Une cinquantaine d’œuvres, exclusivement réalisées pas des illustratrices femmes, met en lumière la condition féminine. Avec une mise à l’honneur particulière pour le travail de l’illustratrice iranienne Firoozeh Mozaffari.
Un homme poilu en bras de chemise trônant dans un fauteuil rouge, surplombé par des têtes de femmes, l'image est saisissante et provocante.
Une femme de retour du marché, un bébé accroché dans son dos, marchant sur un tapis rouge traversant un alignement de tout l'électroménager, symbole du cliché de la ménagère de service, avec en fond de scène un bureau, l'image se passe de commentaire et touche à son but.
Choquer. C'est l'intérêt et l'effet recherché. La caricature est une arme de destruction massive des préjugés et des inégalités qui pèsent d'un poids trop lourd sur les épaules des femmes. Un dessin peut-il changer les choses au fond ? C'est le pari des dessinatrices exposées, mais c'est sur les mentalités que la prise de conscience doit agir.
Le sort des femmes est aussi l'affaire des hommes
Quand on arrive dans la grande salle du centre internationale de Saint-Just-le-Martel, une cinquantaine d’œuvres de femmes dessinatrices sont accrochées au mur et sur des grandes tables sur tréteaux. Ils viennent du monde entier, comme leurs illustratrices. Après avoir été montrés en Argentine, ces dessins font étape à Saint-Just-le-Martel.
« C’est une exposition de femmes, de dessinatrices femmes, qui traitent des problèmes des femmes, mais qui parlent des hommes aussi » raconte fier Guy Hennequin, coprésident du centre de la caricature, du dessin de presse et de l’humour. Le sort peu enviable des femmes est aussi l'affaire des hommes.
Comme pour chacune de ses expositions, le centre de la caricature et du dessin de presse traite des thèmes qui font l’actualité. Cette fois-ci : le regard des artistes se porte sur la condition féminine. L'actualité est souvent une source d'inspiration des dessinatrices, aux États-Unis notamment qui vient de faire un bond en arrière du point de vue de sa législation.
« Avec la modification de la loi sur l’avortement, une dessinatrice a fait un dessin sur ce thème qui a été publié dans le Washington Post, un dessin que l'on retrouve parmi l'ensemble de ce qui est exposé ici », raconte avec fierté Isabelle Gilliard, en charge de la communication et de la logistique à Saint-Just-le-Martel.
Si aujourd’hui la place des illustratrices s’améliore, nombre d’artistes considèrent qu’il y a encore du travail à faire.
« J’ai toujours entendu dire pendant toute ma vie qu’on est peu de femmes dessinatrices, mais la vérité, c'est que si on cherche un peu, on va vite se rendre compte qu'il y en a. Le plus important maintenant, c'est qu'il faut les encourager un peu », argumente Marlene Pohl, dessinatrice argentine dont les œuvres sont mises en avant en Limousin. Sa collègue Cristina Sampaio, dessinatrice portugaise, confirme et insiste sur le fait « qu’il y a beaucoup de femmes dessinatrices qui méritent d’être montrée, et qu'il peut y avoir lieu à une exposition de qualité avec seulement des femmes. » Pour elle, il faut casser l'idée que « c’est une profession considérée depuis longtemps comme réservée aux hommes », plaide la dessinatrice portugaise.
Mise à l’honneur dans cette exposition, l’Iranienne Firoozeh Mozzaffari. Elle évoque l’importance de l’art pour changer les mentalités.
« L'art peut toujours jouer un rôle et éveiller les consciences. Diffuser les connaissances est la première étape du changement. Un changement qui se produit plus rapidement dans un monde démocratique et libre. Dans les pays autoritaires, il y a un long chemin à parcourir », rappelle-t-elle, tant les femmes sont brutalisées, martyrisées, violentées, tuées dans son pays encore récemment, parce qu'elles sont femmes.
Riche d’enseignement, subversive et drôle, l'exposition baptisée « Femmes à la Une » est à découvrir jusqu’au 13 août.