formé de compresses mouillées qui formeront ensuite une coque rigide, comme un plâtre, très confortable pour le patient. Après l’opération, l’appui est autorisé avec une chaussure adaptée. Le pansement n’est pas touché pendant 8 à 12 jours, délai au bout duquel un rendez-vous est programmé et le pansement est refait par le chirurgien. Il s’agit cette fois ci d’un tuteur de matière souple qui va guider le gros orteil avec une bande de maintien au niveau de l’avant pied. Pour marcher, le patient utilise toujours sa chaussure post-opératoire. Un mois à partir du 2ème pansement, après observation de l’évolution sur une radiographie de contrôle, un chaussage plus normal est proposé au patient. La consolidation osseuse prend environ 45 jours.

Les gestes opératoires du chirurgien orthopédiste

Quel que soit le mode opératoire, le chirurgien orthopédiste utilise les mêmes gestes techniques pour soigner et corriger les pathologies du pied, voici un rappel de ceux qui sont les plus utilisés dans la chirurgie du pied :
  • L’ostéotomie : il s’agit tout simplement d’une fracture contrôlée. Le chirurgien casse un os pour en découper un morceau ou corriger un angle. Il agit comme un ébéniste mais ses outils sont les scies mécanisées, avec un mouvement de va et vient ou bien de fraises, qui ont, elles, un axe de rotation.
  • L'ostéosynthèse : c’est le maintien d’un os fracturé par l’utilisation de vis, de plaques, de clous ou de tiges.
  • L’arthrolyse : il s’agit de traiter une raideur articulaire en sectionnant la capsule et les ligaments de l’articulation. Bases de la chirurgie classique à ciel ouvert, l’ostéotomie, l’ostéosynthèse ou l’arthrolyse peuvent également être réalisées dans les chirurgies percutanées ou mini-invasives, grâce à la miniaturisation des outils.


La chirurgie percutanée

La chirurgie percutanée, technique récente, a été introduite en Europe depuis une quinzaine d’années seulement. C’est une révolution technologique mais ce n’est toutefois qu’un outil que le chirurgien a à sa disposition et qui doit être utilisé en fonction de l’indication. Cette chirurgie est réalisée à travers la peau, à l’aide d’un mini-bistouri et de fraises motorisées. Le champ opératoire étant par définition extrêmement petit, il n’est pas possible pour le chirurgien de voir à l’œil nu le déroulement de la procédure. En revanche, pendant l’intervention, chaque geste peut être contrôlé :

- soit par la fluoroscopie (amplificateur de brillance), appareil moderne mobile de radiologie à rayons X donc facteur d’irradiation pour le patient mais surtout pour le chirurgien aux gestes répétitifs. Cette visualisation ne peut s’adresser qu’aux éléments radio-opaques : les os. Les autres éléments nerveux, tendineux, musculaires ne sont pas visualisés. Cet appareil de radioscopie est protégé et stérile, et peut être utilisé en salle opératoire. De plus, les nouveaux appareils petits, protégés, mobiles délivrent moins de radiation ce qui présente évidemment un intérêt pour le patient mais également pour le chirurgien. Toutefois, la fluoroscopie est souvent utilisée comme un simple moyen de contrôle par le chirurgien expérimenté qui, de part son habitude à travailler ainsi, utilise ses outils comme un prolongement de la main et « ressent » les zones travaillées sans avoir besoin de les voir. Cette absence de contrôle visuel autre que par la fluoroscopie fait de la chirurgie percutanée une technique de pratique difficile. Mais il faut également souligner que les gestes sont parfois très différents de ceux réalisés dans la chirurgie académique. En ce sens, elle se rapproche assez de la chirurgie endoscopique.

- soit par l’endoscopie
Grâce à l’utilisation d’un tube rigide contenant un optique relié à une caméra. Cet appareil introduit dans un espace anatomique avec flux continu de sérum physiologique créant un espace de travail, il permet de visualiser tous les éléments même ceux non radio-opaques notamment les ménisques, les tendons, les nerfs. Le chirurgien peut alors observer sur un écran la région explorée et, par des incisions de quelques millimètres, faire pénétrer les mini-instruments qu'il va utiliser. La zone explorée peut être une articulation, on parle alors d’arthroscopie ou une autre zone non articulaire et on parle d’endoscopie extra-articulaire. C’est grâce à une gymnastique intellectuelle que le chirurgien peut se faire une vision en 3 dimensions avec l’image donnée par l’arthroscope lors de l’opération.

Pour l’anecdote, une étude a déjà prouvé que les chirurgiens habitués à jouer à des jeux vidéo en 3D présentent des facilités à apprendre ces techniques. Le recours à l’arthroscopie pour traiter certaines pathologies est parfois devenu une référence. C’est le cas par exemple pour le genou, lorsqu’on enlève un ménisque. Pour le pied ou la cheville, les choses sont moins définies, plusieurs types de chirurgies sont possibles, chirurgie classique ou percutanée. Pour l’endoscopie extra-articulaire, afin de procéder à l’acte chirurgical, il faut créer un espace de travail, grâce à la dilatation par le sérum physiologique.

L’exemple maladie de Haglund est intéressant, puisque cette maladie est une déformation du calcanéum (l’os du talon) qui, à cause d’une proéminence, comprime le tendon d’Achille et est un facteur important de survenue de tendinopathie. Il est nécessaire de « raboter » la proéminence osseuse pour soulager le patient. Cette chirurgie peut être réalisée :
  • à ciel ouvert auquel cas l’incision est très large et le temps de récupération est très long
  • mais surtout maintenant en chirurgie percutanée, avec fluoroscopie donc avec une exposition aux rayons X ; ou bien sous endoscopie. Cette méthode avantageuse utilise la même fraise qu’en chirurgie percutanée, permet une meilleure visualisation, et surtout diminue la douleur post-opératoire et permet une récupération plus rapide.

L’un des principaux avantages de la chirurgie percutanée est sa possibilité d’être réalisée en ambulatoire pour la majorité des cas. C’est évidemment une réduction importante des coûts, puisqu’elle évite une hospitalisation. L’autre avantage de la chirurgie percutanée réside dans la simplification des pansements post-opératoires :
- soit, ils jouent un rôle majeur pour la contention osseuse secondaire puisqu’il n’y a pas de matériel pour fixer les ostéotomies. Réalisés au bloc opératoire par le chirurgien, ils ne seront changés qu’au bout de plusieurs jours (8 à 15) en présence du chirurgien,
- soit, ils ne sont rapidement plus nécessaires du fait de la miniaturisation des incisions.


La chirurgie mini-invasive

On appelle mini-invasif les procédés chirurgicaux qui permettent de réaliser une incision minime, tout en appliquant parfois des techniques utilisées en chirurgie classique.

C’est en quelque sorte le mariage de la chirurgie classique et percutanée. Elle comprend une incision très réduite, de l’ordre de 2 ou 3 cm, puis la réalisation de plusieurs entrées percutanées. La réalisation d’une ostéotomie en mini-chevron, par exemple, est une technique très récente développée en chirurgie mini-invasive, combinant des techniques déjà utilisées en chirurgie classique et d’autres développées plus récemment en percutanée.

C’est vers ce type de chirurgie que s’oriente la recherche en chirurgie du pied. Ainsi, le traitement des métatarsalgies utilise une méthode de soin en mini-invasif en passe de devenir le nouveau golden standard pour la chirurgie du pied, la «prothèse de la hanche» du pied, en quelque sorte…


Le rôle de l’anesthésie

La chirurgie du pied a souvent mauvaise réputation parce qu’elle est particulièrement douloureuse, et la récupération fonctionnelle souvent longue et difficile. C’est en partie grâce aux progrès de l’anesthésie que la chirurgie percutanée a pu ainsi être développée. En effet, l’anesthésie loco-régionale permet de supprimer la sensibilité et la mobilité d’une partie du corps pendant une intervention, et de proposer une prise en charge de la douleur. En effet, l’anesthésie couvre deux points essentiels :
  • L’anesthésie loco-régionale. L’anesthésie est faite sur le nerf sciatique en particulier pour l’hallux valgus. Elle permet de désensibiliser un membre sans avoir les contraintes de l’anesthésie générale, notamment en termes de risque et de récupération post-opératoire. La pose d’un cathéter près du nerf peut permettre de diffuser l’anesthésie sur une durée plus longue, dans le cas du maintien du patient en hospitalisation pour une ou deux nuits.
     
  • La maîtrise de la douleur : les chirurgies percutanées sont à volonté ambulatoire, ce qui n’est possible que si on prend en charge la douleur. L’hallux valgus en particulier à toujours été très douloureux. Les techniques mini-invasives et percutanées génèrent une douleur beaucoup moins importante, et donc permet la prise en charge ambulatoire.

Source :
Dr Olivier Laffenêtre responsable du Centre Médico-chirurgical Universitaire du Pied (CMUP)
CHU de Bordeaux
10 avril 2017
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