Une centrale solaire qui permettra de fournir de l'électricité à 2 700 personnes est en construction dans le petit village de Mailhac-sur-Benaize, dans le nord de la Haute-Vienne. Elle a une particularité : elle est construite tout près d'une ancienne mine d'uranium. Plusieurs projets de ce type vont prochainement voir le jour.
C’est un site hautement sécurisé, là où sont stockées des stériles miniers radioactifs, ces matériaux produits après l'extraction de l'uranium. Sur ce terrain, un parc photovoltaïque est en cours de d'installation, les travaux ont débuté en septembre 2022 et devraient s'achever en juin 2023.
Il a d'abord fallu défricher, et enterrer sur place tous les végétaux potentiellement radioactifs. La phase d'installation des panneaux photovoltaïques est maintenant bien avancée, une trentaine d’ouvriers est mobilisée.
"Tous les ouvriers qui ont commencé à travailler sur le site ont deux dosimètres sur eux, avec des relevés qui sont effectués tous les soirs. Ça a commencé avec les bucherons et ça continuera avec tous les ouvriers qui iront sur le site", précise Nicolas Violet, conseiller municipal à Mailhac-Sur-Benaize.
Cette centrale de 99 mégawatts (en contrat avec EDF) est installée sur un site près d'une ancienne mine du groupe Areva. De l'uranium a été extrait du sous-sol pendant près de 50 ans. Les terrains qui entourent les anciennes mines sont souvent encore radioactifs. Ils étaient fermés jusqu'à aujourd'hui. On va donc y implanter des panneaux solaires.
Un risque de négligence avec le temps, selon la Criirad
La Criirad, un laboratoire de recherche indépendant sur le nucléaire, pense, qu’avec le temps, le risque est d’oublier le danger de la radioactivité. Julien Syren, ingénieur à la Criirad, explique, en prenant un autre exemple en Loire-Atlantique : "sur un parc photovoltaïque installé sur une ancienne mine d'uranium, un incendie s'est déclaré en 2020 parce que les espaces verts de ce site n'étaient pas suffisamment entretenus. Donc, on voit même qu'à l'échelle de quelques années, la gestion d'un tel site peut être très rapidement défaillante." Or, selon lui, les déchets radioactifs présents dans ces anciennes mines resteront actifs pendant des millions d'années.
Autre réserve : "à partir du moment où des travaux vont être faits sur ce site, soit en creusant la terre, soit en construisant les bâtiments, on va pouvoir remobiliser ses matériaux qui, pour la plupart, sont enfouis. C'est la raison pour laquelle les autorités avaient mis en place des restrictions d'usages, en vigueur jusqu'en 2019, et qui interdisaient la construction de tout bâtiment et le creusement de toute tranchée sur ce terrain. On voit sur ce projet, comme sur d'autres projets en France, que les autorités ont dû lever ces interdictions, pour installer ces centrales photovoltaïques.
En attendant, la petite commune de Mailhac-sur-Benaize, 280 habitants, va pouvoir enfin rentabiliser un terrain, qu’il lui appartient depuis les années 2000. Et pour Madame le maire, Ginette Imbert, ce projet est une bonne nouvelle : "Ça va nous rapporter une location annuelle de 2 500 euros de l'hectare. C'est un apport pour une petite commune comme nous. On pourra faire des travaux dans nos bâtiments. Et puis un peu d'impôts après, sur les autres années."
6 sites réaménagés en parcs photovoltaïques
Dans le département de la Haute-Vienne, cinq autres projets sont en cours sur d'anciennes mines d'uranium, avec des avancements différents.
4 projets sont situés sur des propriétés du groupe Orano (anciennement Areva), mais exploités par la société Neonen :
- À Bessines-sur-Gartempe (Brugeaud-Lavaugrasse), sur un site de 19,5 hectares, la société Neonen va installer assez de panneaux pour alimenter 4 900 personnes en électricité. L'inauguration est prévue en février 2024 avec une durée minimale d'exploitation de 30 ans. Ce site, exploité de 1955 à 1993, a fait l'objet d'un réaménagement finalisé en 2000. Orano, qui loue le terrain, précise que l'installation est classée pour la protection de l'environnement et que le site fait l'objet d'une surveillance régulière encadrée par arrêté préfectoral, "permettant de garantir l'absence d'impact significatif environnemental et sanitaire".
- Bellezane : projet en cours d'études sur une surface de 16 hectares.
- Montmassacrot : projet en cours d'études sur une surface de 4 hectares.
- Deux projets sur la commune de Jouac : le premier de près de 13 hectares est en construction depuis février 2022. Pour le second, sur 13,5 hectares, une étude d'impact est en cours de réalisation.
1 projet situé à Saint-Sornin-le-Lac, sur l'ancien site de Montulat, qui n'appartient pas à Orano.
En Haute-Vienne, on compte 29 anciens sites miniers.