Morte à 38 ans après une banale intervention médicale, son père veut connaître toute la vérité

En mars dernier, Gwenaëlle Leterme est admise à la Nouvelle clinique Bordeaux Tondu, à Floirac en Gironde, pour une opération qui devait être banale. Elle décède quelques jours plus tard, des suites de l'intervention. Face au manque d'informations communiquées par la clinique, son père a décidé de porter plainte contre X.

C'est une opération bénigne, qui a viré au drame. Le 27 février, Gwenaëlle Leterme est admise à la Nouvelle clinique Bordeaux Tondu, à Floirac, pour une ablation de deux kystes apparus sur sa gorge, comme révélé par Actu Bordeaux.

Selon sa famille, l'opération se déroule sans encombre. Mais après le retrait de son drain de Redon, un petit flacon posé après l'opération pour recueillir les sécrétions post-opératoires et censé favoriser la cicatrisation, la mère de famille de 38 ans sent son état se dégrader. Elle communique sa détresse à ses proches, par des SMS ou lorsqu'ils viennent la voir.

Des appels à l'aide sans réponse

"Elle avait du mal à déglutir, à respirer, explique son père, Jean-Luc Leterme, joint par France 3 Aquitaine. Elle nous disait aussi avoir beaucoup de mal à obtenir de l’aide lorsqu'elle en demandait au personnel soignant."

Le 1er mars, à 21h40, Gwenaëlle Leterme envoie un dernier message à son compagnon, "où elle continuait de se plaindre de sa détresse, et de sa difficulté de voir quelqu'un."

À partir de là, les choses se sont rapidement dégradées, on ne sait pas pourquoi.

Jean-Luc Leterme

Père de Gwenaëlle

Ce soir-là, la patiente quitte sa chambre pour se rendre au bureau des infirmières, "sans doute pour aller chercher de l'aide elle-même, à force d'appeler", suppose son père. Mais lorsqu'elle est reconduite à sa chambre, elle fait un arrêt cardiaque.

Placée en réanimation à la clinique, Gwenaëlle Leterme se fait opérer une seconde fois dans la foulée, pour "d'autres formations qui bloquaient sa respiration", selon le témoignage de Jean-Luc Leterme.  Depuis le bloc opératoire, la clinique fait appel au CHU Pellegrin de Bordeaux, pour que Gwenaëlle y soit transférée. Elle y est placée dans un coma artificiel. Elle décède le 4 mars à l'hôpital.

Un manque d'informations

Pour ses proches, le choc et l'émotion sont immenses. Au téléphone, la voix de Jean-Luc Leterme se brise. "Elle allait se marier dans trois mois, je devais la marier... Elle aurait dû sortir de la clinique le 2 mars. Elle est effectivement sortie, mais pas comme on l'aurait souhaité. On ne s'attend pas à ça quand on vient se faire enlever deux malheureux kystes."

En plein deuil, la famille de Gwenaëlle cherche aussi à obtenir des informations de la part de la clinique qui l'a accueillie. "Ils ne nous ont donné que des explications sommaires, rien de précis. Certains éléments sont mêmes contradictoires, notamment sur l'heure de retrait du Redon. Pour sa deuxième opération, on n'a pas vraiment d'informations là-dessus, la direction de la clinique ne donne que des réponses floues, peu transparentes."

Non seulement on subit la perte d’un être cher, mais en plus, on n'arrive pas à avoir une explication franche, honnête, claire, transparente de la part de l’établissement qui était censé la soigner.

Jean-Luc Leterme

Père de Gwenaëlle

Et le père de Gwenaëlle Leterme s'interroge sur ce qui est vraiment arrivé à sa fille. "Après le retrait du Redon, une surveillance accrue aurait dû être mise en place, mais elle n'avait aucun appareillage de branché, donc aucune surveillance à distance. Il y avait certainement des passages fréquents du personnel soignant, mais on voudrait avoir l'assurance que le médecin est bien venu voir ma fille."

Faute d'obtenir des renseignements, ce Girondin a décidé de porter plainte contre X, le 20 mars, auprès du parquet de Libourne. Il doit maintenant renouveler sa plainte auprès du parquet de Bordeaux, où ont eu lieu les faits. Il sera reçu ce mardi 16 avril au Commissariat central de Bordeaux.

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La famille de Gwenaëlle Leterme veut connaître la vérité sur les raisons de sa mort. ©France 3 Aquitaine

Dénoncer "un milieu fermé"

Cette plainte, il l'a déposée dans l'espoir qu'une enquête lui permette d'obtenir "la vérité" sur le décès de sa fille. "Dire qu'elle a fait un arrêt cardiaque, ce n'est pas suffisant pour relater l'histoire, dénonce-t-il. On sent qu'il y a des choses qui se sont passées, mais il faut que les services de l'Etat aillent chercher les informations. Je veux qu'on m'aide à chercher la vérité là où elle se trouve."

Jean-Luc Leterme veut aussi dénoncer un "milieu fermé", où "tout le monde se cache derrière le secret médical". "À Pellegrin, ils nous ont dit "Ça n’arrive jamais", et pourtant c’est arrivé. Il y a forcément plein d’explications à donner", conclut-il.

Une réunion proposée par la clinique

De son côté, la clinique du Tondu, jointe par France 3 Aquitaine, réitère sa position : en tant qu'établissement de santé, elle "n'est pas autorisée à transmettre des données sur un patient". La clinique fait toutefois savoir qu'une commission des usagers a été proposée à la famille, afin d'échanger avec la direction, "comme c'est le cas dans des situations comme celle-ci". Un rendez-vous proposé pour le 9 avril, et refusé par la famille de Gwenaëlle Leterme, selon la clinique.

Le CHU Pellegrin a, lui, fait remonter à l'Agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine un signalement pour un événement indésirable grave (EIG) associé aux soins. Contactée, l'ARS indique dans un mail s'être "rapprochée de la clinique du Tondu pour obtenir des informations complémentaires [...]."

L'analyse [...] des éléments transmis par l'établissement de santé, notamment le dossier médical, conditionnera la mise en place d'une inspection à court terme.

Agence régionale de santé (ARS) Nouvelle-Aquitaine

Pour Jean-Luc Leterme, l'ouverture d'une enquête ou d'une procédure judiciaire serait aussi l'occasion d'éviter à d'autres familles de subir de telles tragédies, si une faute de la clinique était avérée. "S'il y a eu une mise en danger d'autrui, ou non assistance en personne en danger, c'est très grave. Si, dans cet établissement, les conditions ne sont pas réunies pour accueillir les patients correctement, il faut que ça se sache."

En dernier recours, le Girondin envisage de saisir la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI). "Là, un juge peut nommer un expert médical, et le secret médical ne peut pas lui être opposé." Mais le père de Gwenaëlle espère "ne pas être obligé d'en arriver à ces extrêmes" pour obtenir la vérité sur le décès de sa fille.

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