Dégradation de l’accès aux soins, tensions sur les effectifs et menaces de fermetures : onze présidents et présidentes de conseil de surveillance de centres hospitaliers français, dont celle d’Esquirol à Limoges en Haute-Vienne, et celle de la Valette à Saint-Vaury en Creuse, ont adressé un courrier à Geneviève Darrieussecq, ministre de la Santé, pour l’interpeller sur la situation de la psychiatrie publique.
Une situation qui s'enlise
C’est depuis des années et des années un serpent de mer, sauf que ceux qui le combattent ont plutôt l’impression d’être dans le désert : la psychiatrie française, particulièrement publique, est en grande souffrance.
Cette formule, on pouvait déjà la lire dans la presse il y a plus de dix ans, et même avant encore. Quelques chiffres pour confirmer : entre 1997 et 2015, près de 15 000 lits de psychiatrie auraient été fermés en France quand, entre 2010 et 2016, 300 000 personnes supplémentaires auraient été suivies. Et on estime aujourd’hui que près de treize millions de Français sont victimes de troubles psychiques chaque année, avec une dégradation particulièrement alarmante chez les jeunes, dont les 18-24 ans !
À tel point que Michel Barnier annonçait, fin septembre, vouloir en faire une grande cause nationale pour 2025, moins de trois semaines après sa nomination au poste de Premier ministre.
Il faut agir rapidement
Mais effet d’annonce ou volonté réelle ? C’est en partie pour le savoir que onze présidents de conseil de surveillance de centres hospitalier ont cosigné un courrier à la ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq.
Parmi les signataires, Marie-Christine Bunlon, pour le CH La Valette à Saint-Vaury en Creuse, et Gulsen Yildirim, pour le CH Esquirol à Limoges en Haute-Vienne. Pour cette dernière, "l’attente, c'est déjà de faire en sorte d’avoir une réponse de la ministre de la Santé, puisque nous avons souhaité un rendez-vous avec elle, pour non pas dénoncer la situation, mais pour apporter notre contribution à cette grande cause nationale. Il y a des réponses rapides à apporter. Déjà, en termes de moyens humains."
Moyens humains, et financiers bien sûr, comme partout, les nœuds du problème. Sont dénoncés, pêle-mêle : un manque d’attractivité, quand près de 23% des postes de psychiatres sont vacants au sein de l’hôpital public, selon la Fédération Nationale Hospitalière. Les tensions sur les personnels médicaux et paramédicaux, qui amènent les fermetures de lits et de centres évoquées plus haut. La dégradation générale de l’accès aux soins qui en est induite, et on en passe...
Sans oublier toutefois les conséquences sur les plus jeunes, particulièrement dénoncées.
Rien qu’en Creuse, deux unités de pédopsychiatrie pourraient fermer prochainement, faute de praticiens. Sont concernées l’Hermitage à La Souterraine, et la Petite Maison à Guéret. L’Agence Régionale de Santé doit d’ailleurs se prononcer sur ces cas en novembre.
Des situations que regrette forcément Gulsen Yildirim : "on n’a pas les moyens de prendre en charge correctement ces jeunes, alors qu’en grandissant, leurs troubles s’accroissent. Et on se retrouve alors face à des jeunes qui sont en grande souffrance, et cela explique parfois cette violence qu’ils expriment d’une manière ou d’une autre."