Les intempéries de dernières semaines ne sont pas sans conséquences. De fortes pluies peuvent être à l'origine de dégâts importants sur les immeubles et les habitations. Ce qui peut rendre, parfois, des logements dangereux. Dans ces cas d'urgence, mairies et préfectures disposent de certains recours auprès des propriétaires privés pour exiger une mise en sécurité et des travaux. On fait le point.

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C'était le 21 octobre dernier, dans le quartier historique de Limoges : un mur de soutènement mitoyen à deux immeubles s'effondre, nécessitant l'évacuation et le relogement d'une dizaine de familles pour raison de sécurité. Si les experts seront seuls habilités à déterminer l'origine du sinistre, la mairie a enclenché, de son côté, une "procédure de mise en sécurité ordinaire".

C'est quoi la procédure de mise en sécurité ordinaire ?  

L’ancienne procédure de péril est remplacée, depuis le 1er janvier 2021, par la procédure de mise en sécurité ordinaire : pour les situations relevant de la sécurité, il appartient en effet au maire d’intervenir dans le cadre de ses pouvoirs de police spéciale. L'élu est ainsi compétent pour prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments, édifices ou monuments funéraires menaçants ruine

Le préfet peut se substituer à un maire défaillant 

Cette procédure s'applique s'il y a une atteinte à la solidité de tout édifice, ou de certains de ses éléments, intérieurs ou extérieurs, ou l'existence d’un risque pour la sécurité des occupants et / ou du public.

Quelle est la différence avec l'ancien arrêté de péril ? 

Quelques points changent notamment sur l'appel aux experts et la rapidité de la procédure.

Avant 2021, l’expert mandaté par la mairie venait systématiquement d’un tribunal. Aujourd'hui, la mairie peut disposer, comme c'est le cas à Limoges, de ses propres équipes : un gain de temps précieux dans ce type d'affaires.

Une démarche fréquente ? 

Depuis le début d’année : une dizaine de mesures ont été prises à Limoges. C'est beaucoup, notamment à cause des quantités de pluie très importantes tombées dans la période. 

Christophe Chuette, de la direction de la Sécurité, de la Prévention et de la Salubrité et du service Communal d’Hygiène et de Santé de la Ville de Limoge précise que les dossiers concernent essentiellement des maisons de 300-400 ans avec des murs de soutènement vieux de soixante ans et qui n’avaient jamais bougé avant cette année et les intempéries.

Dans le dernier cas survenu le 21 octobre, la cause du sinistre n'est pas encore identifiée. 

Comment ça marche ?

Tout commence par la constatation des dégâts par le maire et les autorités compétentes. Puis survient le passage d'un expert chargé d'établir un rapport, qui confirme ou non l’existence d’un danger imminent. 

S'ensuit alors obligatoirement une phase dite "contradictoire" avec le propriétaire ou le titulaire d’un droit réel immobilier de l’immeuble, avant que la mairie ne prenne son arrêté : le délai laissé aux personnes propriétaires des locaux, pour faire part de leurs observations, est porté à un mois minimum

Prise d’arrêté et scénarios possibles 

L’autorité compétente met "en demeure le propriétaire et, le cas échéant les autres titulaires de droits réels figurant au fichier immobilier, de faire, dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au péril ou ordonner les travaux de démolition."

Différents scénarios sont alors à envisager, en fonction du rapport d'expert : 

  • La réparation ou toute autre mesure propre à remédier à la situation y compris, le cas échéant, pour préserver la solidité ou la salubrité des bâtiments contigus.
  • La démolition de tout ou partie de l’immeuble ou de l’installation.
  • La cessation de la mise à disposition du local ou de l’installation à des fins d’habitation.
  • L’interdiction d’habiter, d’utiliser, ou d’accéder aux lieux, à titre temporaire ou définitif. 

En cas de danger imminent, l’arrêté de mise en sécurité ordinaire sera précédé d’un arrêté de mise en sécurité imminent.

L’arrêté ne peut prescrire la démolition ou l’interdiction définitive d’habiter que s’il n’existe aucun moyen technique de remédier à l’insalubrité ou à l’insécurité ou lorsque les travaux nécessaires à cette résorption seraient plus coûteux que la reconstruction.

On notera que rien n'empêche de mettre cette procédure en place sur des bâtiments publics. Ce n’est pas exclu de la réglementation. 

Le propriétaire doit ensuite appliquer les mesures

  • À l’issue du délai imparti, un agent disposant des compétences techniques suffisantes établit un rapport constatant la réalisation, ou non, des travaux prescrits, exécutés dans les règles de l’art. Si les travaux ont été réalisés de façon satisfaisante, le maire en prend acte par un arrêté de mainlevée
  • Lorsque les prescriptions de l'arrêté de mise en sécurité n'ont pas été mises en œuvre dans le délai fixé, l'autorité compétente peut, par décision motivée, faire procéder d'office à leur exécution, aux frais du propriétaire. Elle peut prendre toute mesure nécessaire à celle-ci. Elle peut également faire procéder à la démolition prescrite sur jugement du président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, rendu à sa demande.

Que se passe-t-il si les logements concernés sont loués ? 

S’il y a besoin de relogement, la mise en place de la procédure de sécurité permet donc d'arrêter le paiement des loyers et le relogement est à la charge du propriétaire. Cette mise en sécurité a pour objectif de respecter les droits des locataires.

S'il y a une interdiction temporaire d’habiter le logement, le propriétaire ou l’exploitant est tenu d’assurer l’hébergement des occupants. 

S'il y a interdiction définitive d’habiter le logement, le propriétaire, l’exploitant ou la personne qui a mis à disposition le bien est tenue d’assurer le relogement. Il est tenu de verser à l’occupant évincé une indemnité d’un montant au moins égal à trois mois de son nouveau loyer.

À noter que le bail est suspendu à partir du 1ᵉʳ jour du mois suivant la notification de l’arrêté jusqu’au 1ᵉʳ jour du mois suivant l’envoi de l’arrêté de mainlevée. Le loyer cesse d’être dû à partir du 1ᵉʳ jour qui suit la notification de l’arrêté ordinaire.

À lire aussi : effondrement dans le quartier historique de Limoges : le site mis en sécurité, l'origine du sinistre toujours indéterminée

Effondrement d'un mur de soutènement à deux immeubles du quartier historique de Limoges : où en est-on ? 

Christophe Chuette, de la direction de la Sécurité, de la Prévention et de la Salubrité et du service Communal d’Hygiène et de Santé de la Ville de Limoges nous explique les choix pris  par la ville : "Nous avons déclenché une première procédure qui est celle du pouvoir de police du maire avec interdiction d’habiter, ce qui nous a permis de ne pas déclencher l’arrêté de mise en sécurité imminent. Ensuite, il y a un diagnostic d’expert. Une fois qu’il est réalisé, on enclenche la phase contradictoire : les quatre propriétaires ont un délai minimum d’un mois pour proposer des travaux. Si les propriétaires ne font pas les travaux dans le temps imparti, la municipalité peut se substituer et faire les travaux avec recouvrement de créance. S’il y avait eu un arrêté de mise en sécurité imminent, il n’y aurait pas eu cette phase contradictoire qui permet dans 80% des cas de régler la situation à l'amiable avec les copropriétaires. 

Ce dernier précise que la mise en sécurité a été faite de manière immédiate par les pompiers avec étaiement, pour parer à l'urgence. La prochaine étape est donc l'expertise qui doit être mandatée par les propriétaires ou les assurances. 

Si et seulement si le propriétaire et les assurances ne font pas le nécessaire, alors le maire peut intervenir. Objectif : protéger, si nécessaire, les habitants et le voisinage. En interne, la mairie a aussi ses propres ingénieurs. Mais Christophe Chuette se veut rassurant : dans plus de 80% des cas, les propriétaires obtiennent des expertises dans le délai prévu d’un mois.

Qui des locataires, du relogement et qui paye ? 

Dans le cadre de cet effondrement à Limoges, Christophe Chuette précise être en contact "avec un des copropriétaires qui est très réactif là-dessus : ce dernier a déjà pris les devants pour qu’il y ait expertise."

L'objectif est bien sûr, pour tout le monde, une solution rapide pour garantir la sécurité du public et des locataires.

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