"Il y a une certaine méfiance concernant le lavable" : culotte menstruelle, cup, protections lavables, le difficile développement des nouvelles protections hygiéniques

La question de la précarité menstruelle est prise à bras-le-corps par les régions. Parallèlement à cette politique, les alternatives aux protections hygiéniques jetables se développent : une avancée d'un point de vue écologique, mais quelques freins restent encore à lever pour permettre la démocratisation des protections hygiéniques lavables.

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Selon Médecins du Monde, "la pandémie de Covid-19 et les confinements qu’elle a provoqués ont eu un impact sur la santé et l’hygiène menstruelles. Les restrictions de déplacements, la fermeture de structures de santé, les pertes de revenus ont été autant de difficultés additionnelles pour accéder aux produits d’hygiène menstruelle."

Depuis, la hausse des prix n'a pas permis d'améliorer la situation : en France, une femme sur trois est confrontée à la précarité menstruelle, notamment chez les jeunes. Quatre millions de femmes et personnes menstruées manquent de protections périodiques. 

C'est la raison pour laquelle la précarité menstruelle est prise de plus en plus au sérieux par les différents organismes et les régions.  C'est le cas de la Nouvelle-Aquitaine qui cherche à lutter contre cette difficulté d'accès aux produits d'hygiènes des jeunes femmes aux faibles revenus. Pour cela, l'institution a lancé des appels à projets auxquels répondent les associations. Ce combat s'inscrit, entre autres, sur une feuille de route de la région appelée Neo Terra. Des actions sont menées dans les lycées néo-aquitains.

Parallèlement au manque de moyens, ces dernières années, les protections hygiéniques se sont développées sous l'impulsion de différents facteurs comme l'écologie, l'inflation ou la santé. Des culottes menstruelles, des "Cup"et des serviettes hygiéniques lavables… qui ne trouvent pas toujours leur public. 

Tampons et serviettes jetables, bios et gratuits 

Depuis septembre 2023, 212 établissements en Nouvelle-Aquitaine disposent de distributeurs de protections hygiéniques, ce qui représente 73% des établissements. "C'est quelque chose qui marche bien, se réjouit Catherine La Dune, vice-présidente du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine en charge du handicap, de l’égalité et de la lutte contre les discriminations. Il y avait des craintes concernant les abus, mais ce sont des choses très respectées."

Les tampons et serviettes sont jetables, bios et gratuits et sont rechargés trois fois, puis les frais reviennent à l'établissement, "mais nous essayons d'aller plus loin", précise la vice-présidente.

Les distributeurs sont situés dans les toilettes des filles. "Au moins, elles n'ont pas besoin de demander chaque fois à l'infirmière. Il y a une forme de discrétion qui est appréciée."

Ce dispositif est arrivé à la demande des lycées.

Nous faisons aussi des interventions auprès de chefs d'établissement. D'ailleurs souvent les hommes de ces établissements sont très contents de ces initiatives.

Catherine La Dune

vice-présidente du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine en charge du handicap, de l’égalité et de la lutte contre les discriminations

De nouvelles protections plus respectueuses du corps et de l'environnement

Nouveaux Cycles, comme d'autres associations, organise des rendez-vous pour sensibiliser des lycéennes et lycéens des Landes et de la Gironde, afin de leur faire découvrir différents types de protections hygiéniques. Certaines sont parfois inconnues : "On présente les culottes menstruelles, les disques, les éponges, les tampons lavables, la cup. On leur montre que des solutions existent à travers des ateliers", explique Alix Speyer, chargés d'animations et d'interventions chez Nouveaux Cycles.

On remarque qu'ils posent beaucoup de questions, qu'il y a de la curiosité. On laisse à l'infirmerie de ces établissements des lots gratuits de ces différents types de protections pour celles qui le souhaitent.

Alix Speyer

chargée d'animations et d'interventions chez Nouveaux Cycles

Il existe aujourd'hui plus d'une dizaine de marques de culottes menstruelles "et même des maillots de bain menstruels", détaille la chargée d'animations. Les marques de vêtements comme Gemo, Intersport ou Decathlon proposent aussi des sous-vêtements menstruels. 

"Elles méconnaissent leur propre corps"

En ce sens, la mission locale de Limoges organise une fois par mois, un atelier similaire pour les jeunes entre 16 et 25 ans. Elle est accompagnée par l'association Entr'Aids qui intervient une fois par mois :

Il est important que les femmes connaissent leur corps. On constate qu'elles méconnaissent leur propre corps dû à des facteurs socioculturels. Ça peut être un tabou. On sent qu'il y a vraiment un besoin d'en parler et en toute liberté.

Sonia Elanbrie

responsable de la vie sociale et collective à la mission locale de Limoges

Encore des freins à lever 

Il existe toujours un tabou autour des règles, ce qui rend difficile la démocratisation des protections lavables auprès des jeunes, même si ces protections réutilisables répondent à un besoin écologique : "À ces âges-là, on ne lave pas forcément ses sous-vêtements soi-même, explique Catherine La Dune, vice-présidente du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine en charge du handicap, de l’égalité et de la lutte contre les discriminations. Et tout le monde n'a pas de machine à laver chez soi. Donc, pour des familles dans lesquelles c'est un sujet délicat, ça peut être assez lourd et peu pratique pour les lycéennes. De plus, si on n'a pas l'occasion de rentrer chez soi, on doit avoir, sur soi, toute la journée, sa serviette "souillée". Ça peut créer une gêne, un sentiment un peu humiliant.

Il y a une certaine méfiance concernant le lavable, parce que les lycéennes n'ont pas eu l'occasion de tester. Mais quand cela arrive, il y a de très bons retours.

Alix Speyer


Alix Speyer partage le même constat : "Il y a une certaine méfiance concernant le lavable, parce que les lycéennes n'ont pas eu l'occasion de tester. Mais quand cela arrive, il y a de très bons retours. Le prix aussi peut en refroidir certaines, à ces âges-là, ce sont souvent les parents qui achètent. Il faut compter en moyenne trente euros pour une culotte menstruelle de bonne qualité et fabriquée en Europe. Mais, il y a plus d'offres qu'avant donc on peut en trouver à différents prix." 

Dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour l'année 2024, les protections hygiéniques réutilisables devraient être en partie remboursées, d'ici à la fin de l'année, pour les moins de 26 ans. Cela devrait concerner environ 6,7 millions de personnes.

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