Crise des urgences et déserts médicaux : quatre questions sur le Service d'accès aux soins, la solution de Gabriel Attal

Ce terme est encore peu connu, et pourtant il nous concerne tous : le SAS, pour Service d’Accès aux Soins, s’adresse aux patients sans médecin qui ont un besoin médical imprévu. Dans une région confrontée à une baisse du nombre de soignants, et dans un contexte d’engorgement des urgences, où en est la mise en place de ce dispositif, et peut-il permettre d’améliorer la situation ?

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Le président de la République l’a mis en avant lors de sa conférence de presse en début d'année, et le nouveau Premier ministre, Gabriel Attal, l’a de nouveau évoqué dans son discours de politique générale, ce mardi 30 janvier à l'Assemblée nationale : le SAS, Service d’accès aux Soins, semble représenter pour le gouvernement une solution contre la crise des urgences et les déserts médicaux.

Pour Gabriel Attal, "Il permet un progrès notable dans l’accès aux soins non programmés." Le Premier ministre fixe un objectif : "Dès cet été, chaque département devra être doté d’un service d’accès aux soins avec de professionnels organisés pour assurer la permanence des soins." Si un département n’y parvient pas, il va jusqu’à menacer : "Je suis prêt à aller plus loin en restaurant des obligations de garde pour les médecins libéraux."

Le SAS, qu’est-ce que c’est ?

Le ministère de la Santé donne le mode d’emploi : un patient qui n’a pas de médecin traitant ou qui ne parvient pas à le joindre dans une situation imprévue peut composer le 15. Il est orienté par téléphone vers un "médecin régulateur" qui peut fournir un conseil médical, proposer une téléconsultation, ou déclencher une intervention en urgence. Les médecins régulateurs sont des médecins généralistes mobilisés à tour de rôle sur ce poste, basé à l’hôpital. Le patient peut aussi être orienté vers un "médecin effecteur", un généraliste de son secteur, qu’il ne connaît pas forcément, mais qui a réservé des créneaux de rendez-vous spécialement pour ces demandes non programmées. 

L’objectif affiché par le gouvernement est de faciliter l’accès aux soins et de désengorger les urgences.

Où en est-on en Limousin ?

Pour mettre en place un SAS, les médecins d'un territoire, à l'hôpital et en ville, doivent s'organiser pour travailler ensemble.

En Corrèze, le SAS est déployé depuis 2022, entre 8 h et 20 h. Pour Jean-Marie Chaumeil, président du conseil de l’ordre des médecins dans le département, le dispositif fonctionne bien : "Le médecin régulateur du SAS oriente les patients en fonction de la demande et propose des consultations chez des médecins généralistes. Le médecin généraliste s'inscrit sur une plateforme et déclare que de telle heure à telle heure, il peut recevoir une consultation non programmée." Le médecin effecteur est encouragé financièrement à participer : "Il reçoit une cotation plus avantageuse."

En Haute-Vienne, le SAS fonctionne aussi de 8 h à 20 h depuis l’année dernière, mais il n’est pas opérationnel à 100 %. Il faut encore recruter des "opérateurs de soins non programmés", des professionnels qui épaulent le médecin régulateur. Mais les porteurs du projet sont optimistes. Mickael Frugier, médecin au Vigen et copilote du SAS, évoque même de nouveaux objectifs comme celui d'"ouvrir le SAS à d’autres types de soins, par exemple dentaires, ou même psychiatriques."

La Creuse est le département limousin le moins avancé sur ce dossier. Pour Jean-Paul Lamiraud, président du conseil de l’ordre des médecins du département, c’est la conséquence du manque de soignants : "Le SAS passe par une régulation téléphonique importante. Aujourd’hui, on a une régulation téléphonique pas très solide faute de combattants... Nos médecins ont déjà tous la tête sous l’eau." Et pour recevoir les patients non programmés, certains médecins du département disent également ne pas avoir de créneau à libérer.

Quelle efficacité ?

En Corrèze, il est encore trop tôt pour savoir si l’arrivée du SAS a eu un impact sur la fréquentation des urgences. Mais selon Jean-Marie Chaumeil, le dispositif n’est pas assez connu : "Il faut que les gens sachent ce qu’est le SAS, et aussi qu’ils n’appellent pas le 15 pour tout et n'importe quoi. Il ne faut pas ignorer son médecin traitant."

Pour Mickaël Frugier, le SAS n’est pas un outil miracle pour lutter contre les déserts médicaux ou l’engorgement des urgences : "C’est un filet de sécurité. Ce n’est pas la porte ouverte vers les soins." Selon lui, la problématique des urgences est tout autre : "Vu la situation des urgences, les gens n’ont pas du tout envie d’y aller, il faut même se battre pour les convaincre quand on pense qu’ils en ont besoin. Le recours à l’hospitalisation ne va pas être impacté par le SAS."

En Creuse, Ludovic Le Moing, médecin généraliste à Moutier-Rozeille, travaille activement sur le dossier. Il voit déjà deux avantages à cette construction : "Cela permet de discuter entre nous de la gestion des soins non programmés pour mieux travailler ensemble. Et on pourrait aller vers une régulation déportée : les médecins feraient la régulation depuis chez eux. Comme on a très peu de régulateurs en Creuse, ce serait un moyen de recruter plus loin de Guéret."

Quelles réactions après les déclarations du Premier ministre ?

La menace du Premier ministre d’obliger les médecins à faire des gardes si un SAS n’est pas mis en place ne semble pas faire trembler les professionnels de santé interrogés.

En effet, le SAS, de 8 h à 20 h en semaine, et la permanence des soins, la nuit et le week-end, sont deux sujets distincts. En Creuse, le département le plus en retard pour le SAS, la garde n’est d’ailleurs pas un problème selon Ludovic Le Moing : "En Creuse, on n'a pas besoin de médecins supplémentaires en permanence des soins, tout est pourvu."

Surtout, avec cette menace d’obligation, il ne voudrait pas perdre le soutien des médecins les plus âgés : "Le risque avec la coercition, c'est un départ en retraite précoce. Ces médecins gèrent des patientèles souvent plus importantes que les jeunes médecins. Ils tiennent la baraque..." 

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