Il reste quatre jours à Céline Forte pour introduire un recours gracieux auprès de la DNCCG et apporter les garanties financières nécessaires à l'engagement du Limoges CSP en Betclic Elite la saison prochaine. Mercredi dernier, la propriétaire du club affirmait "mettre tout en œuvre pour que les sommes prévues contractuellement avec notre partenaire arrivent dans les plus brefs délais", mais ce lundi soir le recours gracieux n'a toujours pas été déposé.
Comme le confiait, la semaine dernière le président démissionnaire Didier Jamot, "face à son manque de trésorerie, le Limoges CSP a négocié une autorisation de découvert avec la banque, que j'ai signée".
Les caisses du club sont vides, en raison du déficit accumulé de plus de deux millions d'euros, par quatre années de mauvaise gestion, mal dissimulé auprès de la DNCCG qui a souligné "le non-respect des engagements pris, l'insincérité des hypothèses budgétaires, de la récurrence de cette insincérité, et de l'absence d'attestation du commissaire aux comptes".
Le non-versement de la seconde partie de la subvention municipale à hauteur de 600.000 euros a contraint Céline Forte à mettre la main à la poche pour assurer le paiement des salaires des joueurs.
Le paiement de ces salaires est d'ailleurs "indispensable pour éviter que les joueurs et entraîneurs encore sous contrat comme Nicolas Lang ou Alexandre Chassang ne quittent le club dès maintenant", selon un expert juridique.
Dans un club prompt à se séparer de son directeur sportif Kevin Anstett pour une "faute grave" encore indéterminée et qui fera l'objet d'une audience prochaine devant les prud'hommes, une telle situation aurait dû conduire au licenciement immédiat des responsables financiers et commerciaux.
Au lieu de cela, Céline Forte a conforté son gendre, Guillaume Lanave, au point d'en faire son bras droit opérationnel et "le président de fait", selon les confessions de Didier Jamot.
8500 signatures pour la pétition
Alors que la pétition, pour exhorter Céline Forte à accepter l'offre de Lionel Peluhet, a rassemblé près de 8 500 signatures en 4 jours (deux fois l'affluence moyenne du Palais des Sports), la propriétaire du CSP continue à espérer le virement de 4,5 millions d'euros sur les comptes du club en provenance d'un mystérieux investisseur congolais, via Hong-Kong et Miami.
Cette manne providentielle, attendue au plus tard pour ce mardi 4 juin, est la seule façon de remplir les comptes courants du club, d'éviter un dépôt de bilan et de convaincre la DNCCG.
Comme nous l'a confié un spécialiste du dossier, "il n'y a que la présence effective de l'argent sur les comptes qui peut amener la DNCCG à revoir sa position".
Avec une réserve tout de même, évoquée par Patrick Hianasy la semaine dernière : la vérification de la provenance de cet argent par une éventuelle procédure Tracfin, réservée habituellement aux trafics internationaux et au blanchiment d'argent, "du jamais vu dans le basket français".
Ce lundi soir, le recours gracieux n'ayant toujours pas été déposé, selon nos informations, l'argent doit toujours être perdu quelque part dans les limbes de l'informatique bancaire, à moins qu'il n'ait jamais existé...
La motivation de ce mystérieux investisseur reste à éclaircir
Mais les motivations de cet investisseur promis depuis des mois interrogent, à la différence de Lionel Peluhet, dont l'attachement au club et l'amitié le liant à Frédéric Forte sont parfaitement connus.
Le président de la Fédération française de basket, Jean-Pierre Siutat, le confie dans le documentaire "Je suis Limoges" : "Pau n'a pas été une expérience très réussie, moi je suis plus inquiet sur des fonds qui vont directement sur des clubs. Le fonds n'est pas un philanthrope, s'il investit, c'est pour faire de l'argent, et l'argent, il y a deux solutions : soit c'est pour un rapport immédiat, soit c'est à la sortie avec la revente, donc il faut qu’il y ait autour de cet investissement les ingrédients pour réussir".
Il y a trois ans, l'Elan Béarnais était exactement dans la même situation que son "meilleur ennemi" aujourd'hui. Les collectivités locales se désengageaient et cédaient leurs parts à un investisseur américain, Counterpointe Sports Group, pour 800 000 euros. Mais au bout d'un an, l'opération était un fiasco, avec un déficit de 3 millions d'euros. L'investisseur américain revendait ses parts en juin 2022 à un nouvel investisseur et l'Elan Béarnais ne devait son maintien en Betclic Elite qu'à une décision en appel du Conseil Fédéral.
Avec un budget en baisse de plus de 30%, l'Elan était finalement rétrogradé sportivement en Pro B un an plus tard, et il y devrait y rester encore au moins une saison, sauf s'il profite du forfait du Limoges CSP.
De nouveaux poids lourds
Car les clubs légendaires comme Limoges et Pau sont aujourd'hui écrasés par les nouveaux venus qui explosent tous les records : Monaco avec 27 millions d'euros de budget et son propriétaire russe, Villeurbanne avec Tony Parker et ses 21 millions, et Paris avec plus de 9 millions, survolent le championnat financièrement et sportivement.
Si, avec son double titre de champion de France 2014/2015, le CSP de Frédéric Forte représentait à lui seul le quart du résultat net du championnat élite, aujourd'hui, il n'est plus, dans le meilleur des cas, qu'un club moyen du championnat avec un budget de 6 millions d'euros cette saison.
Mais ce qui a toujours fait la force du Limoges CSP, c'est son cœur qui bat dans les travées du Palais des sports, un cœur aujourd'hui brisé. Si Céline Forte peut encore croire trouver des billets verts venus du bout du monde, elle a perdu, sans doute pour toujours, le peuple vert de Beaublanc.