Européennes 2024 : résultats, annonce de la dissolution, élections législatives, réactions politiques en Limousin

La victoire historique du Rassemblement National aux élections européennes, l’annonce inattendue de la dissolution de l’Assemblée Nationale, cela, le jour des commémorations officielles des 80 ans des massacres de Tulle et d’Oradour-sur-Glane. Les réactions sont nombreuses parmi les politiques limousins.

À Tulle, en Corrèze, comme à Oradour-sur-Glane, en Haute-Vienne, les commentaires allaient bon train, sur ce que la soirée de ce dimanche 10 juin a amené, de surprises ou non, avant le début des commémorations officielles. Ailleurs, dans les territoires ou les permanences, la campagne avait déjà (presque) commencé.

La victoire du RN, en cette journée si symbolique à Oradour

Sur la quasi-totalité de l’échiquier politique limousin, la victoire du Rassemblement National, en des dates si marquantes pour la Région, 80 ans après les massacres qu’elle a connus, ne manquait pas de frapper.

Ainsi, à Oradour, Damien Maudet député LFI-NUPES de la 1ʳᵉ circonscription de Haute-Vienne, déclaré ce lundi 10 juin que "ces 80 ans sont un devoir de mémoire, mais surtout un devoir de vigilance. Je ne pensais pas un jour venir pour les 80 ans du massacre d’Oradour-sur-Glane commenter un RN à 30% et surtout commenter un gouvernement, alors que l’extrême droite a le vent en poupe, lui donne une possibilité d’accéder au pouvoir".

Un argument que voulait balayer Albin Freychet, délégué départemental du Rassemblement National en Haute-Vienne, qui lui n’assistait pas aux commémorations, et à qui on faisait remarquer que le RN avait obtenu près de 36% à Oradour lors de ce scrutin européen du 9 juin : "Mais les arguments comme quoi le RN a été fondé par des SS - il a d’ailleurs été fondé aussi par des résistants comme Michel de Camaret - ne font plus du tout écho aujourd’hui [sic]. Les personnes souffrent et veulent que l’on améliore leur situation." À noter que Pierre Bousquet, membre fondateur du FN fut bien un SS, membre de la division Charlemagne. Quant à Michel de Camaret, entre autre résistant et Compagnon de la Libération, il ne fut pas membre fondateur mais élu européen sous l’étiquette FN, de 1984 à sa mort, en 1987.

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Le score du RN, à 30,99% en Limousin : satisfaction chez les vainqueurs

Dans le camp des vainqueurs, on ne cachait, bien sûr, pas sa satisfaction, comme Valéry Elophe, secrétaire départemental du RN en Corrèze, qui n’était pas aux commémorations de Tulle : "C’est une immense satisfaction et une immense fierté. Nous étions déjà en énorme progression en 2022, nous sommes un mouvement dynamique, qui correspond à l’air du temps, et nous sommes plus proches des préoccupations des Français et des Corréziens, nous sommes dans la réalité, contrairement à nos adversaires."

Même son de cloche pour Albin Freychet : "En Haute-Vienne, les scores du RN sont excellents. Dans 185 communes, nous arrivons en tête, sur les 190. Même à Limoges, nous sommes en tête, ce qui veut dire qu’il y a un véritable bouleversement dans le paysage politique de la Haute-Vienne, du Limousin. Ça veut dire que c’est une grande majorité de Haut-Viennois qui veulent un changement.

Le score du RN, à 30, 99% en Limousin : consternation dans les autres camps

À gauche comme à droite, les commentaires ne sont, bien sûr, pas de la même teneur, même si tous reconnaissent que cette victoire n’est pas une surprise.

Nous sommes sous le choc. Sous le choc des résultats du RN, certes attendus, mais qui se concrétisent !

Gülsen Yildirim

Première secrétaire départementale du PS 87

Pour Valérie Simonet, présidente du Conseil Départemental (LR) de la Creuse, présente aux commémorations d’Oradour-sur-Glane, là encore, pas de surprise : "C’est un contexte auquel nous nous attendions. C’est un message fort des Français, dans nos territoires ruraux en particulier, mais ce n’est pas vraiment une surprise, on sentait que les choses couvaient. On se souvient des épisodes des gilets jaunes, il y a finalement peu d’années… Il y a un sentiment d’incompréhension dans les territoires ruraux."

L’annonce de la dissolution de l’Assemblée Nationale

Contrairement aux résultats des élections, l’annonce du président de la République de dissoudre l’Assemblée Nationale, et de convoquer des élections législatives, les 30 juin et 7 juillet prochains, a été elle une véritable surprise, diversement appréciée.

Pour Damien Maudet, "Emmanuel Macron fait peser l’échec de son quinquennat sur les parlementaires". Il est repris par sa collègue Manon Meunier, député LFI-NUPES de la 3ᵉ circonscription de Haute-Vienne : "Aujourd’hui, on est face à une décision d’Emmanuel Macron qui est historique et qui ouvre la porte à l’extrême droite. C’est en fait l’échec d’Emmanuel Macron."

François Dubois, député LR de la 1ʳᵉ circonscription de Corrèze, n’est guère éloigné dans ses commentaires : "J’ai ressenti une grande stupéfaction à l’annonce de la dissolution. Je m’attendais à tout sauf à cela. Je n’y croyais pas dans le contexte. Je pense que pour apaiser notre société, à l’heure actuelle, ce n’est pas le bon choix. La percée du RN et de l’extrême droite n’est pas surprenante, on sait très bien que les citoyens en ont marre de ce mandat d’Emmanuel Macron, de ce deuxième mandat. Ils en avaient déjà marre du premier, ils ne lui ont pas donné la majorité. Ils ont voulu lui prouver là qu’il se passe quelque chose au plan national. Ils attendaient plutôt, je pense, sa démission. Il aurait mieux valu organiser des élections présidentielles, plutôt que des législatives. Je pense qu’une fois de plus, il a fait les choses à l’envers, notre président de la République."

Sans parler de consensus, les représentants du Rassemblement National voient, eux aussi, dans cette dissolution, l’échec de la politique d’Emmanuel Macron. Ainsi, pour Albin Freychet, ce scrutin était "avant tout un vote national, et les Haut-Viennois se sont exprimés sur ce terrain-là. C’est finalement pour ou contre Macron, stop ou encore. Je pense que la différence se fait sur la politique d’Emmanuel Macron, qui est celle du mépris, et le Limousin a été fortement méprisé ces sept dernières années. Emmanuel Macron est totalement isolé aujourd’hui, il a été mis en minorité dans les urnes par les Français, je pense qu’il ferait bien d’éviter de donner des leçons aux Français sur leur manière de voter. Le peuple est souverain, il ne reste que son employé." 

La campagne des législatives a déjà démarré

Au Rassemblement National, on se dit prêt, prêt à un exploit historique, avec l’élection de députés RN en Limousin. Toujours pour Albin Freychet, "les derniers résultats montrent que nous sommes un parti de gouvernement, que nous sommes capables de diriger le pays, et Jordan Bardella, sera notre premier ministre si nous remportons ces législatives. On va travailler pour être présent dans les trois circonscriptions et apporter pour la 1ʳᵉ fois, ce serait historique, des députés en Haute-Vienne pour le RN !"

Même volonté en Corrèze, pour Valéry Elophe : "Nous allons repartir sur le terrain dès ce lundi, et nous allons battre campagne. Je suis candidat à la candidature, les annonces seront faites très prochainement, compte tenu des délais."

En face, le discours est évidemment différent. Pour les LR, il s’agirait avant tout d’apaiser, et de redonner confiance dans certaines valeurs. Valérie Simonet dit qu’il faut "repenser plus de justice autour de cette valeur travail en particulier, mais penser aussi aux jeunes. Il y a une rupture entre ce qui a permis de faire communauté et société pendant des générations, une rupture forte aujourd’hui où tout cela ne représenterait plus grand-chose."

Pour François Dubois, cela passerait même par un retour… au chiraquisme ! "Je suis à nouveau candidat pour que l’on puisse porter cette démocratie apaisée, et le Chiraquien que je suis souhaite que l’on revienne à ces moments où Jacques Chirac était président, et où la société se portait bien. Cela a été arrêté dès ce matin, on repart en équipe avec Pascal Coste et cette idée de toujours nos deux jambes, une jambe sur le département et une jambe nationale. Je veux dire à nos électeurs ce qu’ils savent : que je veux continuer à travailler pour la France, pour les Corréziens et porter la ruralité."

À gauche, on attend surtout un sursaut et un rassemblement. Damien Maudet et Manon Meunier en appellent à l’union populaire.

Quand on a comme cela dans le pays une vague du Rassemblement National, on doit toutes et tous faire un front populaire commun pour faire face à l’histoire, et empêcher l’extrême-droite d’arriver au pouvoir.

Damien Maudet

Député LFI-NUPES de la 1ere circonscription de Haute-Vienne

Pour Manon Meunier, "on a un bilan à défendre, la NUPES a su porter des mesures qui ont changé la vie des gens à l’Assemblée Nationale, on continuera, on se représentera. Oui, on appelle à une union massive de la Gauche, c’est une responsabilité historique aujourd’hui." 

Mais cette union, si elle est appelée, semble moins évidente au PS ou chez les Verts.

Gulsen Yildirim l’annonce : "Notre responsabilité est de créer un barrage au RN. On constate qu’Emmanuel Macron ne constitue plus le rempart, c’est à la Gauche de prendre ses responsabilités pour empêcher une cohabitation RN-Macron. Pour cela, quand on analyse les résultats, il y a un impératif : il faut s’unir à gauche. Mais avec des lignes qui soient claires, avec un projet qui porte sur des valeurs essentielles, comme celles que nous avons portées à l’occasion des européennes. Une dynamique a été créée par Raphaël Glucksmann, je crois qu’on doit décliner cette dynamique, avec bien sûr des propositions qui viennent d’ailleurs. Les stratégies d’alliance relèvent des directions nationales, il y a des discussions en cours, on verra à l’issue de celles-ci. Je ne porte pas de jugements sur le mandat ou le bilan de nos députés sortants. Ils ont représenté notre territoire, mais ce sont les discussions dont je parlais qui dicteront la suite."

Idem pour Delphine Rocher, qui était sur la liste EELV de Marie Toussaint :
"L’heure est grave, les écologistes prennent leurs responsabilités pour appeler à l’union contre l’extrême droite, en Haute-Vienne comme en France. Une union sur les bases de la Nupes ? On va en discuter avec les partis de gauche, mais les rencontres sont prévues. C’est ce qu’on va décider tous ensemble. On peut tout à fait envisager de soutenir les trois députés sortants. En fait, la majorité essaie de diviser PS, LFI et Verts, et il ne faut pas tomber dans le piège. Un front populaire commun ? Disons qu’il faut une union de la gauche, sociale, démocratique et verte. En tout cas, pas un arc républicain. C’est un coup de poker d’Emmanuel Macron, une manipulation pour diviser la gauche, et une autoroute possible pour faire entrer Jordan Bardella au gouvernement. "

Dans tous les cas, et dans tous les camps, les prochains jours s’annoncent chargés. Les candidatures pour les futures élections législatives devant, normalement, être déposées en préfecture d'ici à ce vendredi 14 juin.

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